
Harcèlement au travail : #balancetonporc n'a pas réglé le problème
L’institut Ifop dévoile son enquête sur les Françaises et le harcèlement sexuel au travail, première étude menée sur le sujet depuis l’éclatement de l’affaire Weinstein. Eclairant.
L’affaire Weinstein a permis de libérer la parole des femmes sur le sujet du harcèlement au travail, et sans doute de sensibiliser l’opinion publique.
La dernière étude datant de 2014, et face à un manque criant de données fiables, le département « Genre, sexualités et santé sexuelle » de l’Ifop s’est saisi du dossier.
L’objectif ? Mesurer l’ampleur des différentes formes de harcèlement sexuel au travail et leur impact sur la santé des victimes.
Quel type de harcèlement sexuel ?
D’après l’étude près d’une femme sur trois (32%) a été confronté à une situation (au moins) de harcèlement sexuel (au sens juridique).
Que ce soit sur le lieu de travail ou dans les lieux publics, les atteintes les plus répandues sont verbales ou visuelles (sifflements, gestes grossiers…)
La propension d’employées ayant été soumises à des pressions psychologiques du type « promotion canapé » est assez faible (8%).
Ces trois pratiques ne représentent cependant pas la totalité des formes de harcèlement ; un grand nombre de salariées ont été victimes d’actes physiques, qu’il s’agisse de contacts physique légers (11% à plusieurs reprises) ou d’attouchements sur une zone génitale érogène (main aux fesses…) pour 13% d’entre elles.
Cet écart vient d’une méconnaissance de ce qui relève ou non du harcèlement sexuel devant la loi.
Des facteurs « aggravants »
Présent dans toutes les strates de la société, certaines femmes ont toutefois plus de « chances » d’être victimes de harcèlement. La situation géographique ou maritale jouent par exemple un rôle important.
Les célibataires ont par exemple davantage subi de harcèlement à caractère sexuel (35%), elles apparaissent comme vulnérables face à des propositions sexuelles. Elles sont également plus sujettes aux contacts physiques (27% contre 22% pour les femmes en couple) et aux remarques gênantes (30% contre 26%).
D’après l’étude, la région est un facteur déterminant pour le harcèlement potentiel. Les comportements inappropriés sont d’ailleurs bien plus fréquent en région parisienne (38%) qu’en milieu rural (26%).
Dernier facteur « aggravant », le secteur d’activité. Les employées de la fonction publique sont globalement moins touchées (27%) par le harcèlement comparé à celles qui sont titulaires d’un contrat de droit privé (31%). Au sein même de la fonction publique, ce chiffre varie, notamment en fonction du niveau de mixité, du contact ou non avec le publique et du port d’une tenue de travail.
D’autres variables entrent cependant en compte, comme l’orientation sexuelle. Les bis et lesbiennes sont d’ailleurs survictimisées (60% d’entre elles ont déjà été harcelées sur leur lieu de travail).
La catégorie socioprofessionnelle influe tout autant puisqu’il apparait que les professions intellectuelles supérieures sont très sujettes au harcèlement.
La résignation, réaction trop souvent privilégiée
Une faible partie des victimes réagit de manière passive ; sans parler du problème, que ce soit à quelqu’un d’interne ou externe à l’entreprise (entre 32% et 44% selon les situations).
Malheureusement, même si la majorité des personnes touchées décident de se confier à quelqu’un, il s’agit en général d’un proche ou d’un collègue de même rang au pouvoir d’action logiquement limité.
Le fait de s’en remettre à des collègues ou à des amis n’est que rarement provoqué par le harcèlement physique mais bien par les pressions psychologiques (64%) comme les propositions de « promotion canapé ». Malgré tout, dans ce dernier cas, seulement 16% des victimes s’en remettent à un supérieur.
En moyenne, les personnes qui osent aborder le sujet avec un supérieur sont jeunes, diplômées et aisées. Les titulaires de la fonction publique réagissent également plus (26%) que ceux du privé (12%).
Les récents évènements ont beau avoir fait quelque peu exploser le tabou du harcèlement au travail, seule une très faible minorité de victimes prend réellement la parole.
Pour consulter l'étude Ifop, c'est ici. Elle a été réalisée en partenariat avec le site VieHealthy.