Face à la déferlante de désinformation, les articles de fact-checking sur l'énergie et le climat font couler plus d'encre que jamais.
Avec la prolifération des fake news, la vérification d'informations devient primordiale. La scène médiatique a donc vu apparaître ces dernières années de nombreuses plateformes comme AFP Factcheck, Les décodeurs, CheckNews où encore Vrai ou Fake. Toutes ont un objectif : lutter contre les infox. Pour avoir une idée de l'ampleur de la tâche, le service d’évaluation de l’authenticité de l'information Newsback a lancé un baromètre qui cette année passe aux cribles les informations diffusées liées à l'énergie et au climat. Analyse.
Désinformation : l’énergie supplante le climat
Depuis 2013, un peu plus de 92 000 articles traitant d'énergie et de désinformation sont parus, soit deux fois plus qu'à propos du climat, avec 40 649 occurrences. Selon le rapport, les opérations de vérifications des informations émanent majoritairement de la presse en ligne, devant la presse écrite et enfin les médias audiovisuels. L'analyse de Newsback révèle que les médias se sont particulièrement mobilisés pour fact-checker en mars 2022, au lendemain de l’invasion russe en Ukraine. Rien de surprenant puisque la guerre en Ukraine a amorcé l’envolée des coûts de l’énergie et propulsé sur le devant de la scène médiatique une série de débats polémiques et initiatives politiques : sources d’approvisionnement, souveraineté énergétique, relance du nucléaire, développement des énergies renouvelables, transition énergétique, sobriété...
Fake news et fact-checking se répondent
Les énergies fossiles (pétrole et gaz) sont les plus médiatiques. Elles représentent à elle deux 67 % des articles abordant le sujet de l'énergie. Sans surprise, elles sont donc les principales concernées par les fake news. Ainsi, 33 % des articles associant énergie et désinformation concernaient le pétrole en 2022, contre 35 % en 2013. Le gaz est quant à lui à l’origine de 31 % des articles de fact-checking en 2022, contre 35 % en 2013. En troisième position arrive le nucléaire, qui représente 25 % des articles de lutte contre des infox en 2022, contre 20 % en 2013. Enfin, les énergies renouvelables (solaire, éolien, hydrolien) ferment le peloton avec 11 % des articles traitant d’énergie et de désinformation en 2022, contre 10 % en 2013. Interrogé à ce sujet par Franceinfo, Bruno Patino, directeur éditorial d'Arte France et professeur associé à l'école de journalisme de Sciences Po, explique : « Depuis la fin du XIXe siècle, on sait bien que ce choix de traitement des sujets ne doit pas être totalement déconnecté des sujets qui sourdent dans la société. L'important c'est qu'il n'y ait pas deux cercles d'information qui soient totalement imperméables l'un à l'autre : d'un côté le cercle journalistique professionnel et de l'autre, tous les sujets dont on parlera sur les réseaux sociaux. C'est pour ça que l'interconnexion des deux est absolument centrale non pas seulement pour le journalisme mais je crois vraiment pour la stabilité et en tout cas la richesse de l'espace public. »
Lutter contre les fake news
Face à la propagation des fake news, médias et journalistes mettent en place des outils pour expliquer la déontologie du métier et regagner la confiance du public dans un paysage embrouillé. « On vit tous sur les réseaux sociaux dans un univers où se mélangent trois types de messages : l'information, l'influence et la conversation. Quand ces trois types de messages se mélangent, forcément il y a du vrai, il y a du faux, forcément il y a de l'outrancier et il y a du raisonnable. Faire la part des choses quand tout voisine est complexe et le métier est devenu "un paysage un peu plus guerrier qu'avant". » Une démarche de vérification de l'information qui à ses yeux reprend la logique de la traçabilité que nous adoptons pour la nourriture.
Méthodologie : étude menée du 1er janvier 2013 au 31 mars 2023 sur la base de l’analyse de 5400 programmes d’information et 3000 articles de presse.
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