Avec la force de frappe qu'on lui connaît, le gouvernement sud-coréen a annoncé la création d'une alliance des géants de l'industrie pour concevoir un métavers national capable de concurrencer celui de Facebook.
Loin de se laisser distancer par Roblox, leader du secteur, ou impressionner par les récentes annonces de Facebook en matière d'univers virtuel, la Corée entend bien conserver une longueur d'avance. Pour cela, le pays qui s'est déjà imposé comme figure de proue mondiale dans le déploiement des e-sports, a déclaré une impérieuse mobilisation nationale.
Selon The Korea Times, le ministre sud-coréen des Technologies de l'Information et de la Communication a rallié 17 entreprises de pointe pour collaborer autour de la création de nouvelles technologies propices au lancement d'un métavers. Pour rappel, il s'agit d'un univers virtuel et immersif, mélangeant jeux vidéo, réseaux sociaux, divertissement et e-commerce, le tout saupoudré de réalité virtuelle et augmentée.
Consortium sud-coréen dédié au métavers
Parmi les 17 chaebols (des conglomérats d'entreprises coréens) convoqués, notons la présence de SK Telecom Co, plus grand opérateur de téléphonie mobile du pays, Hyundai Motor Co, pôle automobile et agriculture de Hyundai, ou encore MOIBA (Korea Mobile Internet Business Association), qui rassemble quelques 500 entreprises Internet. En juillet dernier, SK Telecom avait déjà lancé ifland, un embryon de métavers, permettant aux utilisateurs de participer à des réunions sous forme d'avatars animés.
D’après The Korea Times, les entreprises et groupes industriels œuvreront main dans la main pour rassembler, étudier et comparer les différentes tendances et technologies en rapport avec le métavers, tout en examinant les enjeux éthiques et culturels du marché. En parallèle, différents projets seront lancés conjointement avec le soutien du ministère. Ce dernier a d'ailleurs alloué 9,3 trillions de wons (un peu moins de 7 milliards d'euros) à l'accélération de la transformation numérique et à la promotion de nouvelles industries pour l'année 2022.
Soucieuse de se faire une place parmi les pionniers du métavers, Séoul a accueilli en octobre la plus grosse conférence internationale dédiée au métavers, Metacon 2021. Rien d'étonnant à ce positionnement ambitieux lorsqu'on sait que les analystes estiment que le marché du métavers devrait être valorisé à 280 milliards de dollars en 2025.
La Corée du Sud, ou la parfaite alliance des nouvelles technologies et du divertissement
Au pays du matin calme, le secteur brasse d'ores et déjà énormément d'argent : Samsung Asset Management a lancé en juin dernier le Samsung Global Metaverse Fund, qui ambitionne d'atteindre 100 milliards de wons (environs 73,6 millions d'euros) d'ici la fin de l'année.
Si le projet sud-coréen de métavers national n’en est qu’à ses prémices, il est à parier qu’il ne manquera pas de séduire la « génération MZ », qui rassemble millenials et génération Z, et compte pour plus d’un tiers de la population du pays. En effet, le pays se démarque déjà par sa capacité à combiner parfaitement deux industries susceptibles de capter ces consommateurs, celles des nouvelles technologies et du divertissement.
« Beaucoup d’attention est portée à l’intrication de ces deux industries. Les entreprises sud-coréennes ont développé un réel savoir-faire à ce niveau », explique Sung Eun Lee, chargée des relations publiques au Centre Culturel Coréen à Paris. « Le parfait exemple de cette expertise est l’application Weverse, qui s'adresse exclusivement aux fans de K-pop et entremêle habilement vidéos, chat et e-shop. »
Et le pays est déjà bien aguerri au sujet. En Corée du Sud, il faut aussi compter avec Zepeto, sorte de Roblox proposée par Naver Corporation, le Google local, permettant de se confectionner « un autre moi dans un autre univers. »
Mentionnons aussi le projet mené par la maison de production SM Entertainment, qui à la manière de Marvel et comme de nombreuses autres maisons de production sud-coréennes, entend développer son propre multivers, le SM Culture Universe (SMCU). « Ce qui distingue le SMCU et le rend plus ambitieux que tout autre métavers k-pop, c'est sa portée. Ce n'est pas seulement un monde fictif créé pour un seul artiste, mais un univers qui reliera toutes les créations du label », souligne le média musical britannique NME. Pour ses premiers pas réalisés l'été dernier, SMCU a présenté les alter egos des membres du groupe aespa, qui évoluent dans un univers baptisé « Kwangya. »
Roblox et surtout Facebook, déjà ringard avec Meta, n'ont qu'à bien se tenir. N'hésitons toutefois pas à rappeler que le concept de métavers provient originellement de la science-fiction, qui le présente à juste titre comme hautement dystopique. A bon entendeur...
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