
Pour ceux qui vivraient en immersion au fond d’un bunker, ou qui tout simplement en doutaient encore : oui, la plupart des applications que nous utilisons tous les jours partagent nos données aux plus offrants.
Et les app de dating et de fertilité, auxquelles nous partageons parfois des données très privées, sont loin de faire figure d'exemple. On connaît la chanson, si le service est gratuit, c’est que nous sommes le produit. Publié cette semaine par le Conseil du Consommateur Norvégien, un rapport intitulé « Out of Control » (re)précise la mesure affolante dans laquelle nos applications préférées partagent nos données.
Tous aux abris, le capitalisme de surveillance est de sortie
L'entité norvégienne a commissionné un spécialiste de l’analyse des flux qui s’est penché sur le cas de dix applications populaires sur la plateforme Android de Google. Grindr, Happn, OKCupid, Tinder, Clue, MyDays (pour suivre sa période d’ovulation), Perfect365 (qui propose un filtre maquillage pour ses photos), Qibla Finder (pour rencontrer l’amour entre Musulmans), My Talking Tom 2, et Wave Keyboard ont ainsi été passées au crible. Les applications testées se sont avérées transmettre des données à des « tiers inattendus… » , au nombre de 135, parmi lesquels Facebook et Twitter.
Et ce sans que les utilisateurs n’en soient informés, au nez et à la barbe de la RGPD et de la privacy. Parmi les découvertes alarmantes : Perfect365 qui partage la géolocalisation de ses utilisateurs, Clue et MyDays qui communiquent leurs données à Facebook, et Tinder, Grindr et Happn qui distribuent à tout va les préférences sexuelles des internautes. Les app qui se font le plus de beurre sur notre dos sont donc précisément celles à qui nous livrons les informations les plus intimes… Ce qui est bien, c’est que selon le rapport, il n’existe pas vraiment de solution pour se prémunir contre la pratique. Hormis celle de faire l’impasse sur son smartphone.
Des milliards de violations par seconde
Les multiples violations des droits fondamentaux des utilisateurs réalisées au nom du profilage et du ciblage publicitaires s’opèrent à un rythme effréné : plusieurs milliards de fois par seconde. Dans son rapport, le Conseil estime que cette situation « complètement hors de contrôle » porte gravement préjudice aux consommateurs. Et au passage, aux institutions démocratiques. L’ombre du scandale Facebook-Cambridge Analytica n’est jamais bien loin. Il est donc temps d’avoir un sérieux débat : renoncer à nos droits les plus élémentaires juste pour se voir devenir le réceptacle de publicité légèrement plus en rapport avec nos centres d’intérêts, est-ce vraiment équitable ? En d’autres termes : mettre en péril la démocratie en échange de cette publicité si bien conçue pour le parfait robot ménager qui nous fait tant envie vaut-il vraiment le coup ?
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