La distance ne doit pas affecter la marque employeur. Certes, mais comment entretenir sa marque employeur avec des salariés éloignés ou déconnectés ?
Une tribune de Vincent Saccomanno, Directeur général de l’agence Dagobert
Lorsque l’on parle de travailleurs éloignés (ou « remote workers » pour les adeptes des anglicismes), on s’imagine une personne confortablement assise dans son canapé, voire installée dans l’un des nombreux espaces de coworking qui ont essaimé ces dernières années, ordinateur portable et mug de café à la main. Parfois, cette personne aura même la chance de se trouver à l’autre bout du globe, façon « digital nomad » . Mais conservera le contact avec son employeur, ses prestataires et clients via la palette très large des outils digitaux qui existent aujourd’hui.
De la plateforme conversationnelle Slack ( « le plus sexy des outils BtoB », dixit une étude Fabernovel), à l’outil d’échange vidéo whereby.com : les options sont multiples, et ne cessent de se développer à mesure que le nombre de freelances et de télé-travailleurs explose. Ces outils apportent des facilités de reconnexion à des salariés de plus en plus nombreux : les éloignés. Pourtant, se concentrer uniquement sur cette population connectée et réactive reviendrait à ignorer une large partie de la population des travailleurs éloignés.
Les travailleurs déconnectés, la partie immergée de l’iceberg
Aujourd’hui, de nombreuses structures, au premier rang desquelles les sociétés de service du secteur tertiaire, ont des collaborateurs dispersés sur de multiples terrains (usines, chantiers, locaux d’un client…). Parfois complètement déconnectées, parfois relativement isolées, ces personnes sont tenues à distance de la communication de l’entreprise. Ce qui représente un défi pour le maintien de la marque employeur.
On le constate, les entreprises qui ont du mal à garder le contact avec leurs employés éloignés se contentent de contacts diffus à connotation administrative. Que ce soit via l’envoi d’une fiche de paye qui matérialise la relation contractuelle ou via l’entretien annuel qui permet de faire le point sur les attentes mutuelles. Or, il en faut beaucoup plus pour construire un lien et entretenir sa marque employeur sur le long terme. Voici donc quelques conseils, à destination des entreprises, mais également des collaborateurs concernés.
Adapter le média, jouer sur la cooptation
Les études récentes tendent à le prouver : la fracture numérique est une réalité. Certains employés sont ainsi complètement déconnectés, voire éloignés des outils digitaux. Pour ces « oubliés du net » , il est difficile voire impossible de maintenir le contact avec son employeur. Pourtant, pour le bien de tous, ces employés doivent être mobilisés et fidélisés au même titre que l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise.
L’une des solutions pour recréer du lien est d’intensifier et de renouveler les outils traditionnels de communication vers les employés déconnectés : affichage sur lieu de travail, informations envoyées en même temps que le bulletin de paye, réunions d’échanges, boîtes à idées. La logique du « je te recommande, je t’envoie, je te forwarde le message » peut compléter ces dispositifs traditionnels et ainsi contribuer à compenser la déconnexion.
Miser sur les outils conversationnels transverses
Aujourd’hui, les entreprises misent sur la création de véritables conversations avec leurs employés, dans le but de fédérer des communautés en interne. Les groupes fermés se démocratisent sur Facebook et permettent d’abolir en partie la distance entre les collaborateurs. Chez Dagobert, nous avons notamment déployé avec le groupe Sodexo ces groupes fermés sur Facebook en permettant ainsi aux collaborateurs d’échanger sur leur métier et l’actualité du groupe dans plus de 10 pays.
De la même manière, les Intranets sont également en train de vivre une véritable révolution servicielle, et tendent à être enfin de véritables réseaux sociaux d’entreprise. Pour générer de l’engagement, mieux vaut toutefois miser sur le contenu. Vidéos, articles partageables, émissions en direct sont autant d’outils pour stimuler les échanges, et susciter l’engagement des employés. Le vrai challenge pour les entreprises est alors de créer des contenus intéressants et impliquants.
Promouvoir l’employee advocacy
Pour engager et fidéliser des collaborateurs proches ou éloignés, et en recruter de nouveaux, il n’est pas de meilleur outil que la recommandation de pair-à-pair. Les stratégies d’employee advocacy sont abondamment commentées ces dernières années, et pour cause : ça marche ! Tout l’enjeu pour les entreprises est donc de repérer les personnes qui savent bien parler de leur métier. Et les encourager à faire de l’évangélisation. C’est là-encore une très bonne façon de se rapprocher des employés éloignés et déconnectés : en les intégrant pleinement dans ce processus de témoignage, de co-réflexion et de représentation.
Le réseau LinkedIn est une plateforme idéale pour travailler sa marque employeur via l’employee-advocacy. En plus de son rôle d’interface indispensable pour les recrutements, LinkedIn permet aux collaborateurs de s’emparer de la marque employeur et de la nourrir. Attention toutefois à donner les bons outils en amont, et à repréciser le cadre de la charte de communication de l’entreprise.
Quant aux nouvelles plateformes comme Glassdoor ou Welcome To The Jungle, elles permettent également de faire la passerelle entre les employés présents et futurs. Des investissements spécifiques doivent néanmoins être mis en place pour cibler correctement les profils sur chacune des plateformes.
Comprendre à qui on s’adresse, et l’image que l’on veut donner
Attention, le faux-pas n’est jamais bien loin…Il y a un vrai risque pour les entreprises à créer un hiatus entre leur ADN et leur communication marque-employeur. On a tous en tête des exemples d’institutionnels de la banque ou de l’assurance qui mettent en place une communication « funky » pour attirer des jeunes. Mais le risque patent est de créer un sentiment de déception, ainsi que de grandes frustrations à l’arrivée. De la même manière, ce genre de communication peut alimenter un décalage avec des salariés historiques, qui se sentent soudain moins considérés.
Plus récemment, Amazon s’est attiré les foudres de certains commentateurs en ligne. Accusée d’autonomiser le travail au point de le déshumaniser et d’employer ses salariés dans des conditions particulièrement précaires, l’entreprise s’est faite épingler à la suite d’une initiative visant à redorer le blason de sa marque. Elle a donc proposé des visites gratuites de ses entrepôts, et embauché des ambassadeurs (rémunérés) pour en faire la promotion sur Twitter. Une pratique quelque peu cynique qui n’a pas échappé à certains défenseurs des droits des travailleurs.
really like? cause your workers are liars? you’re not going to convince the working class that everything is fine by telling us where to avert our eyes, we already know what it’s really like. why don’t you really treat your workers better, you can afford it
— Diana Wilde (@rulesObeyer) August 14, 2019
Moralité ? Les publics sont conscients, informés. Ils sont prompts à détecter le bullshit ou le social-washing. La cohérence sur toutes les plateformes est donc plus que jamais un pré-requis. En interne autant qu’en externe. Pour vos salariés autant que pour vos clients.
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