Vendre des produits en ligne façon téléachat : une profession très prisée en Chine, qui fait ses débuts timides en France, poussée par le site AliExpress.
Hannah, une jeune femme d’une vingtaine d’années, vante les mérites d’un mousseur de lait. « Il est très léger, très pratique », précise-t-elle avant de brancher l’appareil. La scène ne se déroule pas sur TF1 un mardi matin de 1992, mais sur le site d’AliExpress en 2021. Il s’agit d’un liveshopping, une technique de e-commerce née en Chine il y a quelques années, qui émerge en France depuis le premier confinement. Les vieilles recettes du téléachat ou des camelots des marchés y sont revisitées. Le but est de divertir, mais surtout de faire acheter, et vite.
Pendant une heure ou plus, un « liveseller » présente 6 à 7 produits. Des ustensiles de cuisine, des perches à selfie, des gadgets high-tech, des accessoires de mode, des sacs-à-dos… Tous proviennent du site AliExpress et sont généralement fabriqués par des entreprises chinoises. Évidemment, un lien direct vers la fiche du produit est intégré à la vidéo. Comme pour le téléachat, des codes promotionnels sont donnés aux spectateurs qui regardent le live pour les inciter à passer à la caisse rapidement. Ils peuvent également poser des questions à l’animateur et faire des commentaires tout au long du direct.
Pour exporter ce format de vente – aujourd’hui incontournable en Chine – AliExpress a embauché une vingtaine de livesellers depuis mai dans l’Hexagone. Le site compte en recruter une dizaine de plus chaque mois.
Des vendeurs superstars en Chine
En Chine, parmi les quelque 10 millions de livesellers, certains sont devenus des stars nationales. À l’instar de Li Jiaqi, un testeur de rouge à lèvres très expressif aux 30 millions d’abonnés. Il ponctue ses essais maquillage de « Oh mon dieu ! » et autres « Achetez-le ! » pendant des lives qui durent des heures. Son record : 125 millions d’euros de ventes en une seule session.
Jennifer Friess, une liveseller française et jeune comédienne, qui a répondu à nos questions par e-mail (ses réponses ont été validées par la communication d’AliExpress, ndlr) regarde Li Jiaqi comme un modèle. Pour le moment, elle n’a pas encore l’aura du jeune vendeur chinois. Ses deux à trois sessions hebdomadaires récoltent en moyenne entre 800 et 2 000 vues. « En termes de ventes, nous sommes entre 500 et 3 000 dollars par live », estime-t-elle. Pour l’ensemble des livesellers français, la gloire ne semble pas encore au rendez-vous. En se connectant au site d’AliExpress Live, on constate que le nombre de spectateurs en silmutané des liveshopping français excède rarement la trentaine. Au total AliExpress revendique tout de même 1,5 million de spectateurs pour 3 000 lives depuis mai.
« L’important est de créer une relation avec leur communauté pour le moment, explique Mana Zhou, responsable des contenus marketing pour AliExpress France. Nous recrutons les livesellers via des agences, qui regardent leur capacité à vendre et à être à l’aise devant la caméra. Ils n’ont pas besoin d’être déjà suivis sur les réseaux sociaux. Ce ne sont pas des influenceurs », précise-t-elle.
Mannequin/liveseller
Volodia Boutineau, un liveseller spécialisé sur les objets tech, nous indique gagner entre 500 et 900 euros par mois via cette activité, qu’il exerce en parallèle de son métier de mannequin. « Généralement, j’anime deux sessions de livestreaming par semaine, qui durent chacune 1 heure, soit au moins 8 heures par mois », précise-t-il.
AliExpress n’est pas le seul à tenter d’exporter cette technique de vente en France. Pendant le confinement, des marques comme Fnac-Darty, Nocibé ou Boulanger ont lancé leurs sessions de liveshopping diffusées sur leur propre site, YouTube ou encore Twitch. Certaines préfèrent miser sur des influenceurs déjà connus comme le cuisinier Cyril Lignac et les youtubeurs McFly et Carlito, plutôt que sur des apprentis livesellers. De leurs côtés, les réseaux sociaux comme TikTok et Instagram deviennent eux-aussi des plateformes de liveshopping, en intégrant de plus en plus de fonctions d'achat.
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