
C’est la version 2021 du papier à bulles qu’on aimait tant faire claquer sous nos doigts.
Et ça cartonne chez les enfants, façon plaques de silicone colorées de toutes formes, spécialement conçues pour faire « pop. » En forme de licornes, d’avocats, de cœurs ou de burgers, couleurs fluo ou pastel... Les Pop It sont partout, entre toutes les mains d’enfants et dans toutes les cours d'école. Pour briller à la récré, se détendre dans le métro ou après une interro de géo’, chacun arbore son Pop It comme un blason. Mais au-delà de la mode consumériste, que nous dit la soudaine popularité du Pop It ?
L'enfant est un consommateur comme les autres
Tout d'abord, que les enfants sont des consommateurs comme les autres, et ce de plus en plus tôt. D’après une étude* réalisée en mars 2021, 96% des enfants de 8 à 14 ans ont déjà effectué un achat avec leur propre argent. En moyenne, le premier achat est réalisé à 9 ans, bien souvent en ligne, avec un premier achat réalisé sur Internet autour de 10 ans et demi. Bien aguerris aux réseaux sociaux (80% des sondés en utilisent déjà au moins un), les enfants sont très tôt visés par les influenceurs. Selon l’étude, 56% des enfants se déclarent entraînés dans leur achat par les influenceurs et 55% par la pub en ligne. Par ailleurs, la frontière entre les deux est souvent très floue à leurs yeux. Démonstration : sur YouTube, la jeune Belge de la chaîne Carla fait son show démontre le plus sérieusement du monde que les Pop It ont de nombreuses vertus, non seulement ludiques mais aussi thérapeutiques.
Sur la chaîne de Swan & Néo, le duo de frères youtubeurs se livre à une chasse aux Pop It dans leur jardin, et sur celle de Julian & Alicia, un père et sa fille partagent leurs astuces pour faire entrer les Pop It dans les classes, en les camouflant dans ses classeurs. Sur TikTok, le réseau social préféré de la génération Z, on n’est évidemment pas en reste. Car si les Pop It existent depuis 2013, ce n'est que récemment qu'ils sont devenus viraux avec leur apparition sur la plateforme (#popitchallenge). On compte près de 36 millions de vues pour les contenus en rapport avec les « fidget toys pop it. » Dans certaines vidéos, les TikTokers n'hésitent pas à faire étalage de leur collection, à la façon des beauty gourous exhibant leur collection de rouges à lèvres. Alors, une histoire de consumérisme un peu sale les Pop It ? Évidemment, car nous parlons bien d'une avalanche de produits pas forcément recyclables, fabriqués à l'autre bout du monde dans des conditions sans doute peu glorieuses, et dont la très relative utilité disparaîtra certainement aussi vite qu'elle était venue. Mais avec peut-être un petit quelque chose d'autre derrière.
Quand les enfants (aussi) ont besoin de thérapie
« Ils me disent que c’est satisfaisant, un anti-stress », s’étonne Julien, rédacteur web, 37 ans, et père de deux garçons. « Mais le stress, ils ne savent pas ce que c'est, non ? » Pas si sûr, car les enfants aussi connaissent les séquelles psychologiques induites par la pandémie et les confinements successifs. Tova Klein, psychologue américaine spécialiste du développement des enfants, admet que si les plus jeunes sont plus résilients et adaptables aux crises que les adultes, ils ont toutefois besoin d’être accompagnés dans la sortie de pandémie. En France, les spécialistes vont aussi dans ce sens rappelle Le Monde, citant les conclusions d'une étude menée par le CHU de Toulouse à la sortie du premier confinement, selon laquelle 17 % des 8-15 ans auraient alors souffert de stress post-traumatique, les taux montant à 21 % chez les filles.
C’est clair, les Z sont stressés, entre insomnie, ennui, frustration et troubles de l’attention. Sur TikTok, le #anxiété apparait plus de 15 millions de fois. Pas franchement étonnant, alors que le réchauffement climatique produit coup sur coup incendies géants et pluies diluviennes, et que les nouvelles sur le variant Delta continuent d’irriguer les médias. Dans ce contexte, ce n’est pas vraiment une coïncidence si les Pop It sont devenus des accessoires ultra prisés par tous les afficionados d’asmr... Ou comment ces jouets rose bonbon ou bleu layette sont peut-être les nouveaux talismans d'une génération sous stress, tentée de conjurer tous les maux de la société à grand renfort de « pop ».
*Méthodologie : cette étude a été réalisée pour la FBF par Harris Interactive en ligne du 2 au 10 mars 2021 auprès d'un échantillon de 1 000 enfants âgés de 8 à 14 ans et représentatifs de cette population.
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