Selon une étude de The Boson Project, 86,3 % des patrons disent avoir du mal à recruter. Résultat : ils sont obligés de se plier aux exigences individuelles des salariés.
Télétravail à plein temps, menace de grande démission ou de « quiet quitting », envie de reconversion, semaines de 4 jours… La crise sanitaire a rebattu les cartes du rapport au travail. Et que pensent les dirigeants de tout cela ? C’est la question à laquelle souhaite répondre l’étude du cabinet de conseil The Boson Project publiée mercredi 16 novembre.
Cette enquête menée auprès de 109 dirigeants montre que la balle serait plutôt dans le camp des salariés. C’est en tout cas ce que ressentent les patrons. 78 % d'entre eux estiment que le rapport de force en entreprise a changé en faveur des employés.
La raison de ce changement de paradigme ? Les difficultés de recrutement qui touchent de nombreux secteurs. 86,3 % des sondés disent avoir du mal à recruter. Près de 90 % estiment qu’il est plus difficile de recruter qu’en 2019. « Il n’y a peut-être pas encore eu une grande démission à l’américaine, mais il y a une accélération des mobilités. Notamment celles qui n’ont pas eu lieu pendant la période instable de la crise sanitaire et qui ont été reportées aujourd’hui », juge Rose Ollivier, directrice de l’observatoire et autrice de l’enquête. 66 % des responsables interrogés jugent que les démissions sont en effet plus importantes par rapport à 2019.
Le retour des free-lances
Pour attirer les candidats, les dirigeants se plient aux conditions des salariés. 66 % disent repenser les conditions de travail et 50,5 % sortent des grilles de salaires. « Ils privilégient une approche individuelle et court-termiste. Les offres d’emploi vont plus être portées sur l’attractivité – les salaires et les conditions de travail », explique Rose Ollivier.
L’un des dirigeants interrogés note que « le niveau de compétitivité est tel que si vous voulez des collaborateurs qui correspondent à ce dont vous avez besoin (surtout si on n’est pas sur une capitale), vous êtes obligés de proposer une flexibilité extrême. »
C’est aussi le retour en force du « freelançat » juge Mariana Lagneau, directrice conseil et responsable marketing de The Boson Project et autrice de l'étude. Le « tous free-lances » dont on parlait beaucoup dans les années 2010 devient aujourd’hui un levier d’attractivité pour les dirigeants. D’autres vont faciliter les processus de recrutement ou encore reprendre contact avec leurs anciens salariés.
Un leadership plus « humble »
Selon l’étude, ce changement des règles du jeu serait plutôt bien accepté par les dirigeants. « Face aux exigences accrues et démultipliées des salariés que les dirigeants décrivent, il n’y a pas de réaction épidermique, pointe Mariana Lagneau. Aucun dirigeant ne parle de salariés « roi » ou capricieux. Ils accueillent à bras ouverts le changement. C’est aussi un rapport au leadership qui est humble, parce qu’ils n’ont pas de convictions arrêtées sur ce qu’il faut faire face à la complexité de la situation. » Les dirigeants seraient dans une posture d’écoute plus marquée qu’auparavant.
Ces méthodes de recrutement plus conciliantes vis-à-vis des demandes de chaque candidat renforcent un rapport au travail plus individualiste, estiment les autrices de l’étude. 60 % des dirigeants estiment que la fidélité à l’entreprise n’existe plus. Alors que paradoxalement la cohésion et l’engagement seraient la priorité de 70 % des dirigeants.
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