L'informatique quantique suscite beaucoup d'espoir. Dernier en date ? Sauver la planète. En effet, certains chercheurs étudient comment relever les défis du changement climatique à l'aide d'ordinateurs quantiques.
La captation du Co2 est essentielle pour résoudre le problème du réchauffement climatique. Dans cet exercice difficile, le « procédé aux amines » est aujourd’hui l'une des seules technologies disponibles pour capter des millions de tonnes de Co2 par an. L'étude et l'optimisation de ces procédés de captage du Co2 sont donc considérées comme cruciales. C'est ce que tente de faire une équipe de chercheurs du National Energy Technology Laboratory et de l'université du Kentucky qui a révélé dans AVS Quantum Science avoir déployé un algorithme pour identifier de meilleurs composés pour une capture plus efficace du carbone.
L'informatique quantique au secours de la planète
Une grande partie de la civilisation dépend encore des combustibles fossiles. Et même si une nette accélération dans le développement des sources d'énergie propres est en cours pour remplacer les énergies fossiles, le mal est déjà fait : la quantité de dioxyde de carbone dans l'atmosphère augmente quotidiennement sans aucun signe de ralentissement. Sans élimination, le dioxyde de carbone, déjà présent dans l'atmosphère, continuera à faire des ravages pendant des siècles. Pour ralentir ce processus, la capture du carbone atmosphérique, (extraire le carbone de l'air et le stocker) est une des principales solutions envisagées pour ralentir les effets du changement climatique.
Les ordinateurs quantiques appliqués à la chimie
Les technologies de capture du carbone en sont encore aux premiers stades de développement, les plus prometteuses impliquant une classe de composés appelés « amines » (dérivé de l'ammoniaque). L'efficacité est primordiale dans ces conceptions, et l'identification de composés même « légèrement meilleurs » pourrait conduire à la capture de milliards de tonnes de dioxyde de carbone. C'est pourquoi les recherches des chercheurs du National Energy Technology Laboratory et de l'université du Kentucky intéressent particulièrement la communauté scientifique. Leur objectif ? Identifier les meilleurs composés pour une capture plus efficace du carbone comme l'explique Qing Shao auteur de l'étude : « Nous ne sommes pas satisfaits des molécules d'amine actuelles que nous utilisons pour ce processus de capture du carbone. On peut essayer de trouver une nouvelle molécule pour le faire, mais si on veut la tester avec des ressources informatiques classiques, ce sera un calcul très coûteux. Notre espoir est de disposer d'un algorithme rapide capable de cribler des milliers de nouvelles molécules et structures. »
Tout algorithme informatique qui simule une réaction chimique doit tenir compte des interactions entre chaque paire d'atomes impliqués. Même une simple molécule à trois atomes comme le dioxyde de carbone, se liant à l'amine la plus simple, comme l'ammoniac – qui a quatre atomes – entraîne des centaines d'interactions atomiques. Un problème complexe à résoudre pour les ordinateurs traditionnels, mais c'est exactement le genre de question dans laquelle les ordinateurs quantiques excellent. Toutefois, les ordinateurs quantiques sont encore une technologie en développement et ne sont pas encore assez puissants pour gérer directement ce type de simulations. C'est là qu'intervient l'algorithme des équipes du National Energy Technology Laboratory et de l'université du Kentucky : il permet aux ordinateurs quantiques existants d'analyser des molécules plus grosses et des réactions plus complexes, ce qui est vital pour des applications pratiques dans des domaines comme la capture du carbone. « Nous essayons d'utiliser la technologie informatique quantique actuelle pour résoudre un problème environnemental pratique », a déclaré l'auteur Yuhua Duan.
L’absorption chimique, un procédé aux conséquences non négligeables pour la planète
Si le procédé à déjà fait ses preuves, au-delà du seul bilan carbone, l’analyse du cycle de vie de ce type de captage pose la question de son bénéfice environnemental réel. En effet, la technologie aux amines, est très gourmande en énergie. Interrogé par Usine Nouvelle, Eric Favre, professeur à l’École nationale supérieure des industries chimiques (Ensic) de l’université de Lorraine a indiqué : « Si l’on installe un système de captage de Co2 sur quatre centrales à charbon, on estime qu’il en faut une cinquième pour compenser l’énergie consommée ». Mais ce n'est pas tout. Pour chaque tonne de Co2 captée, environ 1,6 kg de solvant à base de monoéthanolamine (synthèse entre de l'oxyde d'éthylène et de l'ammoniaque) est perdu. Une dégradation progressive du solvant qui pèse lourd dans le bilan environnemental du procédé. D’abord parce qu’elle nécessite de fabriquer une quantité importante d’amines, qui sont dérivées de l’ammoniac, mais aussi parce que leur détérioration émet des effluents nocifs pour la santé humaine, comme l'explique Eric Favre : « De l’ammoniac, de l’urée, du formaldéhyde, voire des nitrosamines, sous forme de traces, peuvent être émis dans l’atmosphère. »
On comprend mieux l'enjeu des recherches des équipes du National Energy Technology Laboratory et de l'université du Kentucky qui vise à améliorer le bilan énergétique et environnemental du procédé.
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