Entre attente interminable, stress dilué sur tout l'été et réponses aléatoires, le système d’affectation dans l’enseignement supérieur fait s’arracher les cheveux aux lycéens.
À bout de forces, certains d’entre eux préfèrent se tourner vers l’étranger, histoire de voir si l’herbe n’y est pas plus verte. Il y a encore quelques années, le bac, c'était l'étape à ne pas rater pour commencer sa vie d'adulte. Sauf que désormais, une fois cette formalité passée, le parcours du combattant commence vraiment. En cause : l'automatisation de la distribution des affectations qui, régulée par un algorithme sur Parcoursup, s'étend parfois sur plusieurs mois. Un processus long et éprouvant qui a incité Elie, Louis* et d'autres à se tourner vers des études à l'étranger.
Vous reprendrez bien un peu de stress ?
Depuis 2018, les lycéens sont affectés dans les différentes filières par le biais de la plateforme Parcoursup, qui remplace APB. Là, les bacheliers énoncent leurs vœux, remplissent leur dossier, croisent les doigts et attendent à l'aveugle. Derrière la plateforme, un algorithme articulé autour du problème mathématique des « mariages stables » , et malheureusement amputé de l'une de ses composantes clé : la préférence. Résultat : alors que le système entame sa quatrième année et laisse de nombreux étudiants, pourtant motivés, sur le carreau, les lycéens rient jaune sur TikTok face aux réponses négatives qui affluent. Sur la plateforme préférée des Z, le #parcourssup compte près de 131 millions de vues. « C’est très perturbant », confie Elvire d’une petite voix. « J’ai postulé à 17 formations différentes pour assurer mes arrières », explique la jeune fille abonnée aux bonnes notes, qui attend fiévreusement de savoir si elle pourra intégrer la prépa scientifique dont elle rêve. « C’est beaucoup de stress, on se retrouve à refuser des propositions dans l’attente du reste, à tâtons, sans savoir à quoi ressemblera le reste des résultats… »
De son côté, Colombe, 18 ans, se réjouit de rejoindre une prépa cotée à la rentrée. Cela ne l’empêche pas d’observer avec commisération ses camarades se lever tous les matins à 7 heures pétantes pour rafraîchir frénétiquement la page résultat de Parcoursup. « C’est vraiment ultra-anxiogène, surtout qu’on ne comprend pas bien pourquoi on est pris ou non… » Elvire, qui a un an d'avance, a bien assimilé que son été serait jalonné de coups de pression, d'angoisses, et de quelques déceptions. Après la pandémie, le bac, quelques concours et maintenant l’épreuve Parcousup, la jeune Parisienne avoue se sentir « assez stressée. » Alors non, le Hot Vax Summer, ce n'est pas pour tout de suite. Aller à l’étranger pour court-circuiter la procédure pesante ? Oui, Elvire aurait bien voulu, mais la pandémie l'a rendu frileuse. À la place, elle remplira des dossiers et filera dare-dare en août s’occuper de son logement pour la rentrée de septembre dès que le précieux sésame lui aura été attribué.
C'est quoi le problème avec Parcoursup ?
« Le problème de la plateforme, c’est la dimension inflationniste des candidatures et des vœux. De manière obstinée et à rebours du bon sens le plus élémentaire, le ministère s’entête à maintenir le retrait aux élèves de la possibilité de hiérarchiser leurs propres demandes. Dans ce contexte de loterie absurde, ils sont alors conduits à démultiplier leurs vœux pour maximiser leur chance d'obtenir quelque chose. De plus en plus de bacheliers inscrivent jusqu’à 40 ou 50 options – bien souvent qui ne les intéressent pas – non pas pour le simple plaisir d’engorger le système, mais pour faire face à ses effets aléatoires ! », affirme Olivier Ertzscheid, enseignant-chercheur en sciences de l'information et de la communication à Nantes et auteur du blog Affordance.info. Pour le ministère, retirer la hiérarchisation était censé rendre le système plus fluide, moins contraignant pour les étudiants. « Or, sur le plan social, comptable et technique, c’est sidérant ! Cela ne produit aucun effet positif, cela surcharge les filières et achève d’ôter toute logique à cette période un peu compliquée pour les élèves », résume le chercheur.
Résultat : des files d’attente partout, car n'importe quelle formation à la fac est dorénavant devenue sélective. Les numerus clausus ne sont plus réservés aux classes prépa ou aux facs de médecine : toutes les filières passent sous haute tension. Pour savoir de quoi sera fait le futur, il faut attendre que les premiers reçus aient fait leur choix. Quand certains élèves se retrouvent avec de multiples propositions, d'autres attendent en se rongeant les sangs. Pour écourter l'attente qui les torture, de nombreux étudiants se ruent sur la première possibilité qui leur est offerte. Et de plus en plus, cette première réponse vient d'ailleurs.
Partir à l’étranger : « ça devient un classique ! »
« Le temps d’avoir sa première réponse en France, on a déjà fait le tour déjà des établissements internationaux », déplore Guillaume Ouattara, journaliste spécialisée dans l’éducation. En cause : des calendriers français décorrélés de ceux des autres écoles, où l'on peut être fixé sur son sort dès avril, contre parfois fin juillet en France. Selon le gouvernement, l’objectif de Parcoursup était de proposer des réponses « au fil de l’eau ». Pour le journaliste, elles arrivent plutôt « au compte-gouttes ». Une observation partagée par Alan Gordon, responsable de la section anglophone du lycée international de Clermont-Ferrand, chez qui subsiste encore un léger accent américain. « Mes élèves qui partent étudier à McGill University à Montréal peuvent dès le mois d'avril se tourner vers l'avenir et préparer tranquillement leur fin d'année. Les autres font face à beaucoup d'anxiété ! »
Alors entre aller assister à « des cours bondés en amphi » ou partir pour l’Angleterre ou l'Espagne rejoindre des écoles « équipées d’ordinateurs flambant neufs » et reconnues au niveau européen, le choix est vite fait. Pour Guillaume Ouattara, partir à l’étranger est dorénavant devenu un coup classique. « Le système scolaire français, c’est un système de classe, un système VIP où certains bénéficieront d’une offre pléthorique et d‘autres de rien du tout. » C’est le cas de Matthias*, 18 ans, qui ne nourrit qu'une seule ambition depuis ses 15 ans : devenir audioprothésiste. Après une année en prépa spécialisée et une dizaine de vœux déposés sur la plateforme, il s’est déjà vu refuser huit de ses requêtes. Dans l’attente du verdict, il lorgne déjà du côté de la Pologne et de l’Espagne, espérant ne pas avoir loupé le coche.
Plan B : vol 714 pour Montréal
Et Matthias est loin d'être le seul. Louis, fan de jeux de plateau et de littérature, a décidé qu'il n'attendrait plus. « En fait j'en ai marre, je suis cassé. Ça fait déjà plusieurs semaines que les réponses négatives tombent, et plus le temps passe, plus les portes se referment. Sur les conseils de mon grand frère, j'avais déposé une candidature pour une petite école de commerce à Montréal il y a quelques mois, je peux encore dire oui et je vais le faire. Merde à la fin ! » Bonne ambiance.
Dans trois semaines, Elie fêtera ses 23 ans. Mais plusieurs années après son bac, il repense encore à la période que traverse Louis avec un petit frisson. À l’époque, il se rêvait ingénieur : épaulé par ses professeurs, il concocte une liste de 12 vœux de prépas scientifiques qui correspondent à son carnet de notes. Pour s'assurer un plan B, il prévoit aussi à tout hasard une licence de philo à Nanterre, et comme il rêve de voyage, s’inscrit aussi en école de commerce à Madrid et Milan. Juste avant le bac, le verdict tombe : en France, il n’aura rien. À l’étranger en revanche, c’est carton plein. « Si je n’avais pas eu ça, je ne sais pas ce que j’aurais fait… À l’époque, j’avais ressenti un profond sentiment d’injustice, car j’étais bon élève. Mes professeurs m’avaient confié ne pas comprendre ces refus. Mon beau-père avait même écrit une lettre au président de la République ! », s’amuse le jeune homme. « Pas fan du système français », Elie est finalement ravi de ses études à Milan. « Mais tout le monde n’a pas la chance de pouvoir partir à l’étranger… Qu’ont fait ceux qui n’avaient pas les moyens financiers de partir et qui n’ont rien eu ? »
Le malheur de Parcoursup fait le bonheur des autres
De cette mauvaise organisation, certaines écoles à l’étranger ont fait leur business. « Elles ont chopé les adresses des étudiants et pile au moment où ils savent qu’ils sont coincés en liste d’attente, ils inondent les boîtes mail et les murs Facebook de publicités », rapporte Olivier Ertzscheid avec une certaine amertume. Certaines écoles ont même entièrement construit leur argumentaire là-dessus, et visent directement la plateforme d’affectation dans leur communication : « Arrêtez d’attendre chez Parcoursup, venez plutôt chez nous ! » Attirer des élèves Français, c'est d'ailleurs la stratégie des établissements québécois. « Ils entendent ainsi préserver la francophonie de la région. Du coup, ils mettent en place toutes les bonnes conditions pour attirer les bacheliers », souligne Alan Gordon. Mais ces écoles ont encore d'autres avantages sur les établissements français. En valorisant la motivation des candidats au détriment des bulletins de notes, elles sont selon Guillaume plus propice que le système scolaire français à assurer l’épanouissement des étudiants. « Et cela compte pourtant énormément lorsqu’il s’agit de poursuivre des études dans l’optique d’un métier ! »
*Le prénom a été changé
Bonjour, utilisatrice très critique de Parcoursup Gestion ( côté recruteur) je suis très étonnée par certains points de votre article, qui ne donne aucun contre point, aucun témoignage de recruteur . Curieux.Très étonnée notamment par le cas de ces fameux excellents élèves qui ne trouvent rien....Je n’ai jamais vu ça. En revanche on peut avoir 17 de moyenne et n’être pris dans aucune prépa scientifique prestigieuse ( qui recrutent à 18,5 parfois), si on a demandé que celles-ci. Vous ne précisez pas un point crucial : la distinction entre candidats d’une école publique ou privée. Nous constatons depuis toujours une surnotation indécente des élèves du privé, qui bien souvent peuvent perdre jusqu’à 10 points de moyenne quand ils arrivent dans le supérieur car on les a élevé dans le mensonge de compétences soi disant acquises, leur faisant miroiter l’accès à des filières hyper sélectives.Ils se sentent injustement sanctionnés et ils ont raison. Alors tous les 17 de moyenne ne se valent absolument pas. Car oui, qu’on le veuille ou non, les notes reflètent tout de même un niveau réel, ou sont censées le faire. Quant aux pauvres élèves qui ne trouvent absolument rien, c’est aussi bien souvent parce qu’ils n’ont rien foutu ! Des lors peut-on s’en étonner? Qu’y a t il de nouveau ? Votre article ne se base que sur du déclaratif d’élève, c’est peu rigoureux. Combien d’entre eux font de très mauvais choix sur Parcoursup car ils - ou leurs parents - veulent l’excellence alors même qu’ils sont médiocres et ont des prétentions irréalistes et parfois arrogantes.Alors oui, dans ce cas de prétendue injustice, on file à l’étranger, car on a les moyens ! Votre article, mal informé , laisse penser que seul l’algorithme décide, alors que son paramétrage reste aux mains des recruteurs. Pour exemple, dans la formation dans laquelle j’enseigne, nous valorisons l’engagement personnel plus que la moyenne générale et avons toujours rendus public nos critères. Une manière de lutter contre l’algebrisation des profils.Bref, très loin d’être parfait, notamment sur la disparition des vieux,Parcoursup, s’il crée un réel stress, qu’en tant que parent nul ne peut nier, reste la moins pire des solutions, pour peu qu’on ne lui délègue pas Le travail très technique du paramétrage par défaut.
Déçue par cet article partisan, clairement en dessous du niveau des autres.
Bonjour à tous,
A plus de 17 de moyenne générale depuis plusieurs années et tête de classe en école publique avec des appréciations élogieuses unanimes de l'ensemble de ses professeurs durant son parcours scolaire, notre fille travailleuse ne négligeant aucune matière s'est retrouvé en liste d'attente dans son utc de secteur à Compiègne dans une formation d'ingénieur bac + 5 série générale sans espoir d'admission par son rang dans le classement !!!???
Avec près d'une vingtaine de vœux et sous vœux : classes préparatoires scientifiques, commerciales, licences maths physiques ingénieries,PASS Options sciences ou philosophie, double licences MASS sciences po/Sorbonne... Dès l'ouverture de la phase d'admission ça été près de la moitié admis et l'autre en liste d'attente avec de bonnes possibilités d'admission sauf pour l'utc son université de secteur d'importance étant élève modeste (boursière...).
PARCOURSUP est un outil que nous avons découvert pratique pour l'orientation qui permet de multiplier les chances (candidatures) pour trouver une formation..
Aujourd'hui nous attendons des explications sur le classement (non possibilité d'admission)
à l'utc qui tarde à venir par contre la transparence avec parcoursup nous l'avons eut à chaque étape !
Dans le choix de nos vœux nous avons étudié la fiche formation, les attendus, possibilités d'hébergements .. pour chacun d'entre eux afin de les faire le plus possible en cohérence..
Les gamins partaient bien avant parcoursup !! L’ouverture à l’étranger existe depuis bien longtemps
Faire un lien de cause à conséquence n’a pas de sens
Et Parcoursup a plein d’avantages
Merci mille fois pour cet article si éclairant!
Bonjour,
Je ne mettrais pas Parcoursup sur un piédestal. En effet; celui-ci reste un système opaque et absolument pas ouvert. Cela au point que le Conseil constitutionnel avait été saisie !
Voici le lien vers des articles qui vous en diront plus : https://www.nextinpact.com/article/29967/108598-lopacite-algorithmes-locaux-parcoursup-devant-conseil-constitutionnel
Aujourd'hui, cela reste un Algorithme dont personne ne sais comment il effectue ces analyses. Cela d'autant plus que celui-ci peut être paramétré de différente façon.
Donc Oui , le choix par le paramétrage est en partie laissé aux recruteurs !
En conséquence de quoi, c'est un fait, Parcousup génère de nombreuse inégalités de chance aux choix de ses études supérieures.
Bien à vous.
Vous enlever le rêve des jeunes !
Une perturbation au niveau physique et psychiques des jeunes plus qu'autre
Chose. Il serait temps maintenant de réfléchir et de réagir avec sa tête et pas avec le porteonnaie !
Il faut se réveiller maintenant !
Note complémentaire : parcours sup n'admet que les titulaires de bac. Un équivalent bac reconnu en tant que tel au niveau européen mais délivré par le ministère de l'industrie conduit les opérateurs de la plateforme a une réponse unique : passez un Diplôme d'accès au études universitaires le seul reconnu par l'éducation nationale puis revenez sur parcours sup ! A croire qu'en France seul le bac et parcours sup ouvrent la porte aux études supérieures. Heureusement que le reste de l'Europe n'est à ce niveau, mon équivalent bac a été accepté en Italie et en Espagne, je n'ai pas cherché ailleurs. Mes études supérieures oui mais pas en France !
Cet article raconte n’importe quoi. Ça dit que les universités québécoises valorisent « la motivation des candidats au détriment des bulletins de notes » et sont donc « plus propice [sic] que le système scolaire français à assurer l’épanouissement des étudiants. » En fait, c’est complètement faux ! Les universités québécoises ne demandent que les notes des bulletins et ne regardent que ça ! On n’a même pas l’options de fournir une lettre de motivation ou de recommandation. Et elles s’enfichent complétement des organisations et des clubs dont vous faites partie. Ce n’est pas du tout comme le système américain. Ils saisissent tes notes dans leur système et on a l’impression que c’est un ordinateur qui sort la réponse.