extrait visuel de new york du film le jour d'après

Ces films « catastrophe » qui nous donnent envie de sauver le monde

© Le Jour d'après

Quel est le point commun entre les abeilles-robots tueuses de Black Mirror, le roman dystopique MaddAddam de Margaret Atwood et le film Le Jour d’après ? Leur prophétie écologique. Mais si la fiction nous alerte de plus en plus quant à l’avenir de la planète, nous aide-t-elle réellement à modifier nos comportements ?

Et si le « grand collapse » dont tous les scientifiques parlent avait lieu demain, en France ? Et s’il signait la fin de notre civilisation ? C’est là le pitch de la série française L’Effondrement, qui sera diffusée au mois de novembre sur Canal+. Une énième fiction climatique qui ne va rien arranger à nos crises d’éco-anxiété. Livres, films, séries, jeux vidéo… il devient difficile d'échapper aux  « fictions climatiques » . Et si vous n’êtes pas encore familier avec le genre, écrivait le Guardian en 2017, « vous le serez tôt ou tard » …

Cli-Fi : le courant artistique du XXIème siècle ?

Aux États-Unis, le nombre de fictions reprenant à leur compte les questions écologiques ainsi que certaines thèses scientifiques se sont multipliées ces dernières années. Dans les années 2010, la presse parle même de l’avènement d’un nouveau genre littéraire : la Cli-Fi, un dérivé écologique de la science-fiction qui consiste à raconter le réchauffement climatique, et plus largement l’impact de l’Homme sur la Terre.

Envahissant aujourd’hui nos écrans, le genre a porté des productions à succès comme Le Jour d’après (2004), Snowpiercer (2013) ou Okja (2017). 

« Il existe maintenant des centaines de cours de Cli-Fi dans des collèges communautaires et de grandes universités aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie », raconte le journaliste et père du terme Dan Bloom à Mic. En France, une vingtaine de grandes écoles choisissaient cette année de former leurs élèves aux enjeux climatiques. Preuve que la prise de conscience s’accompagne d’actions. Preuve aussi que la fiction, au même titre qu’une jeune suédoise de 16 ans, peut être un levier puissant pour fédérer autour d’enjeux qui urgent. 

La fiction pour infléchir nos comportements

À l’heure où les scénaristes ne jurent que par la dystopie, dans quelle mesure la fiction peut-elle nous aider à prendre conscience du problème, voire à changer de comportements pour le meilleur ? À en croire Anthony Leiserowitz, chercheur étudiant les perceptions du public sur le réchauffement climatique, « le film est, jusqu’à présent, la forme de narration la plus puissante que nous ayons mise au point », assure-t-il à CNN. Et il en a les preuves.

En 2004, il dévoile une étude sur l’impact du film Le Jour d’après sur le public, un long métrage catastrophe porté par le climatologue Jack Hall (Jake Gyllenhaal), lequel prédit l’arrivée prématurée d’une nouvelle ère glaciaire. Ses conclusions ? Les personnes qui ont vu le film et celles qui ne l’ont pas vu ont des opinions différentes sur la question du climat :

1) le film a incité les Américains qui l’ont vu à se préoccuper davantage du réchauffement climatique.

2) Il les a encouragés à entreprendre des actions personnelles, politiques et sociales pour lutter contre.

3) Il semble même avoir influencé l’orientation politique de certains électeurs. À l’époque de l’administration Bush, les personnes qui ont vu le film avaient en effet davantage tendance à se méfier du président et étaient plus susceptibles de faire confiance à des scientifiques et organismes environnementaux que ceux qui ne l’avaient pas vu, avance l’étude.

Instillée au sein de la culture populaire, la représentation des risques environnementaux serait alors capable d’influencer les comportements du public. Un constat que partage Camille Dijoud, cofondatrice de la société de placement de produits éthiques Pixetik. Spécialisée dans les partenariats entre marques engagées et fictions, cette ancienne du CNC est persuadée que ces dernières peuvent influencer positivement la société. Et ce ne sont pas les exemples qui manquent. Il y a d’abord eu le concept des « capitaines de soirée » aux États-Unis. Popularisés grâce aux séries télé, ces héros qui conduisent et donc « ne boivent pas », ont réussi à convaincre les Américains de faire de même, rappelle la fondatrice. Idem pour l’actuel président ukrainien Volodymyr Zelensky, ex-acteur de la série Serviteur du Peuple : « la presse rapporte que cette élection démocratique a été influencée par la série télé dans laquelle il incarnait un professeur d’histoire, Vasyl Holoborodko, élu président pour sauver le pays de la corruption ».

 
 
 
 
 
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Le besoin de médiation autour des nouveaux récits

Dans ce contexte, pourquoi ne pas accompagner scénaristes et équipes de tournage vers des fictions sensibilisant ou éveillant à l’écologie ? Avec du placement de produit par exemple.

« Il existe des solutions à impact positif dans notre quotidien, dans les secteurs de la grande consommation et de la mode notamment (alimentaire en vrac, upcycling, service de location de chaussures…). Pour autant, ces solutions ne font pas encore partie des habitudes de consommation, explique Camille Dijoud qui a notamment travaillé avec la marque Justine B pour la série Derby Girl. Nous essayons de créer du placement de produit sur-mesure, cohérent avec l’histoire, les personnages et le message à faire passer aux spectateurs. On ne va pas demander à James Bond de passer subitement de l’Aston Martin au covoiturage… »

En phase de tournage, la médiation « écologique » des équipes pourrait aussi influencer une partie de l’intrigue.  « De manière traditionnelle, nous intervenons entre la phase de pré-production et le tournage. À terme, il serait souhaitable d’intervenir dès le stade de l’écriture pour renforcer la dimension "à impact positif" de l’intrigue, en dialoguant avec le ou les scénaristes et le réalisateur », conclut Camille Dijoud.

Demain, James Bond pourrait bien rouler en Tesla et déguster des cocktails à base de kombucha. Encore faut-il qu’il y ait un bon fiction sustainable manager sur le plateau.

Margaux Dussert

Diplômée en marketing et publicité à l’ISCOM après une Hypokhâgne, Margaux Dussert a rejoint L’ADN en 2017. Elle est en charge des sujets liés à la culture et la créativité.

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