Portrait de Christian Clot, explorateur et fondateur de Human Adaptation
L’ADN Le Shift est né d’une volonté de vous inviter à vivre ce que nous vivons en tant que média : vous connecter à ces pôles d’énergie de l’époque, initier les rencontres, faire naître d’authentiques conversations, et créer des relations durables. Aujourd’hui, en pleine crise sanitaire mondiale, nous avons besoin plus que jamais de créer du lien, de nous rencontrer et de vous présenter celles et ceux qui pensent et font le monde de demain. Un portrait, une rencontre.
Comment est né le projet Adaptation ?
Christian Clot : Au départ, je souhaitais que les gens qui partaient en expéditions puissent mener un certain nombre de recherches sur le terrain, mais c'est difficile à faire quand on a marché toute une journée. J'ai ensuite créé un institut pour rassembler tous les savoirs sur la question. Mais ce n'était pas suffisant. Je me suis vite rendu compte qu'il fallait monter des expéditions dédiées, avec des projets où l'idée centrale était de faire des études sur l'humain. C'est comme ça que sont nées les grandes missions Adaptation 4x30. Ainsi, en 2016, j'ai traversé les 4 milieux les plus hostiles de la planète, afin de mesurer la désorientation et l'anomie provoqués par ces conditions extrêmes. Il est intéressant de savoir comment l'humain va composer avec le dérèglement climatique. Mais le plus important est de comprendre comment il va s'adapter au changement lorsqu'il sera soumis à des contraintes fortes. Cette année, la crise du Covid a démontré que ce type d'étude était indispensable car les réponses que nous apportons ne fonctionnent pas.
Les recherches que vous menez sont particulièrement pertinentes dans la perspective du réchauffement climatique... Il y a presque un côté pédagogique avec un exemple par le concret ?
C.C. : Nous essayons de comprendre les mécanismes cognitifs de l'adaptation. C'est vraiment important de les connaître, et ce n'est pas le cas actuellement. Avec cette compréhension, il deviendrait possible d'entrainer les zones du cerveau pour qu'elles puissent mieux gérer le changement et même l'anticiper. C'est vraiment le but de ces missions. Et c'est pour cela que je travaille avec un grand nombre de profils différents. Certains projets moins connus sont malgré tout importants, comme ceux avec les migrants. Je les accompagne dans leurs trajets, depuis leur départ de chez eux jusqu'au moment où ils arrivent dans leur territoire d'accueil. J'observe la transformation qui s'opère chez ces gens. Nous travaillons aussi sur des populations féminines qui modifient leur système de vie pour pouvoir trouver un espace de liberté. Ces études viennent compléter l'ensemble des travaux qui permettent de mieux comprendre ce que signifie s'adapter. Mais il y a encore un long chemin à parcourir.
Aujourd'hui, il semble urgent de réveiller les capacités de résilience et d'adaptation qui sont en nous pour affronter les crises qui arrivent... Au final, c'est l'histoire de l'être humain depuis toujours dans le sens où celui-ci est soumis aux lois de l'évolution ?
C.C. : En effet, mais je pense qu'il faut aller encore plus loin. Dans le passé, l'espérance de vie était nettement moins importante, autour de quarante ans... De fait, notre cerveau a été conçu pour se développer rapidement et être efficace dès les premières années de l'existence, pour ensuite se stabiliser. Du coup, nous connaissons mal le phénomène qui va lui permettre de poursuivre son développement. Ce que nous savons, c'est que des modifications physiques sont observables dans les zones cérébrales soumises au changement, mais nous ne sommes pas encore capables de bien comprendre ces mécanismes. Pour aller plus loin, nous développons des travaux sur des groupes. L'adaptation humaine se fera en collaboration. Il y a un schéma individuel de construction du cerveau mais celui-ci est également paramétré par le collectif.
Vos recherches donnent lieu à quels types d'applications concrètes ?
C.C. : Depuis quelques années, il y a un premier axe avec la formation en entreprises. Nous partageons nos résultats scientifiques et notre expérience des situations difficiles. Nous avons développé des formations, des conférences, des immersions, mais également des aides stratégiques. Actuellement, tout le monde parle de la résilience, c'est à dire de la capacité à stabiliser un système pour le faire revenir à son état initial. En faisant cela, nous oublions qu'il y a un futur. Or, celui-ci va nous challenger tellement fortement que la résilience ne sera pas suffisante. Il va falloir transformer profondément notre système de pensée. Il faut une véritable stratégie d'adaptation et pas seulement une stratégie de réinitialisation. Il faut construire le futur autour d'un nouveau paradigme cognitif. Nous travaillons aussi pour faire évoluer les principes éducatifs de l’école obligatoire.
Vos projets pour 2021 ?
C.C. : Je viens tout juste de publier Covid, et après ? , un ouvrage qui a pour but de dresser un bilan de la crise sanitaire et d'analyser ce qu’elle a provoqué dans la population. Je prépare actuellement un grand projet scientifique qui aura lieu en France au printemps. L'idée est de comprendre la désorientation face aux crises et les difficultés énormes que nous avons rencontré.
Christian Clot est membre de L’ADN Le Shift.
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