Un chat qui se fait une journée spa

Travail : doucement le lundi, pas trop vite le mardi

© kozorog

Ou comment faire le strict minimum au bureau est devenu notre nouveau leitmotiv.

Faut-il le rappeler, notre relation au travail coche désormais la case « c'est compliqué ». Alors pour éviter de nourrir trop de ressentiment à l'égard de son emploi, nombreux sont les travailleurs à basculer en mode quiet quitting. (Un terme équivoque puisqu'il convoque des notions de flemmardise larvée et d'inertie revancharde plutôt que de droit du travail, mais passons.) Désormais, la démission silencieuse se décline à la façon d'un calendrier hebdomadaire, avec le principe populaire sur les réseaux du Bare Minimum Monday, dernier clou dans le cercueil de notre productivité.

C'est quoi le Bare Minimum Monday ?

Le Bare Minimum Monday (à traduire par : en faire le moins possible le lundi) est le nouveau concept en vogue dans le monde du travail. La pratique veut que les employés se présentent le lundi au bureau pour faire mollement le strict minimum. Le tout en « commençant souvent la journée en retard après une matinée productive de rituels self-care », précise Fortune. Le projet : éviter la mélancolie du dimanche soir et la déprime du lundi en transformant le premier jour de la semaine en une sorte de sas de décompression. En 2018, un sondage LinkedIn rapportait que 90 % des millennials et des Z éprouvaient de l'appréhension le dimanche, un sentiment partagé par 80 % des salariés. En 2021, un sondage YouGov indiquait sans grande surprise que le lundi était le jour le moins apprécié pour 58 % des travailleurs. En 2023, plus question que le réveil du lundi matin rime avec angoisse existentielle et désespoir nauséeux. C'est en tout cas ce que défend l'internaute américaine Marisa Jo (@itsmarisajo). Dans sa série sur le travail, série agrémentée des mentions « slow work 🐢 » et « Bare Minimum Monday», elle apparaît constamment emmitouflée d'un peignoir bleu roi baillant pour expliquer pourquoi il est crucial de ralentir le rythme.

Dans sa vidéo devenue virale intitulée L'histoire derrière le Bare Minimum Monday, la créatrice à l'origine de l'expression explique d'une voix monocorde pourquoi elle a mis en place le concept suite à une dépression : « Tu te levais avec l'impression d'être déjà en retard, tu établissais une to-do list inatteignable, espérant surperformer pour pouvoir te tirer de ton état de stress permanent, ce qui n’arrivait jamais. La fin de la journée rimait avec soulagement, honte de n'avoir pas réussi à atteindre ses objectifs, angoisse du lendemain. Recommencer des années durant te conduisait finalement au burn-out. Tu vivais dans une cocotte-minute et tu te mettais plus de pression que ton chef. Alors tu t'es demandé pourquoi : pour faire de ma vie un enfer au nom de la productivité ? (...) Tu savais que le moment de changer était venu. Alors, un lundi de l'année dernière, tu t'es levée en te donnant la permission de ne faire que le strict minimum. (...) La pression a disparu, tout était différent, tu t'es sentie mieux, et depuis tu récoltes les bénéfices de cette pratique par laquelle tu jures ». Sur TikTok, le #bareminimummonday cumule actuellement plus d'un million de vues.

Pourquoi les internautes adoptent le concept

Selon une récente enquête IFOP*, le travail génère des réactions de plus en plus épidermiques chez les Français. Constat : près de 5 salariés sur 10 déclarent faire « juste ce qu’il faut », et 37 % déclarent tout bonnement refuser les heures supplémentaires et éventuelles tâches qui ne relèveraient pas de leur mission. Quant aux autres, ils seraient tout simplement proches du burn-out, selon Jill Cotton, experte chez Glassdoor.

Celle-ci rapporte que le burn-out touchait 48 % des ravitailleurs britanniques à l'été 2022, un taux record. Dans ce contexte, le principe du Bare Minimum Monday pourrait s'avérer bénéfique. Tout d'abord, car il permettrait à des salariés bien remontés de ne pas péter les plombs. Ensuite, car il inciterait à mieux trier et hiérarchiser les tâches qui incombent aux employés, ce qui pourrait déboucher à moyen terme sur une refonte des fiches de poste. Rappelons que la récente enquête menée par des chercheurs de Cambridge, Oxford et Boston souligne que l'expérimentation de la semaine de 4 jours testée par 3 000 salariés britanniques (issues de 61 entreprises différentes) a été on ne peut plus bénéfique. « Moins de stress pour un chiffre d’affaires qui ne change pas », concluait Libération. Une proposition alléchante vers laquelle lorgnent aujourd'hui le Japon, l’Islande, l’Irlande et les États-Unis.

*Méthodologie : enquête menée par l’IFOP pour LesMakers.fr par questionnaire auto-administré auprès de 2 015 personnes et publiée fin 2022.

Laure Coromines

Laure Coromines

Je parle des choses que les gens font sur Internet et dans la vraie vie. Fan de mumblecore movies, de jolies montagnes et de lolcats.
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