expo NFT au club we are_

Finies les arnaques ! Le marché des NFT se prend au sérieux

© Naïs Bessaih / Série « On m’a dit », photographies réalisées avec l’IA, Mr Mousse


Dans la galerie du club we are_, à Paris, le hub artistique 1703 invite artistes et curateurs à partager leur vision de l'art numérique au travers d'une exposition. L'occasion de plonger deux pieds dans l’univers des NFTs, une révolution artistique encore mal comprise.

Entre spéculation et véritable intérêt, beaucoup de curieux s’étaient découvert, en 2021, une passion pour les NFTs, ces «jetons non-fongibles», et s'enorgueillissaient de participer au grand mouvement représentatif du web3, décrété comme étant la nouvelle ère d'Internet. Aujourd’hui, cette frénésie spéculative s’est calmée mais le sigle reste plus souvent associé à des scandales financiers qu’à une révolution numérique en cours. Dans ce contexte, le hub d'art numérique 1703 organise une exposition qui réunit 18 artistes, 9 hommes et 9 femmes, issus du monde entier et attestant de la diversité de l'art NFT. Car malgré tout, ces objets numériques restent l'outil privilégié de certains artistes. Tous ont été invités à proposer des œuvres autour d’un thème commun : celui du portrait, un thème classique de la peinture « qui parle à tout le monde », surtout à notre génération qui a fait du selfie un incontournable de la culture numérique.

Les NFTs, ou le renouvellement des formes créatives

D’emblée, l’exposition de 1703 frappe par la pluralité des techniques proposées. Logiciels 3D, intelligences artificielles, montage vidéo, simple selfie, écrans RVB ou à encre électronique, les œuvres présentent un panel étonnamment large. Marine Bléhaut, par exemple, artiste digitale française, propose un travail singulier en associant des images d’archives avec des fragments de films ou, parfois, des photos générées par IA. Autant de techniques que les NFTs lui ont permises d’explorer : «Quand j'ai vu que je pouvais vendre de l'art sous forme digitale aussi bien que physique, j'ai compris que je pouvais travailler avec d'autres techniques. (...) j'aime faire des mélanges entre art numérique, cinéma et narration (...)» Dans son œuvre Hysteriae, elle présente des images de visages en close-up avec des extraits de documentaires, aboutissant à la réalisation d’un portrait en «film-collage»

Hysteriae par Marine Bléhaut

Toucher un autre public

Si les NFTs renouvellent le regard sur la création numérique, certains artistes considèrent le «mint» - inscription d'un objet sur la blockchain pour garantir sa propriété, son authenticité et sa traçabilité- comme l'opportunité de rencontrer un nouveau public. En commercialisant des œuvres sous cette forme, il devient plus facile d'interagir avec une communauté plus jeune, très connectée, qui accorde à l’art une valeur différente. Comme l’explique l’illustratrice Cosmo Danchin-Hamard : «L’idée, c’est aussi de diversifier les plateformes et l’audience. Et de ne pas être à la ramasse face à de nouveaux marchés économiques et artistiques». La curation de l’exposition s'adapte. En bas, à droite, de chaque descriptif de l'œuvre, un QR code nous donne accès à une plateforme dédiée à son achat.

Les artistes sont aussi nombreux à utiliser les NFTs en tant que dérivés d’une production physique. Cette méthode leur permet, entre autres, de vendre des œuvres auparavant invendables. C’est notamment le cas pour le peintre français Pascal Boyart, connu pour ses fresques murales. Comme l’explique Élisabeth Károlyi, curatrice de l’exposition, ses œuvres, majoritairement réalisées dans des lieux publics, n’auraient pu être vendues s’ils ne les avaient pas fait passer sous cette forme. Aussi, face aux risques de destruction, les NFTs permettent aux fresques de subsister, tant aux outrages du temps qu’aux ravalements de façades.

Le CryptoArt, un marché prometteur ?

La bulle à son apogée en 2021 a fini par éclater et l'achat d'œuvres NFT semble maintenant s’inscrire dans une véritable démarche artistique. «Aujourd’hui, le marché des NFT se stabilise et devient plus mûr » explique Élisabeth Károlyi.  Scénographie travaillée et œuvres minutieusement choisies actent un rapprochement vers les codes conventionnels de la curation. Toutefois, les professionnels et les collectionneurs de CryptoArt restent très éloignés du monde de l’art traditionnel. «Les collectionneurs de NFT viennent en grande partie du monde de l’informatique, certains de l’industrie des jeux vidéo parce que c’est une technologie nouvelle et pas forcément facile d’accès pour le grand public.» poursuit la curatrice.

Par l’organisation de cette exposition, l’une des volontés d'Élisabeth et Géraldine Károlyi, fondatrice de 1703, est aussi de «donner à l’art numérique ses lettres de noblesse». Cependant, ce marché souffre encore de l’absence de passerelle avec le marché de l’art contemporain. Car si l'on assiste à l’émergence de quelques expositions et collectifs consacrés aux NFTs, peu de galeries sont exclusivement dédiées à l'art numérique. «Une minorité de collectionneurs traditionnels se sont mis aux NFTs. Ils sont très importants parce qu’ils contribuent à faire le lien entre le monde de l’art traditionnel et le monde de l’art numérique.» poursuit Élisabeth Karolyi. En attendant que le marché s’élargisse, la volonté des deux sœurs est d’abord de s’adresser aux marques. Collaborer avec des artistes digitaux dans le cadre de campagnes publicitaires ou d’événements devient possible. À l’instar de NF Tiff, le projet de vente d’un collier NFT de la marque de bijoux Tiffany&Co, ce type de dispositifs est peu à peu investi par les grandes entreprises désireuses d’attirer une nouvelle clientèle.

commentaires

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  1. Avatar Bleuette dit :

    Article très bien rédigé qui rend clair et intelligible un phénomène de société peu connu du grand public.grande maîtrise de la langue style soigné. Bravo Flora pour tes débuts dans le journalisme. Longue et belle carrière

  2. Avatar Maxence Grugier dit :

    "donner à l’art numérique ses lettres de noblesse». C'est sympathique pour les artistes de la création en environnement numérique mais l'art dit "numérique" existant depuis les années 60, je pense que ces acteur.trice.s ont déjà leurs "lettres de noblesse". Et "Cependant, ce marché souffre encore de l’absence de passerelle avec le marché de l’art contemporain.", comme tous les arts numériques en général. C'est un problème qui perdure, et qui n'est pas prêt de changer, car, si les artistes contemporains et les artistes numériques partagent bien des formes et un goût pour l'innovation, ils n'ont ni les mêmes inspirations, ni les mêmes approches.

  3. Avatar Roger Rabbit dit :

    lol

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