Ces fictions qui attisent nos penchants conspirationnistes

Ces fictions qui attisent nos penchants conspirationnistes

© Amazon Prime - Utopia (2020)

Utopia, Mister Robot, House of Cards… Pourquoi sommes-nous autant attirés par les thrillers versant dans le complotisme ?

La menace d’une pandémie mondiale de grippe, une bande d’ados téméraires et un mystérieux manuscrit décrivant la fabrication d’un virus censé « nettoyer » une Terre surpeuplée… La sortie d’Utopia, nouvelle série Amazon Prime – remake d’un drame britannique du même nom sorti en 2013 – « est si prémonitoire qu’on a l’impression que sa sortie aurait elle-même pu faire l’objet d’une théorie du complot », écrit le journaliste David Jesudason dans un article de la BBC

Alors que le monde entier tente de se prémunir d’une seconde vague de Covid-19, le timing de diffusion de la série est ironiquement synchro et ne manquera pas de faire rire jaune les téléspectateurs les plus sceptiques. Récemment mis en ligne, les huit premiers épisodes de la série américaine racontent l’histoire de quatre jeunes geeks aux talents d’enquêteurs. Quand un roman graphique censé prédire l’avenir de l’humanité tombe entre leurs mains, ils découvrent que la réalité a rejoint la fiction et que le monde est bel est bien au bord de la destruction. Alors qu’ils cherchent à faire éclater la vérité, d’autres sont bien résolus à les faire taire…. 

Thrillers conspirationnistes : un genre qui séduit en période de crise

De quoi nous rendre paranos ou au contraire, nous aider à prendre du recul, en particulier à une époque où la défiance et l’incertitude alimentent de plus en plus de théories conspirationnistes – d'autant plus lorsque les crises sanitaires, écologiques et économiques semblent être résolues à s'enchaîner. 

« De l'affaire d'enlèvement du bébé Lindbergh dans les années 1930, à l'assassinat de JFK jusqu’aux attentats du 11 septembre, l'histoire nous montre que les moments de tension sociétale concordent avec une flopée de théories du complot qui cherchent à blâmer des organisations clandestines, une élite mondiale ou certains groupes religieux », analyse David Jesudason. Et lorsqu’une théorie du complot éclot, la fiction n’est jamais très loin pour lui tendre le micro... 

Déjà dans les années 70, les retombées du scandale du Watergate avaient alimenté l’imaginaire de plusieurs films centrés sur des malversations liées au gouvernement américain, rappelle le journaliste, dont le plus connu reste All the President’s Men (1976). Ces dernières années, les fictions dramatiques collant au plus près de l’actualité ou relatives à d’anciennes affaires à scandale sont de plus en plus nombreuses. 

En 2015 sortait Spotlight, un film relatant l'investigation de journalistes sur des suspicions d’abus sexuels au sein de l’Église catholique. En 2017, retour en arrière avec Pentagon Papers où Meryl Streep et Tom Hanks incarnent les deux têtes pensantes du Washington Post et révèlent la vraie nature de l’implication des Américains au Vietnam. Rebelote sur Netflix en 2019 avec The Laundromat. Toujours en tête d’affiche, Meryl Streep y jouait le rôle d’une veuve enquêtant sur une fraude à l’assurance et levait, sans le vouloir, le voile sur l’affaire des Panama Papers.

Côté streaming, les séries ne sont pas en reste. De Mr. Robot à Black Mirror en passant par House of Cards et Homecoming, les intrigues versées dans le complot, la corruption, la surveillance technologique et les mensonges d’État semblent faire écho à des menaces bien réelles, mais invisibles au quotidien.

Mais pourquoi les regarder avec autant d'avidité ? Peut-être pour nous en prémunir ou peut-être simplement pour nous complaire dans la certitude – frustrante mais ô combien excitante – que l’on ne saura jamais le fin mot de « l’Histoire »...

Margaux Dussert

Diplômée en marketing et publicité à l’ISCOM après une Hypokhâgne, Margaux Dussert a rejoint L’ADN en 2017. Elle est en charge des sujets liés à la culture et la créativité.
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