Le média a su investir la plateforme sociale la plus en vue du moment avec des vidéos délicieusement amusantes et instructives. Produites comme des dessins d'humour animés, ces pastilles possèdent aussi un certain intérêt stratégique.
Mais que vient faire le Washington Post sur TikTok ? À première vue, difficile d’imaginer une compatibilité quelconque entre la plateforme sociale spécialisée dans les vidéos virales un brin ridicules et un vieux média. Pourtant, le compte, géré en grande partie par Dave Jogenson cartonne avec 374 400 abonnements.
Il faut dire que les vidéos réalisées par le journaliste transpirent la maîtrise absolue du format TikTok. La plupart des vidéos prennent une actualité ou un même un évènement historique qui n’intéresse, a priori, pas les jeunes et les détournent à l’aide d’une mise en scène et de fonds musicaux joués en playback. L'un des exemples les plus parlants est cette reconstitution de la première rencontre entre l’informateur du FBI W. Mark Felt, surnommé Gorge profonde, et le journaliste Bob Woodward pendant l’affaire du Watergate (révélée par le journal en 1974).
@washingtonpost Watergate flashback #historybuff #newspaper
Le compte est aussi utilisé pour faire des mini-reportages comme celui-ci, réalisés pendant les primaires démocrates de l’Iowa.
Today’s @washingtonpost TikTok features Iowa caucus goers https://t.co/jyhovnqLR9 pic.twitter.com/o2oXHY6zY6
— Dave Jorgenson ? (@davejorgenson) February 6, 2020
Enfin, et c’est sans doute les plus drôles, Dave Jogenson utilise la plateforme pour illustrer de manière parodique le métier de journaliste et révéler les coulisses du journal.
Based on true events pic.twitter.com/563X0Hvz5n
— Dave Jorgenson ? (@davejorgenson) February 5, 2020
Des vidéos pas si idiotes que ça
Cette maîtrise de TikTok ne vient pas sans une bonne dose de travail : on apprend dans un article de The Atlantic que le journaliste peut passer jusqu’à 4h par jour à créer une vidéo. L’ensemble lui permet de créer ce qu’il considère comme des « cartoons vidéo », qui remplacent les dessins d’humour que l’on a l’habitude de voir dans la presse papier.
Quant à l’intérêt d’investir autant de temps pour assurer une présence sur la plateforme, il est double. Pour Michelle Jaconi, directrice de la branche vidéo du média, les vidéos TikTok sont tout aussi utiles que la section mots croisés qui pendant longtemps fut dénigrée par les lecteurs. À présent, les grilles très réputées du média représentent de véritables entrées d’argent et une source de nouveaux abonnements.
Redonner confiance dans la presse
De plus, la présence du Washington Post sur TikTok permet de rajeunir son audience, qui est en moyenne située au-dessus de 40 ans. Les jeunes de 15 ans ne lisent pas forcément les articles du média, mais ils connaissent la marque et lui font confiance : les vidéos coulisses de Dave Jogenson sont particulièrement appréciées sur la plateforme.
Même si elles sont mises en scène de manière humoristique, elles montrent la réalité du journaliste à son bureau, en train de travailler. « J’ai remarqué très vite que les gens étaient très excités à l’idée de nous voir travailler dans nos bureaux, explique-t-il. Ils ont tous vu à quoi ressemble un reporter en direct à la télévision, mais jamais un journaliste en train de rédiger un article. » Il faut dire que ces scènes de vie permettent d'humaniser un métier considéré encore comme trop opaque, surtout à une époque où les fake news dominent l’espace médiatique.
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