Alors que le Covid-19 nous promet des économies atones, c’est peut-être le moment pour les entreprises de s’inspirer de solutions efficaces et qui demandent peu de moyens. Histoire de faire mieux avec moins, à l’instar de ce qui se produit déjà dans certains pays en transition ?
« La crise du coronavirus a causé beaucoup de souffrances et d'incertitudes, mais ses conséquences nous offrent l'occasion de rompre avec les vieilles habitudes et de construire une économie circulaire, durable et hautement compétitive », écrivent Frans Timmermans, responsable du Green Deal au sein de la Commission Européenne et Bertrand Piccard, aéronaute et président de la fondation Solar Impulse dans le cadre d’une récente tribune intitulée « Quel monde voulons-nous après le Covid-19 ». Mais comment passer d’une économie linéaire à une économie circulaire ? Comment s’affranchir d’une économie "courtermiste", carbonée, qui gaspille et qui manque cruellement d’inclusion ? En s’inspirant de ce qui se fait au Mexique, au Mali et en Inde, par exemple. À l’heure où l’on annonce d’autres crises écologiques, sanitaires et sociales, nos entreprises aspireront-elles à développer des solutions low-tech, agiles, résilientes et durables ?
Passer d'une innovation techniciste et énergivore au jugaad
Pour décarbonner les activités dans une perspective économique morose, regarder du côté de l’innovation frugale parait vertueux. En complément d'une innovation techniciste et parfois énergivore, cette philosophie de conception a vraiment de quoi aider les organisations dans leur transformation dans un monde aux ressources limitées. C’est « une stratégie disruptive pour développer des produits plus rapidement, mieux et moins cher. Des milliers d'entrepreneurs pratiquent cette forme d'innovation dans les marchés limités en ressources en Afrique et en Inde — où cette pratique est connue sous le nom de jugaad, une solution improvisée (sorte de « Système D » ) — pour résoudre de manière ingénieuse les problèmes avec peu de moyens », explique l'universitaire Navi Radjou. Pour ce théoricien de l’économie frugale, les entreprises qui décident de « pivoter », de se réinventer pour sortir de la crise devraient adopter un état d’esprit frugal et agile. « La crise sanitaire du Covid-19 en Occident est une opportunité historique pour les entreprises en Europe et aux États-Unis de désapprendre la façon dont elles ont pratiqué l'innovation durant les 100 dernières années », pense Navi Radjou. Ainsi, selon lui, les entreprises doivent désormais simplifier, réutiliser les ressources existantes, penser et agir horizontalement !
S’inspirer des solutions qui existent déjà
Earthwake, vous connaissez ? Il s’agit d’une association qui développe une solution pour faire des déchets plastiques une source d’énergie. Avec son innovation low-tech qui permet de convertir 160 kg de déchets plastiques en 120 litres de carburant par jour, Earthwake a remporté le prix Economie en Transition de Circular Challenge 2019 de Citeo, un programme d’Open Innovation pour trouver des solutions concrètes afin d’accélérer la transition vers une économie circulaire. Citeo dont la mission est de réduire l’impact environnemental des emballages et des papiers, avec le concours des entreprises et des collectivités locales, œuvre à travers son programme Circular Challenge, à trouver des solutions d’éco-conception, de réemploi, de collecte et tri pour 100% des emballages et papiers et estime qu’il y a un enjeu à s’inspirer des solutions existantes dans une perspective d’enrichissement mutuel : « Nous vivons dans un monde perturbé mais il faut se rappeler que nous sommes tous ensemble en capacité de créer un monde de valeur partagée », explique Cécile Sémériva, Directrice Innovation de Citeo.
Et pour cause, les idées et les solutions à partager ne manquent pas. Les savons à peine utilisés jetés par millions chaque année ? ANACAONA Community les récupère et les valorise ! La solution de collecte, née en Haïti, séduit des hôtels français qui souhaitent améliorer leur impact environnemental. Eco Act Tanzania a, de son côté, développé une technologie qui transforme les déchets en plastique en matériau de construction résistant. Et le projet est vertueux à plus d’un titre puisque l’entreprise sociale implique les citoyens dans la gestion des déchets en échange d’une couverture santé. La jeune entreprise voit grand et travaille déjà sur de nouveaux débouchés pour sa matière. Pour les retrouver bientôt chez nous ?
Ces nombreux innovateurs qui agissent à travers le monde dessinent une économie durable, respectueuse du vivant et des ressources. Et ça, le continent africain, qui comprend de multiples savoir-faire locaux et qui désire un avenir économique inclusif, souhaite même en faire la philosophie de sa relance économique. Il y a quelques jours, une conférence sur le thème « Web Act for Impact: L’innovation frugale pour l’Afrique de demain », a réuni des experts économiques et politiques du continent et internationaux, dont Navi Radjou. Et pour les participants, l’innovation frugale serait la voie nécessaire à adopter pour les économies des pays africains, dans un contexte de prémices d’une récession économique mondiale inévitable ». De quoi inspirer le Vieux Continent et ses entreprises qui cherchent plus que jamais à se réinventer ?
Et si vous vous lanciez dans le Circular Challenge de Citeo ?
Vous portez une innovation frugale mais aussi technique capable de répondre aux nouveaux enjeux environnementaux ? Alors candidatez à l’édition 2020 de Circular Challenge Citeo, le premier concours européen dans le domaine de l’économie circulaire. Vous pourrez bénéficier d’un accompagnement d’experts, d’une visibilité accrue et du riche écosystème d’Open Innovation de Citeo qui compte aujourd’hui plus de 1 000 projets sourcés et plus de 79 millions d’euros levés par 28 finalistes du programme. Vous avez jusqu’au 31 juillet 2020 pour postuler : ici !
Pas sûr que transformer les déchets plastiques en carburant soit très vertueux; ça risque de créer un fameux effet rebond en légitimant la consommation de plastique car on sait en faire du carburant. Sauf qu'à chaque étape de l'énergie est nécessaire et à la fin, on génère d'autres déchets et émissions.