Selon le dernier rapport Oxfam, les inégalités salariales entre PDG et salariés se sont largement aggravées en 10 ans.
Alors que le gouvernement réfléchit à des propositions pour « mieux partager les richesses en entreprises », Oxfam France publie une nouvelle analyse sur les inégalités salariales au sein des 100 plus grandes entreprises françaises cotées en Bourse. Constat : « aux grandes entreprises, les gros écarts. »
Partage des richesses : la part des salaires baisse en 10 ans
Le constat d'Oxfam est sans appel : les inégalités salariales au sein des 100 plus grandes entreprises françaises se sont creusées en plus de 10 ans. Ainsi, la part dédiée à la rémunération du travail dans la valeur ajoutée est passée de 61 % à 51 %, soit une baisse de 10 points. Cette tendance est également valable pour les entreprises du CAC 40, avec une part travail passée de 58 % à 48 % de leur valeur ajoutée. « Elle [la baisse du partage]se fait au détriment des bas salaires particulièrement impactés par l'inflation, que nous subissons depuis des mois. Un chèque de 10 000 euros supplémentaires : c’est ce que chaque salarié du CAC 40 aurait dû toucher en moyenne l’an dernier si on avait continué à redistribuer les richesses créées de la même façon qu’il y a 12 ans ! », déplore Léa Guérin, chargée de plaidoyer sur la question de la régulation des multinationales.
Des écarts de rémunérations abyssaux
À noter : les écarts de rémunération entre PDG et salariés se creusent massivement. Entre 2011 et 2021, les 100 plus grosses entreprises françaises ont augmenté la rémunération de leur PDG de 66 % contre 21 % pour les salariés. Sur cette même période, le Smic, lui, a augmenté de 14 %. Dans les entreprises du CAC 40, la rémunération des PDG a augmenté de 90 %, contre 23 % pour les salariés.
Les trois champions des écarts de rémunération
En tête, du podium, Teleperformance, leader mondial des centres d'appels, dont le PDG gagne 1484 fois plus que le salarié moyen de l’entreprise. Stellantis, constructeur automobile (Peugeot, Citroën, Fiat, Opel...) arrive ensuite avec un écart de 1139. Enfin, le troisième plus grand écart salarial est observé chez Dassault Systèmes (éditeur de logiciels) où la rémunération du dirigeant est 385 fois supérieure à celle d'un salarié moyen. Des rémunérations mirobolantes qui ne correspondent, comme on peut parfois l’entendre, pas à un hypothétique prix du marché : « Stellantis a communiqué pour expliquer en quoi la rémunération de Carlos Tavares était justifiée, alors qu’il gagnait en 2021 en 3h22 ce que ses salariés gagnent en un an. Même les actionnaires avaient voté contre sa rémunération excessive ! Certaines rémunérations indécentes ne se justifient plus et doivent être encadrées », dénonce Léa Guérin.
Une vision incompatible avec la réduction des inégalités
Selon Oxfam, 89 % de la rémunération de ces trois dirigeants est basée sur des critères financiers, et majoritairement court-termiste. Une vision incompatible avec la nécessaire transformation écologique et le besoin de justice sociale. Selon la chargée de plaidoyer d'Oxfam, c’est l’intérêt des actionnaires qui est ici privilégié plutôt que l’intérêt sur le long terme de l’entreprise et de l’ensemble de ses parties prenantes.
Une gouvernance des entreprises qui alimente les inégalités salariales
Le rapport Oxfam confirme aussi que les inégalités hommes femmes persistent. En 2021, dans le secteur privé, les femmes gagnaient 24 % de moins que les hommes, avec 16 % d’écart de salaire à temps de travail égal, et 4 % à poste comparable. Du côté des grandes entreprises du SBF120 (Société des Bourses Françaises), même constat : les femmes sont largement sous-représentées. Ainsi, moins de 11 % des dirigeants (PDG, président de conseil d'administration et directeur général) sont des femmes. Et quand elles accèdent à des fonctions de direction, elles sont rémunérées en moyenne 36 % de moins que les hommes (4,9 millions d’euros par an contre 3,1 millions d’euros pour les femmes). À titre d'exemple, avec ses plus de 66 millions de rémunération annuelle, Carlos Tavares à la tête de Stellantis gagne chaque année plus que toutes les femmes dirigeantes de grandes entreprises réunies.
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