Des lèvres violettes couvertes de paillette

Ces mots à placer pour impressionner ses collègues

© Wei Ding

Même si utiliser négligemment les termes « meta cringe » ou « billionnaire bore core » peut en crisper plus d'un.

Vous ne savez pas exactement ce que recouvre la dating fatigue ou qui sont les Granola Nazis ? Cet article qui fait le point sur les derniers néologismes en vogue est pour vous.

Billionnaire bore core, ou l'esthétique des milliardaires ennuyeux

Pour signifier son appartenance aux hautes sphères financières de la société, un commandement à suivre : ne surtout pas afficher vulgairement son argent. C'est le conseil – accompagné de frissons de dégoût et ricanements moqueurs – dispensé par les personnages de la série Succession. Pour éviter une intervention de la police du style, et pour passer incognito auprès d'un populo de plus en plus remonté contre les riches, les milliardaires se doivent d'afficher un style vestimentaire sobre, élégant et intemporel. Et surtout dépourvu de logos, Dieu nous en préserve. Pour qualifier cette esthétique relativement fade et soporifique, les réseaux et les médias ont produit plusieurs expressions : billionaire bore core, mais aussi quiet luxury, pour luxe tranquille, un style infusé de la fameuse esthétique old money (vieil argent) qui obsède les moins de 25 ans. Au programme : discrets colliers de perles, pantalons à pinces beige et mocassins mixtes.

Granola nazis, ces influences d'extrême droite qui font de la confiture

Sur fond de lever de soleil, de champs en fleurs et de potagers bien entretenus, les Granola Nazis font l'apologie d'une vie pastorale et traditionnelle. Entre la confection de biscuits et le reprisage de vêtements en coton bio, elles célèbrent Yule, dessinent des runes sur les murs de leur chambre. Au passage, elles diffusent sur les réseaux une idéologie nauséabonde, entre suprémacisme blanc, néopaganisme et mythologie occulte.

Ozempic face, le visage post-surdose d'antidiabétiques

C'est la nouvelle pratique pas tout à fait assumée de nombreuses stars hollywoodienne et influenceurs : s'injecter de l'Ozempic, un antidiabétique, pour perdre du poids. L'usage a commencé avec des personnalités comme Kim Kardashian et Elon Musk avant de se diffuser sur les réseaux. Aujourd'hui, le #ozempic frôle le milliard de vues sur TikTok, ou des internautes expliquent dans le détail comment l'utiliser pour transformer sa silhouette. L'usage s'est tellement banalisé aux États-Unis qu'il a donné lieu à l'expression ozempic face (le visage Ozempic), pour qualifier les traits creusés et le relâchement de la peau causés par une rapide perte de poids.

Meta cringe, le cringe semi ironique de TikTok

Avec ses vidéos courtes et peu montées, TikTok a industrialisé la production de contenus cringe, des contenus provoquant une délicieuse sensation de malaise. (En anglais, le verbe cringe signifie avoir un mouvement de recul, se recroqueviller). Aussi addictifs qu’embarrassants, les contenus en question étaient auparavant cringe à leur insu. Aujourd'hui, ils sont tout spécifiquement conçus pour faire frissonner de gêne, et s'élèvent presque au rang de prestation mi-artistique, mi-parodique. D'après l’Urban Dictionary, le meta cringe est le contenu qui fait délibérément « grincer des dents. » Kate Lindsay de la newsletter Embedded souligne que les contenus meta cringe sont souvent accompagnés de commentaires tels que : « wow, une vidéo vraiment dure à regarder, MERCI ! » Le meta cringe, c'est la série The Office, mais sur TikTok, et jouée par des personnes nées après la sortie du film Trainspotting. Ce qui distingue le cringe du meta cringe, c'est donc l'intention. Dans Vox, la journaliste Rebecca Jennings rappelle qu'avant le meta cringe des Z, il y avait le millennial cringe, dont l'effet cringe n'était que l'effet secondaire involontaire d'une blague ratée vite devenue gênante (pensez moustaches dessinées sur un doigt et portées devant son visage). Mais ne jetons pas trop vite la pierre aux millennials. Comme l'explique Don Caldwell, rédacteur en chef de Know Your Meme, le millennial cringe existait « sur Internet avant que les gens n'aient à naviguer à travers un million de couches d'ironie pour comprendre un mème ». Entre ironie, subversion et absence de filtre, le meta cringe a bien grandi.

Dating fatigue, la flemme de swiper

Les applications de rencontre se multiplient, les commentaires acerbes à leur encontre aussi. Bienvenue dans l'ère de la dating fatigue (la fatigue de faire des rencontres), où la simple idée de prendre le métro pour aller s'asseoir en face d'un inconnu nous épuise. Si le terme forgé en 2021 par la journaliste Judith Duportail n'est guère nouveau, il prend aujourd'hui une nouvelle signification. Plutôt que faire défiler sans fin et sans appétit des profils aussi insipides que factices sur Tinder ou Bumble, de plus en plus d'internautes délaissent les écrans au profit de rencontres « dans la vraie vie. » Et cela prend, entre autres, la forme du speed dating, ce concept que l'on pensait réservé aux scènes d'intro des romcoms des années 90 mettant en scène des célibataires new-yorkaises dépitées et très pressées.

Filler fatigue, le dégoût des injections

En 2023, il n'y a pas que les applications de rencontre qui nous démoralisent. Après avoir passé plus d'une décennie à se surinjecter divers produits de remplissage et de comblement type botox et acide hyaluronique dans le visage, une certaine lassitude vis-à-vis de la quête de l'Instagram face (le visage Instagram, lèvres pleines et ourlées, yeux de biches, pommettes hautes) se fait sentir. Résultat : de plus en plus de médecins esthétiques sont sollicités pour dissoudre les produits injectés dans les lèvres et les pommettes de leurs patientes. Selon le dernier rapport de The Aesthetic Society, les opérations d'inversion de remplissage auraient augmenté de 57 % entre 2020 et 2021. Tout ce qui monte doit redescendre.

Laure Coromines

Laure Coromines

Je parle des choses que les gens font sur Internet et dans la vraie vie. Fan de mumblecore movies, de jolies montagnes et de lolcats.
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