Dolce & Gabbana qui se moque des Chinois, Danone qui gonfle ses prix… Les entreprises ont connu leur lot de crises en 2018 !
Pour la 5ème année consécutive, Nicolas Vanderbiest, directeur des opérations chez Saper Vedere, nous livre un panorama complet des crises qui ont marqué 2018.
Il faut dire que l’année avait commencé très fort, avec H&M qui, dès début janvier, s’était fait épingler. En cause : la promotion d’un sweat à capuche vert estampillé « Coolest monkey in the jungle » (le singe le plus cool de la jungle) porté par un enfant noir.
Whose idea was it at @hm to have this little sweet black boy wear a jumper that says ‘coolest monkey in the jungle’?
I mean. What. pic.twitter.com/6AJfMdQS4L
— Stephanie Yeboah (@NerdAboutTown) 7 janvier 2018
Au total, ce sont 2,3 millions de tweets qui ont été générés en 5 jours. Le sujet a été repris par de nombreuses célébrités, dont Puff Daddy, The Weeknd ou G-Eazy – ces derniers étant par ailleurs égéries de la marque, ils ont choisi de mettre un terme à leur collaboration.
L’habillement, le secteur le plus touché
H&M n’est pas la seule entreprise du secteur textile à avoir été touchée. À Rouen, les internautes n’ont pas hésité à exprimer leur mécontentement alors que Celio lacérait les vêtements invendus.
Dans le même style, Burberry a brûlé l'équivalent de 30 millions de vêtements invendus fin juillet.
Dans la catégorie « on n’arrête pas le progrès », Balenciaga vendait une chemise épinglée à un t-shirt pour la modique somme de 1091 euros.
Il faut dire que la marque n'en est pas à son coup d'essai : elle avait vendu un sac hors de prix qui rappelait drôlement les fameux cabas d'IKEA...
Nordstrom n'est pas en reste, avec ses baskets sales et trouées vendues 450 euros.
For the low low price of $500, you too can look like you don't have any money! https://t.co/dqCAUIBZ2e
— Ken Webster Jr (@KenWebsterJrSho) 20 septembre 2018
Dans un autre registre, Dale of Norway a utilisé des signes utilisés par les nazis et néonazis pour des vêtements destinés aux athlètes norvégiens pour les J.O. d’hiver, et la marque Yandi vendait un costume « sexy » inspiré de La Servante écarlate.
“Sexy Handmaid’s Tale Costume”
I can’t decide if this is “did any of you ever WATCH the show” idiocy or pitch perfect satire. pic.twitter.com/2SYpCkp5NW
— Daddy Warpig (@Daddy_Warpig) 20 septembre 2018
Dans la catégorie racisme, Dolce & Gabbana a choisi de promouvoir son lancement en Chine en se moquant des Chinois.
L’opération s’est soldée par 120 millions de messages et une opération de boycott.
Nombre de bad buzz en baisse
Pour la troisième année consécutive, le nombre de bad buzz par an sur le web est en baisse, selon Nicolas Vanderbiest. Pour le directeur des opérations de Saper Vedere, c’est le signe que le phénomène se « normalise » . Il explique aussi que le sujet est de moins en moins traité par la presse traditionnelle.
Il identifie deux périodes phares dans l’histoire des bad buzz. « En 2010, les ONG ont utilisé les médias sociaux pour la première fois dans de grosses campagnes, analyse-t-il. C’est le moment où Greenpeace a mené sa campagne contre Nestlé. Ça a été un véritable séisme dans le monde de la communication ! » Il précise qu’à cette époque, le cas a servi d’argumentaire de ventes pour les agences : la communication sur les réseaux sociaux devenait – enfin – une affaire de professionnels. « Cela a donné lieu à un essor du nombre de cas, avec un pic en 2014 car de nombreuses marques ont investi le terrain. Par ailleurs, les médias étaient alors à la recherche d’un modèle économique. Assez naturellement, ils ont pensé que ce qui occupe les réseaux sociaux est ce qui occupe le public. Ça a été le point de départ de nombreuses rubriques "vu du web", qui traitaient l’actualité des réseaux sociaux comme celle de la télévision ou de la radio. Depuis, les médias pratiquent davantage la qualité et le modèle du pay-wall, ce qui fait que les cas recensés sont plutôt authentifiés par des médias comme 20 Minutes, France3 régions ou BFMBusiness. »
Pas de saisonnalité des crises mais des moments « touchy »
Nicolas Vanderbiest n’identifie pas de saisonnalité dans les crises – et il en a désormais 649 en stock ! – dans la mesure où il n’y a pas de mois qui se distingue particulièrement, ce qui exclue la corrélation entre investissements publicitaires et bad buzz par exemple. « Cependant, on peut remarquer des moments-clés qui sont assez importants et générateurs de crises. » Avis aux romantiques, la Saint-Valentin est souvent sujette à des ratés en termes de communication…
Mais ce n’est pas la seule journée où il est compliqué de communiquer : le 8 mars (journée des droits des femmes), le 1er avril (bonjour les poissons d’avril ratés…) ou les grosses manifestations sportives (comme la coupe du monde) donnent souvent lieu à des dérapages.
Des crises souvent déclenchées en réponse à un contexte social
Racisme, prix abusifs et gâchis : les crises 2018 témoignent du lien qui existe entre bad buzz et mépris des consommateurs. « Pour qu’il y ait une crise numérique, il faut un phénomène de viralisation, explique Nicolas Vanderbiest. Pour que celui-ci opère, il faut une convergence des luttes. C’est la raison pour laquelle une crise numérique émerge rarement suite à une plainte isolée et personnelle d’un consommateur. Ensuite, le critère sociétal de la crise va engendrer une complexité au sein de l’organisation. En effet, il peut arriver que l’entreprise ne soit qu’un "trigger", un prétexte pour évoquer un phénomène plus large. L’entreprise est alors à l’origine d’une conversation, mais lorsque celle-ci dérive, il arrive qu’elle ne la concerne plus du tout. » Il rappelle le cas d’Orange, qui s’était retrouvé au cœur d’un débat sur le sexisme et le harcèlement après qu’un technicien a ouvertement dragué une cliente et que celle-ci a relayé l’affaire sur Twitter.
Par ailleurs, il est important pour les marques d’évoluer en même temps que la société. « Et c’est le plus dur pour une organisation. » Il rappelle qu’il faut réussir à évaluer la montée en puissance de certaines minorités – « Parfois, le mécontentement peut être le fait d’une minorité. Mais cette minorité peut très bien être la prochaine majorité. » Il évoque le cas de Barilla : un des membres de l’entreprise avait affirmé à la radio que jamais la marque ne présenterait de personne homosexuelle dans ses publicités, à cause de ses "valeurs familiales". « Les valeurs familiales sont en mutation dans la société et ne représentent plus une majorité. »
Les 5 plus grosses crises numériques de l’année
5. Dolce & Gabbana
La marque a suscité une polémique sans précédent en chine suite à la publication de ses capsules vidéo qui se moquaient des Chinois. Des échanges privés du fondateur Stefano Gabbana qui parlait en mal de la Chine et des Chinois n’ont rien arrangé dans l’affaire…
4. Le EU Disinfolab
L’ONG EU Disinfolab a mené une étude sur la désinformation autour de l’affaire Benalla. Les résultats étant mis en cause, les fichiers bruts de l’étude ont été publiés. L’ONG a par la suite été accusée de réaliser du fichage politique.
3. H&M
Le sweat « coolest monkey in the jungle » a occasionné des volumes de tweets considérables, mais aussi la prise de parole publique de certaines personnalités, la rupture du contrat de quelques égéries, et le vandalisme de magasins en Afrique du Sud.
2. Danone
L’entreprise a subi une véritable crise de boycott au Maroc suite à des commentaires anonymes accusant Danone de profiter d’une situation de monopole dans le pays, pour pratiquer des prix exacerbés. La marque a été forcée de réduire ses marges. Conséquence : son chiffre d’affaires a baissé de 40%.
1. Facebook
Le scandale Cambridge Analytica a entraîné une réelle campagne de boycott, et les hashtags #DeleteFacebook ou #SupprimezFacebook ont été nourris par de nombreuses autres polémiques et les convocations de Mark Zuckerberg à des audiences publiques.
Pour en savoir plus, retrouvez l’étude complète ici
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