Parler argent pendant ses rendez-vous amoureux ou boire de l'alcool par litres : il existe dorénavant des termes pour désigner ces phénomènes. Présentation.
Rage applying, fossil fashion, resenteeism : toujours plus de concepts, toujours plus de néologismes légèrement abscons. Bonne nouvelle, ils racontent tous la psycho sphère. Bienvenue dans un monde où il existe désormais des termes spécifiques pour parler du fait que les patrons surchargent discrétos leurs employés ou que nos vêtements sont devenus extrêmement gourmands en pétrole. Attention, deux de ces expressions évoquent la notion « rage », ce qui n'est pas forcément une coïncidence.
Borg
La consommation d'alcool dans les sociétés occidentales décroît fortement, mais tout le monde n'a pas eu la note de service. Sur les campus américains, certains pratiquent le borg, soit le blackout rage gallon, qui pourrait se traduire par « le gallon qui sert à te mettre un trou noir de malade ». Rien de compliqué à l’affaire : il s'agit de s’enfiler tranquille un bidon pouvant contenir un gallon (4,54 litres en Grande-Bretagne et 3,78 litres aux États-Unis) de vodka coupée à l'eau, à la caféine et aux électrolytes en poudre. Comment utiliser borg dans une phrase ? : « On se fait un borg ? » (nom commun) ou bien « Tu veux borg ce soir ? » (verbe).
Fossil fashion
Polyester, nylon, acrylique, élasthanne… Le récent rapport « Synthétiques anonymes 2.0 » conçu par les ONG Changing Markets Foundation et No Plastic in my Sea montre que l'industrie de la mode est excessivement dépendante des énergies fossiles. En effet, elle repose en grande partie sur les fibres synthétiques. La faute à la fast-fashion, qui surstimule notre consommation de vêtements bon marché. Évaluée à 62 millions de tonnes en 2015, la production mondiale de l'industrie de la mode atteindra 102 millions de tonnes en 2030 si l'on ne redresse pas le tir.
Resenteeism
Post Grande Démission, il y a de l'aigreur dans l'air. Maintenant que les salariés sont pris entre les feux des licenciements massifs et de l'inflation galopante, il n'est plus aussi facile de claquer sa démission après un énième coup tordu de la part de son management toxique. À la place, on ronge son frein, on fulmine, on lève les yeux au ciel, on boude, on peste entre collègues aigris. En bref, on nourrit un ressentiment (resentment en anglais) profond envers tout ce qui concerne notre emploi.
Rage applying
Lorsque l’abattement amer qui les habite se dissout, les salariés exaspérés passent en mode rage applying. Comprendre : sous le coup d'un énervement profond, ils candidatent à la chaine avec acharnement pour trouver un nouveau boulot. Et s’encouragent les uns les autres sur TikTok, tels des Achilles en furie. En décembre dernier, l'utilisatrice Red (@redweez) affirmait : « Continuer de rage-applying. Cette énergie vous conduira vers des horizons plus beaux que le boulot dans lequel vous êtes coincé ! »
Set jetting
Pourquoi partir en vacances dans sa maison de famille dans les Cévennes alors que l'on peut reproduire le séjour idyllique de nos personnages favoris ? Avec le set jetting (set signifiant en anglais plateau de tournage), on privilégie les destinations repérées à l'écran. D'après Expedia, deux tiers des voyageurs ont déjà envisagé de sélectionner un lieu de villégiature vu dans un film et/ou une série. En 2023, deux destinations seraient particulièrement concernées : la Sicile où a été tournée la deuxième saison de The White Lotus, et la Norvège où se déroulera la saison 4 de Succession.
Dinks
L’acronyme désigne les Dual INcome no kids, ces couples qui assument pleinement de ne pas avoir d'enfants. Non pas pour sauver la planète (ça, c'était les Ginks, pour green inclination, no kids), mais pour se payer des brunchs composés d’œufs brouillés et de mimosas pétillants (tarif pour deux : 87 euros) ou partir se prendre en photo devant des cascades turquoise ou des montagnes enneigées à l'autre bout du monde. Pas franchement neuve, l'expression décolle bien sûr maintenant via TikTok, ou le #dinks compte déjà plus de 41 millions de vues.
Cash candid
D'après la récente étude Bumble réalisée par YouGov, évoquer sa situation financière avec ses matchs n'est plus tabou. Certains aborderaient d'ailleurs frontalement la question (combien je gagne, qui va payer les caïpis, etc.) dès le premier rendez-vous. L'étude indique également qu'une personne sur trois âgée de 18 à 34 ans au Royaume-Uni est désormais susceptible de proposer une activité gratuite (balade au parc, partie de dominos sur un banc public). En somme, il ne s'agit pas de déballer ses fiches de paie à Jérémie rencontré sur Hinge, mais plutôt de se montrer transparent (candid) à propos de l'argent (cash).
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