Vous reprendrez bien un peu de diamants ?

Pour déclarer votre amitié, rien de mieux qu'un diamant. Dixit les vendeurs de diamants.

Puisque le mariage séduit moins, l'industrie du diamant tente de nous convaincre que les relations platoniques sont aussi dignes d'être célébrées par l'achat d'une pierre précieuse. Dans leurs publicités, les vendeurs Jared et Brilliant Earth montrent tantôt une jeune femme blonde offrant un pendentif en diamants à sa sœur, tantôt une mère et sa fille qui s'échangent d'un air complice des bijoux de famille. De son côté, Hallmark suggère tout simplement d'offrir des diamants à ses amis, voire à toute personne « qui vous apporte de la joie. »

Vos amies méritent bien un petit diamant

Bleu ciel, vert d'eau ou rose pâle, le diamant n'a que peu de valeur intrinsèque. Son prix dépend entièrement de sa rareté, une rareté bien souvent soigneusement manufacturée par les vendeurs. L'essor des diamants fabriqués en laboratoires, plus durables et moléculairement identiques aux diamants dits naturels, change la donne. Selon Paul Zimnisky, spécialiste du secteur, un diamant de laboratoire coûtait déjà 10 % de moins qu'un diamant extrait des mines en 2015, contre 90 % aujourd'hui. Une baisse qui a permis d'ouvrir le marché à une clientèle plus large, notamment aux femmes. Dorénavant, elles offrent parfois des pierres précieuses à leurs amies, principalement sous la forme de pendentif. Il y a 30 ans, les diamants nuptiaux représentaient plus de la moitié de la demande mondiale. Ils ne pèsent plus qu'un tiers aujourd'hui, rapporte Paul Zimnisky. La nouvelle importance accordée à l'amitié, désormais célébrée au même titre que les relations amoureuses, n'aura pas échappé à l'industrie.

Une brève histoire des diamants

Depuis des décennies, l'industrie s'échine à associer diamant et amour éternel. Dans les années 40, les vendeurs l'imposent comme prérequis de la demande en mariage. Dès les années 80, les campagnes de pub essaient de convaincre les femmes qu'elles feraient bien d'acheter des diamants aux hommes. En 2003, la marque De Beers encourage les femmes à s'offrir des pierres précieuses à elles-mêmes. Et dans les années 2010, pour écouler les surplus de stocks de pierres plus grossières, les diamants bruns sont présentés comme des « chocolats ». Aujourd'hui, le magazine The Kit explique qu'acheter des diamants à sa meilleure amie est « un geste féministe. » Amour ou amitiés, peu importe. « Les spécialistes du marketing essaieront toujours d’associer leurs produits à ces sentiments. La volonté de rappeler aux femmes qu'elles peuvent acheter des diamants par elles-mêmes, pour elles-mêmes ou d'autres femmes de leur entourage, n'est que la dernière stratégie d'une industrie qui tente depuis longtemps de convaincre le public que son produit a plus de valeur qu'il n'en a réellement », rappelle The Atlantic. Ou comment le capitalisme s'empresse de transformer les moindres soubresauts sociétaux en traditions consuméristes.