
Une équipe de chercheurs a mis au point une enzyme capable de décomposer du plastique en vingt-quatre heures. Une petite révolution ? En tout cas, son point de départ.
Imaginez : vous avez devant vous le cadavre d'une bouteille en plastique. De vagues souvenirs d’école vous reviennent : « il faut des centaines d’années pour qu’une bouteille en plastique se dégrade dans la nature. » Quand soudain, sous vos yeux ébahis, la bouteille se décompose… Et en une journée, elle a disparu. Ou presque.
L'enzyme dévoreuse
La revue Nature a publié fin avril un rapport dédié à cet exploit. Cela faisait longtemps que les scientifiques travaillaient sur le recyclage du plastique par la chimie, mais la nouveauté, explique la revue, c’est qu’on est passés sous la barre symbolique des vingt-quatre heures pour qu’un plastique se décompose.
Qui sont les héros à qui l’on doit cette prouesse de bio-ingénierie ? Il y a d’abord une équipe française (cocorico), plus précisément de l’université de Toulouse, qui a mis au point il y a quelques années une enzyme capable de recycler le plastique. Puis les Américains sont entrés en scène : l’université du Texas a amélioré le procédé grâce aux avancées de l’intelligence artificielle, pour créer une super-enzyme répondant au doux nom de FAST-PETase, qui digère les déchets à grande vitesse.
Recycler mieux
Une fois le plastique décomposé par les enzymes, il ne disparaît pas complètement. Il reste de petites molécules, les monomères de base, que l’on peut réutiliser pour fabriquer de nouveaux plastiques. Le principe est donc le même qu’une chaîne de recyclage classique, mais en accéléré.
Mieux encore : dans le recyclage classique où l’on broie les emballages, les paillettes que l’on obtient sont de moins bonne qualité, et ne peuvent pas être recyclées indéfiniment. L’enzyme FAST-PETase est plus consciencieuse : elle sépare et épure les polymères, pour un résultat de bien meilleure qualité. De quoi assurer un recyclage vraiment circulaire, sur plusieurs années. C’est une grande nouvelle quand on sait que sur les 7 milliards de tonnes de déchets plastiques produits depuis 2015, on n’en a recyclé que 10 %...
Tout reste à faire
Mais il y a un « mais », et même plusieurs. D’abord, on est encore loin de l’échelle industrielle : il faudra attendre encore quelques années avant que le système puisse être généralisé. Ensuite, la transformation du plastique par les enzymes consomme beaucoup d’énergie. Et elle ne fonctionne à ce jour que sur un type de plastique, le polymère polyéthylène téréphtalate (PET), qui représente seulement 12 % des déchets à l’échelle mondiale. D’ailleurs, ce PET, on savait déjà le recycler de façon bien moins coûteuse et énergivore…
Bref, il y a un petit côté « poudre aux yeux » dans cette découverte. C'est une vraie bonne nouvelle, mais elle n’a certainement pas de quoi nous faire relativiser l’urgence de la réduction de notre dépendance au plastique. Recycler, c’est bien ; consommer moins, ce sera toujours mieux.
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