Bouche avec paillettes multicolores

6 mots pour décrypter les élucubrations du moment

Comfortcore, nepo daddy, protopie... Ces termes fraîchement forgés ont bien un sens. Est-il significatif ? À vous de voir.

Si vous ne comprenez plus rien à ce qui se passe dans le monde, n'ayez crainte. Tout une tripotée de néologismes sont régulièrement inventés pour cartographier notre réalité de manière plus ou moins pertinente.

Funemployment

Le terme est né de la fusion de deux mots : fun (amusant) et unemployment (chômage). Le funemployment, c'est donc le fait de s'éclater au chômage et de tirer profit de son absence d’emploi. Bien sûr, cela n'est pas possible pour tout le monde, tout quitter pour partir faire du surf à Essaouira, un trek au Pérou ou du volontariat en Grèce est plus facile lorsqu'on bénéficie de confortables indemnités chômage. Le néologisme traduit surtout la transformation de notre rapport au travail, qui passe désormais après notre santé mentale et physique, le respect des droits du travail et le concert de Harry Styles ou Taylor Swift. Sur TikTok, le #funemployment frôle déjà les 19 millions de vues.

Nepo Daddy

On se rappelle bien sûr des nepo babies, ces enfants de star devenus à leur tour célèbres. Pour les identifier, rien de plus simple, il suffit comme le conseille le youtubeur américain imuRgency de se rendre sur la page Wikipedia d'un acteur à la mode pour vérifier si le nom de ses parents est cliquable et surligné en bleu. Si oui, vous avez affaire à un nepo baby. Mais aujourd'hui, on parle aussi de nepo daddy pour caractériser les parents qui capitalisent sur le succès de leur enfant pour faire carrière. On pense par exemple à Rob Grant, père de la chanteuse Lana Del Rey, qui sort à 69 ans son premier album. Cet homme est-il talentueux ? Sans doute. Aurait-il sorti un disque si sa fille n'était pas célèbre ? Probablement pas. Le népotisme a de beaux jours devant lui.

Monkey-barring

Deux pans de nos vies deviennent de plus en plus composites et bigarrés : le travail et les relations amoureuses. Alors pour décrire la multiplicité des usages, on invente minutieusement la terminologie la plus exhaustive possible, et aucune pratique n'y échappe. Récemment, l'experte en relations amoureuses Harley Quinn a forgé dans Metro UK un nouveau terme : le monkey-barring. C'est un peu difficile à traduire : il faut imaginer un singe (monkey), animal connu pour sa souplesse et son habilité, enchaîner les acrobaties d'arbre en arbre, ou plutôt de barre en barre (en anglais, le terme monkey bar désigne les barres de traction auxquelles on se suspend pour avancer par la force de ses bras) en retombant toujours sur ses pattes. Transposé au domaine amoureux, cela décrit le fait de mener de front plusieurs relations, sans s'investir réellement dans aucune, par peur d'affronter la solitude ou de faire un choix. Pénible dans tous les cas.

Protopie

« Sommes-nous condamnés à errer dans la binarité limitée du bien et du mal, du solarpunk et du cyberpunk, de la pilule bleue et la pilule rouge ? », interrogeait récemment Usbek & Rica. Comprendre : n'avons-nous donc aucune autre option que celle de naviguer inlassablement entre utopie et dystopie ? Et bien si. Pensée par l'auteur et fondateur du magazine Wired Kevin Kelly en 2010, la protopie imagine un futur désirable où les sociétés améliorent leurs conditions de vie et l'état de la planète grâce à des outils accessibles. Et se pose au passage en solution à la crise contemporaine de l'imaginaire.

Comfortcore

D'après une récente étude Ifop, le style comfortcore (pensez baskets, Crocs, coupes amples, tissus douillets et pulls XL) sera à l'honneur cet été. Le néologisme décrit le style qui place le confort (comfort en anglais) au centre de tout, car on n'a plus très envie de s'embêter à dégainer mocassins pailletés et robes cintrées. Avant de s'appliquer à la mode, le terme décrivait un type de décoration d'intérieur, comme le japandi ou le mid-century modern. Au lieu de privilégier les lignes épurées et désuètes, le style comfortcore plébiscite les ambiances cosy et chaleureuses, façon Beatrix Potter dans Pierre Lapin. (Imaginez un petit animal doux et mignon vêtu d'une redingote en train de boire une tasse de chocolat chaud dans un terrier confortablement meublé.)

Train bragging

Maintenant que nous sommes (plus ou moins) tous au clair sur le fait que prendre l'avion 3 fois par an n'est pas tenable, certains voyageurs se sont mis à privilégier les déplacements en train. Et il était temps, donc c'est super. Le problème, c'est que l'on se retrouve désormais immanquablement confronté au train bragging sur les réseaux, le fait de se vanter de prendre le train. Plus possible à l'approche des vacances de faire un saut sur LinkedIn sans tomber sur un (très long) post incluant de nombreux sauts à la ligne nous apprenant que Sébastien a rallié Copenhague par les rails et que Chloé part pour Venise en train de nuit. Cool, mais on a hâte que les voyages en train se normalisent enfin pour ne plus avoir à subir ça. (Et qu'au passage les émissions de CO₂ diminuent sensiblement.)

Laure Coromines

Laure Coromines

Je parle des choses que les gens font sur Internet et dans la vraie vie. Fan de mumblecore movies, de jolies montagnes et de lolcats.

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