Femme dans un champ

Au Sénégal, les notes vocales de WhatsApp révolutionnent l'agriculture

© ONUFEMMES/Alioune NDIAYE

Pour les agriculteurs sénégalais, l'envoi de notes vocales sur l’application WhatsApp ouvre de nouvelles perspectives.

Au Sénégal, où le taux d’analphabètes est estimé à plus de 50 % selon la CNEPT, les notes vocales de WhatsApp sont devenues un outil essentiel, permettant aux agriculteurs et chercheurs de partager des informations et de collaborer.

Cultiver différemment grâce aux notes vocales

Pour répondre aux défis qu’impose le changement climatique, les cultivateurs sont invités à rejoindre des groupes sur l'application. Ils peuvent y échanger des bonnes pratiques, des conseils ou encore des appels à l'aide. Chercheurs et ONG y diffusent quant à eux des informations techniques sur diverses pratiques agricoles, des bulletins météo et des informations sur les formations.

Ousmane Sambou, agriculteur au sud du Sénégal, témoigne de son expérience dans le média Rest of World. Après s’être appuyé sur ce que lui avaient transmis son père et les anciens du village, il rejoint en 2015 un groupe WhatsApp local. Grâce aux notes vocales de l’application, il a pu prendre connaissance des dernières pratiques agricoles et bénéficier de conseils pour s’adapter aux défis environnementaux. Sambou a depuis rejoint six autres groupes WhatsApp liés à l'agriculture. Il passe entre 30 minutes et trois heures par jour à échanger des notes vocales avec les autres membres. « Nous partageons nos expériences et nos défis et apprenons des pratiques telles que les engrais organiques où comment lutter contre les parasites sans produits chimiques ». 

Un moyen rapide et innovant d'accéder à l'information

Selon le chercheur Raphaël Belmin, les notes vocales permettent de combler les lacunes en matière de formation et d'éducation dans un pays qui compte actuellement environ un conseiller agricole pour 10 000 agriculteurs. Un moyen de communication particulièrement efficace lorsque la guerre russo-ukrainienne a éclaté. Suite au conflit, les prix de certains engrais au Sénégal ont quintuplé. Face à la possibilité de produire moins de nourriture pour une nation déjà en situation d'insécurité alimentaire, la communauté agricole a commencé à chercher des alternatives, et les notes vocales ont permis aux agriculteurs de discuter d'options moins chères pour les engrais. L'agence sénégalaise de conseil agricole et rural (Ancar) a également diffusé des messages vocaux détaillés détaillant la technique d'un puissant engrais artisanal, technique popularisée par le chercheur latino-américain Jairo Restrepo Rivera. Le message, partagé sur au moins 40 groupes WhatsApp, aurait atteint plus de 10 000 agriculteurs, selon El Hadji Abdoulaye Biteye, responsable à l'Ancar.

L'agriculture à l'heure du numérique

Au-delà de la facilité d’accès à l’information, l'agriculteur Aristide Diatta indique avoir téléchargé WhatsApp pour une question de coût (l'envoi de notes vocales est moins cher qu’un appel téléphonique) et pour pallier les problèmes de signaux non fiables dans les zones rurales du Sénégal. « Vous pouvez indiquer ce dont vous avez besoin, et ils recevront le message lorsqu'ils seront de nouveau en ligne. Je n'ai pas besoin d'attendre que nous ayons tous un signal », a déclaré Aristide Diatta. Moustapha Dienne, un petit exploitant sénégalais, explique quant à lui que WhatsApp l'a aidé à passer à une agriculture plus entreprenante. « Je l'utilise pour commercialiser ma production et trouver des clients. Avant, je devais parcourir le village à la recherche d'acheteurs. Maintenant, je mets mes produits dans mon statut WhatsApp, et les gens me contactent directement. »

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Peggy Baron

Chaque jour je m'installe à la terrasse de l'actu et je regarde le monde en effervescence. J'écris aussi bien sur les cafards cyborg que sur le monde du travail, sans oublier l'environnement et les tendances conso.
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