Un confessionnal et le logo de Coinfessions

Crypto-confessions : la thérapie en ligne des ratés des cryptos

Ils ont rêvé de millions, ils ont fini ruinés. Coinfessions, le mur des lamentations des ratés de la crypto, dévoile sans tabou les échecs les plus cuisants du grand casino numérique.

« Je suis parti de 1000 $ et j'ai atteint 500 000 $ en quatre mois. J'ai quitté mon boulot. Je suis redescendu à zéro en deux semaines. J'ai contracté des prêts et j'ai utilisé les cartes de crédit des membres de ma famille pour survivre. J'ai plus de 15 000 $ de dettes. » Ce genre de témoignages, Coinfessions en répertorie des centaines.

Tandis que sur les réseaux sociaux, les influenceurs crypto exhibent leurs gains spectaculaires, ce confessionnal virtuel offre un espace rare, où avouer ses investissements foireux n’est pas un péché. Avec ses 210 000 abonnés, le compte X est ainsi devenu le repaire des naufragés du trading et autres victimes du syndrome du FOMO (Fear Of Missing Out, la peur de rater une opportunité financière).

« 31 ans, malheureux, travail de merde, pas d'avenir » : les mirages d’une vie meilleure

Le profil type du coinfesseur ? Un jeune adulte en quête d’ascension sociale, convaincu que les cryptos sont le meilleur raccourci vers la liberté. Si certains rêvent de “Lambo” (Lamborghini), d’autres espèrent échapper au déclassement en misant sur le Bitcoin pour s’affranchir des systèmes traditionnels. « J’ai 25 ans, pas encore riche, mais j’ai un plan : chaque semaine, je mets 50 € dans le Bitcoin. Je ne compte pas sur le système. Ma retraite, c’est moi qui la construis », peut-on lire sur la version française.

Toutefois, la plupart sont rongés par l’inquiétude de tout perdre : « J’ai 31 ans et je suis un doomer (ndlr : qui assume une posture nihiliste et désabusée) avec un job de merde, sans perspectives d’avenir. J’ai investi toutes mes économies dans le BTC, c’est littéralement mon seul espoir. Si le marché s’effondre, je suis cuit. Ma fiancée me quittera et je resterai coincé dans ce boulot sans espoir », écrit cet investisseur torturé. Les cryptomonnaies concentrent ainsi toutes les tensions d’une époque et mettent en lumière l’angoisse d’une génération qui ne croit plus au système en misant tout sur la spéculation. Quitte à y laisser sa santé mentale.

Thérapie collective

Face aux pertes irréversibles, on se console alors comme on peut, à la manière d’un cercle de parole anonyme. Si certaines histoires peuvent s’avérer positives, beaucoup sont dramatiques et cruelles. « Ma famille a fui la guerre et a tout perdu. J'avais secrètement 1 000 $ et j'ai tout mis sur des memecoins. À un moment, j'avais 6 000 $ (une somme qui aurait changé notre vie). Mais je n'ai pas vendu, et j'ai fini par tout perdre. Je me déteste. » Les memecoins, en particulier, semblent avoir décuplé les risques. À l’image du $TRUMP, ces cryptomonnaies “fun” et accessibles ont séduit les nouveaux arrivants en augmentant le caractère addictif d’un marché déjà extrêmement risqué. « Dès que je vois un memecoin exploser, je ne peux pas m’empêcher de foncer ».

Pour certains, c’est aussi l’occasion de confesser ses crimes : « J’ai arnaqué des gens sur Twitter et j’ai été pris en flagrant délit. Je ne regrette rien. » Dans un étrange mélange, Coinfessions abrite ainsi les victimes, comme leurs bourreaux.

Entre voyeurisme et catharsis

Pour les traders en détresse, Coinfession n’est donc pas toujours une safe place. Sous les témoignages, les commentaires oscillent entre compassion et moqueries : « C’est mérité. » Apparaît alors le plaisir malsain de voir les autres tout perdre. Une forme de “rektporn” dont se délectent les abonnés (rekt signifiant être anéanti financièrement, une expression très répandue dans la communauté des cryptomonnaies).

Pourtant, ces témoignages servent aussi à humaniser les pertes, comme lors de l’effondrement de la plateforme FTX, qui avait ruiné de nombreux investisseurs. Ils étaient nombreux, à l’époque, à partager leurs mésaventures, utilisant le compte comme un journal de bord collectif. Et parfois, même ceux de l’intérieur craquent, dévoilant les coulisses peu réjouissantes de l’industrie : « Il me reste huit mois avant de pouvoir quitter cette foutue industrie. Je n’ai jamais été entouré de gens aussi faux de toute ma vie », lâche un autre anonyme. Mais plus qu’un exutoire, Coinfessions est avant tout l’archive vivante des illusions perdues du monde crypto : la petite anthropologie d’un capitalisme totalement débridé.

Discutez en temps réel, anonymement et en privé, avec une autre personne inspirée par cet article.

Viens on en parle !
Podacast : En immersion
commentaires

Participer à la conversation

Laisser un commentaire