Une « boisson énergisante » à base d'urine devient un best-seller sur Amazon

Pour dénoncer les conditions de travail dans les usines d'Amazon, un journaliste britannique a vendu sur la marketplace des bouteilles de pipi.

Oobah Butler a l'habitude de recourir à des farces pour mettre en évidence les manquements du commerce en ligne. Le journaliste-cinéaste s'était fait remarquer en 2017 en réussissant à hisser un faux resto dans le top des meilleures adresses TripAdvisor. Pour son émission spéciale sur Channel 4, « The Great Amazon Heist » il s'est attaqué cette fois à Amazon. Infiltré pour dénoncer les conditions de travail du géant du e-commerce, le cinéaste a réussi à commercialiser les bouteilles d'urine des chauffeurs livreurs sur la plateforme.

Vendre des bouteilles de pipi sur Amazon, c'est possible

Infiltré chez Amazon pendant plusieurs jours, Oobah Butler a rencontré de nombreux ouvriers en souffrance (heures passées debout, système de surveillance déshumanisant...) et découvert une réalité pour le moins surprenante. Soumis à un rythme intense qui ne laisse pas le temps de prendre des pauses, certains chauffeurs livreurs urinent dans leur camion dans des bouteilles. Des bouteilles jetées le plus souvent par la fenêtre (pas de temps à perdre) pour éviter les sanctions. En effet, selon les chauffeurs, les bouteilles d'urine trouvées dans les camions de distribution entraîneraient des mesures disciplinaires pouvant conduire au licenciement.

Pour dénoncer ces conditions de travail Oobah Butler a décidé de vendre l'urine des chauffeurs en ligne. Collecter sur le bord de la route puis reconditionnées, les bouteilles ont ensuite été commercialisées sur la plateforme. En toute transparence, la liste des ingrédients mentionnait les composants de l'urine - eau (95 %), urée (2 %), créatinine (0,1 %), acide urique (0,03 %), chlorure, sodium, potassium, sulfate, ammonium, phosphate. Baptisé « Release Energy Drink » le produit est devenu un best-seller en à peine 24 heures. Pour classer sa boisson dans le top des ventes, Butler a joué avec l'algorithme d'Amazon en encourageant ses proches à acheter le produit. « Vendre les boissons a été étonnamment facile », indique Butler à Wired. « Je pensais que les licences pour les aliments et les boissons m'empêcheraient de les répertorier, alors j'ai commencé dans la catégorie de « distributeurs à pompe rechargeables ». Ensuite, l’algorithme l’a intégré aux boissons ».

La sécurité, « priorité absolue » pour Amazon ?

Contacté par The Telegraph pour s'expliquer sur les contrôles mis en place avant la mise en vente du produit, un porte-parole d'Amazon a déclaré : « La sécurité est une priorité absolue pour Amazon et nous exigeons que tous les produits proposés sur notre marketplace soient conformes aux lois et réglementations applicables. Nous disposons d'outils de pointe pour empêcher que des produits véritablement dangereux ne soient répertoriés et nous surveillons nos magasins pour détecter de véritables problèmes de sécurité des produits. Tous les vendeurs qui contournent ces politiques sont passibles de poursuites. » Pour Butler, le problème est plus profond : « Amazon est la plus grande marketplace au monde. C'est rapide, pratique et sans friction : achetez une lampe fusée maintenant et elle arrivera à votre porte comme par magie dans la journée. Mais c'est aussi le Far West : une plateforme dangereusement puissante qui ignore son propre fonctionnement interne. »

Knife party! Knife party !

Pour son émission, Butler a également cherché à savoir s’il était possible pour de jeunes enfants d'acheter sur la plateforme des objets inappropriés. Pour tester le cinéaste a recruté ses deux jeunes nièces. Mission : acheter couteaux et scies de jardinage en passant leur commande à Alexa, l'assistant vocale d'Amazon. Les commandes ont été livrées quelques heures plus tard. « L'histoire avec mes nièces est évidemment le moment le plus difficile et le plus sensible du documentaire, car cela a d'énormes implications pour les gens. » a indiqué Butler.