
« C’est pas moi, c’est le confinement ! ». Entre ennui, angoisse et désespoir, la pandémie nous fait reprendre nos pires habitudes.
Attention ! Avis de grand retour des mauvaises habitudes ! Retour à la cigarette pour certains, commandes Amazon honteuses pour d’autres et petit boom de l’utilisation des produits à usages uniques... la pandémie érode sérieusement notre volonté.
Petits arrangements avec sa morale
Dès juillet 2020, les géants de l’industrie du tabac se frottaient les mains. Alors que les ventes de cigarettes décroissent depuis 40 ans, la crise du Covid-19 a permis d’atténuer le phénomène. En France, on a enregistré une baisse de 1,3% des ventes en 2020 par rapport à 2019 alors qu’en 2019, elle était de 6,6% par rapport à l’année précédente. Entre l’incertitude d’une situation qui dure, nos emplois du temps bouleversés par le télétravail et l’envie de se faire plaisir dans un monde de restrictions, les (mauvaises) raisons de s’en griller une ne manquent pas.
Dans les colonnes du Guardian, la journaliste Amelia Tait raconte, elle aussi, est retombée dans ses vieux travers. Dans son cas, c’est côté cuisine que ça se passe. Après trois ans de végétarisme, il n’aura fallu que trois semaines de confinement pour que la spécialiste des cultures web « engloutisse des nuggets de poulet ». Celle qui avoue des écarts à son régime alimentaire de temps en temps se rend immédiatement compte que cette fois-ci, c’est différent. En plein pandémie, sa volonté a fondu façon raclette (avec fromage et supplément lard).
Mais la journaliste découvre qu’elle est loin d’être la seule dans son cas. À Londres, Hannah, 27 ans dont cinq comme vegan, avoue avoir cédé à la tentation de quelques produits laitiers depuis le début de la pandémie. Nicole, 28 ans, est passée d’une alimentation 100% végétarienne seulement que 50-70%. Dans la même veine, la pandémie a largement profité à la junk food et la comfort food, considérées comme une « valeur refuge » .
Les mauvaises habitudes reviennent au galop
Le problème n’est pas seulement dans l’assiette. Pour Elliot, 34 ans, il porte un nom et s’appelle Amazon. Pré-confinement, l’Anglais disait haïr l’entreprise de Jeff Bezos mais après quelques semaines cloîtré chez lui, il succombe à un abonnement Amazon Prime. « Pour justifier mon acte, je me suis souvent répété que c’était la meilleure façon d’essayer d’éviter le Covid », explique-t-il à la journaliste. Si Elliot s’arrange tant bien que mal avec sa conscience, en France certains consommateurs n’hésitent pas à se délester de leurs emballages Amazon avant de rentrer chez eux, comme le rapporte Rue89. Une façon de laisser la honte sur le palier.
Pourquoi on craque ?
La honte imprègne chaque témoignage de celles et ceux qui ont renoncé à leurs objectifs moraux pour cause de pandémie. Alors, pourquoi est-ce la crise du Covid-19 nous fait-elle craquer ?
La crise sanitaire a bousculé notre quotidien, nos habitudes et nos repères. Le temps de se réajuster, quelques idéaux en prennent un coup. « Nous sommes privés de tellement de droits actuellement. Pourquoi est-ce que je devrais m’interdire encore quelque chose d’autre ? », s’interrogeait Amelia en se délectant de ses nuggets de poulet. Pour le psychologue Roy Baumeister, le phénomène révèle surtout que nous sommes épuisés mentalement. Pour le professeur de l’université de Queensland, en s’efforçant de respecter la distanciation physique ou le port du masque, on perd l’énergie pour réguler nos envies qui sont en désaccord avec notre morale. Et plus on se laisse aller, pire c’est. D’après Roy Baumeister, la volonté s’apparente à un « muscle » qui se relâche si on ne l’entraîne pas. De quoi nous interroger sur l’aspect temporaire de ces petits arrangements avec nos valeurs morales.
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