
Susi Gelb, Jenine Marsh, Charlotte Heninger, Mahalia Kohnke-Jehl, quatre artistes qui questionnent ce que nous retiendrons de notre époque.
L’archéologie est définie comme un “discours sur l’ancien”. Pourtant c’est bien une discipline qui introduit des images, ou plus précisément leur manque (les traces, les vestiges, les ruines) dans le récit historique. Elle participe à la constitution d’une identité collective. Faire le choix de conserver, c’est institutionnaliser un imaginaire commun afin de donner une ligne directrice au futur. C’est bien l’Homme d’une époque donnée qui sélectionne ces vestiges avant qu’ils ne disparaissent. C’est bien l’Homme d’hier qui fait le choix subjectif de ce qu’il souhaite conserver pour la postérité et celui d’aujourd’hui qui le place sur un piédestal et le raconte.
Introduire ces questions dans la création contemporaine, c’est poser la question de ce qui est essentiel aujourd’hui. Dans l’optique d’une archéologie du présent, la conservation sous une cloche de verre ou dans du formaldéhyde a le pouvoir de signifier une époque, d’en conserver l’âme. En archéologues d’aujourd’hui, que conservent les jeunes artistes ? Ce qu’ils conservent est-il réellement empreint de ce qu’ils redoutent de voir disparaître ?
Susi Gelb, née en 1985, vit et travaille en Allemagne
Susi Gelb reconstitue des paysages aux allures de science-fiction à partir de vestiges de notre monde, collectés quasi scientifiquement. Dans ses scènes extraterrestres qui mêlent éléments naturels et technologiques, l’artiste enferme dans des blocs de résine toutes sortes de fruits, de légumes et de pierres. Ainsi, elle fait le choix de porter à la postérité des éléments qui nous semblent pourtant inextinguibles, esquissant ainsi un futur non souhaitable où la nature ne perdurerait pas.


Jenine Marsh, née en 1984, vit et travaille en France
L'œuvre de l’artiste Jenine Marsh aborde littéralement les traces que nous laissons sur la terre. Ici, il s’agit d’une installation au sol construite avec un mélange de terre, de béton et de graines de fleurs sauvages. Parsemée de pièces de monnaie mêlées à la matière organique, l'œuvre raconte les vestiges d’une société capitaliste où se rejoignent la notion de valeur monétaire, l'action de l’homme et la mortalité des corps matériels.

Charlotte Heninger, née en 1992, vit et travaille en France
Dans l'œuvre ATA, Charlotte Heninger présente un fossile emprisonné dans de la résine. En son sein, se trouve la représentation au graphite d’un caillou venant du désert d'Atacama au Nord du Chili. Sous la force du soleil, ce dernier est complètement éclaté. Lieu d’existence aride et sépulture géante, le désert est un passage restreint entre la vie et la mort. On peut voir dans cette œuvre un discours sur la finitude mais aussi sur la conservation et le temps suspendu. L’être vivant s’est pétrifié ici pour devenir un trésor de l’Homme, preuve irréfutable d’un temps où la nature exultait encore.

Mahalia Kohnke-Jehl, née en 1990, vit et travaille en France
Dans un paysage quasi désertique, Mahalia Kohnke-Jehl a sculpté en bois une sorte de carcasse animale. Ce fossile artificiel abandonné en pleine nature, dans une scène fantastique mais crédible, se fait presque monument commémoratif d’une espèce animale qui aurait disparu et sert à la fois d’illusion et de rappel aux générations présentes.

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