Lola

Clash et astroturfing : comment l'extrême droite fait monter la pression sur l'affaire Lola

© Zoom sur la Une du Parisien

Récupéré très tôt par l’extrême droite, le meurtre de la petite Lola est en train de virer à l’hystérie collective sur les réseaux. Comment en est-on arrivé là ?

Perpétré le 14 octobre, le meurtre de la petite Lola, 12 ans est dans tous les esprits et a provoqué un emballement médiatique rapide et complexe. Alors que l’exécutif a mis du temps à se positionner sur le sujet, l’extrême droite et la droite catholique radicale ont très rapidement récupéré ce sordide fait divers pour occuper le terrain médiatiquement et souffler sur la turbine de l'indignation. Durant le week-end qui suit la découverte du corps, alors que l’enquête est encore en cours, de nombreux comptes spécialisés dans le slacktivisme (l’activisme en ligne) comme celui de Damien Rieu et Samuel Lafont du parti Reconquête !, ou bien les éditorialistes comme Gilles-William Goldnadel vont s’évertuer à faire passer la même idée : les personnes suspectées sont étrangères et n’auraient jamais dû être sur le territoire français. 

Quand les médias nous font du « petit Gregory »

Cette idée s’impose très rapidement après la publication le 16 octobre au soir d’un article du Parisien qui précise pour la première fois l’origine algérienne des suspects et qui publie les quatre prénoms. Le lendemain la machine médiatique est totalement lancée dans une course au scoop. Sur BFMTV, les journalistes seront aussi les premiers à divulguer l’information selon laquelle la principale suspecte faisait l’objet d’une obligation de quitter le territoire, ce qui augmente encore plus les réactions en ligne. La même chaîne de télévision ira jusqu’à traquer les parents de l’adolescente dans la maison de famille dans laquelle ils se sont réfugiés, donnant au passage le nom du village situé dans le Nord-Pas-de-Calais qui sera par la suite envahi par d’autres journalistes. 

L’astrotufing pour les nuls

En plus de marteler sur Twitter cette idée d’un meurtre perpétré par des Algériens, une campagne d’astroturfing (technique de manipulation de l’opinion en ligne) se met en place en coulisse. Le parti Reconquête achète massivement des noms de domaines en ligne comme justicepourlola.fr ou manipourlola.fr. Comme le montre le rédacteur en chef adjoint de BFMbusiness, Raphaël Grably, les mots-clés identiques à ces noms de domaines sont massivement partagés en ligne quelques minutes seulement après l’achat. L’objectif ? Faire signer des pétitions et recueillir facilement des milliers d’adresses mail ; une méthode de récupération de données qui est d’ailleurs illégale. 

Cette récupération politique se fait aussi directement dans la rue. Un camion publicitaire portant une affiche indiquant « le laxisme tue » est loué pour trois jours de circulation dans Paris par l’Institut pour la justice, un think tank d’extrême droite. En Occitanie, des militants reprennent à leur compte les collages féministes en insistant bien sur l’origine des suspects. https://twitter.com/boadiceenne3/status/1582285271206604800

Contre coup médiatique

Après plus de quatre jours de campagne et de récupération malsaine sur les réseaux, les esprits sont forcément chauffés à rouge. En contrefeu de l’activisme d’extrême droite, des hashtags avec les noms de Michel Fourniret ou Nordal Le Landais surgissent dans le top des tendances Twitter. Dans ce contexte explosif, le moindre faux pas peut être fatal. C’est ce qui est notamment arrivé à la dessinatrice de bande dessinée Laurel. Après avoir rendu hommage à la victime en dessinant son portrait, cette dernière le poste sous du dernier tweet du Président de la République qui évoquait la noyade de manifestants algériens lors d’une manifestation le 17 octobre 1961. Le tweet, à présent retiré est interprété comme une mise en parallèle raciste des deux histoires ce qui va déclencher une véritable shitstorm. 

L’exécutif dans le viseur

Face à ce bruit médiatique extrêmement chaotique, le gouvernement a été obligé de se positionner dans un « en même temps » assez maladroit. D’un côté, le Garde des Sceaux Éric Dupont Moretti s’est fendu d’une diatribe dont il a le secret pour dénoncer la récupération politique de l’extrême droite sur cette affaire. 

De l’autre coté le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a déclaré après le conseil des ministres que le gouvernement travaillait « d’arrache-pied pour faire en sorte que les expulsions » soient « suivies d’effets », mais « nous devons évidemment faire mieux ». Une manière comme une autre de montrer que l’activisme le plus répugnant rapporte quand même ses fruits.

David-Julien Rahmil

David-Julien Rahmil

Squatteur de la rubrique Médias Mutants et Monde Créatif, j'explore les tréfonds du web et vous explique comment Internet nous rend toujours plus zinzin. Promis, demain, j'arrête Twitter.
commentaires

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  1. Avatar Anonyme dit :

    Et cet article nous apprend ou nous apporte quoi sur le fond ? Un peu de langage technique sur les réseaux sociaux ? Peu importe le bruit médiatique, ou faire le compte des commentaires des uns et des autres selon leur mouvances politique. In fine votre article nie aussi les faits, avérés et comptabilisés, les OQTF ne sont quasi plus exécutés, la hausses des agressions sexuelles et viols à Paris par exemple est également liés aux mêmes problématiques d'une immigration clandestine et c'est aussi un fait avéré, tout comme les multirécidivistes dont les peines ne sont pas mise à exécution, jusqu'au jour ou le pire arrive. Nous avons un problème en France avec l'exécution des décisions de justice ou préfectorales et c'est une triste et parfois dramatique réalité. Ce sont des faits avérés avant tout, des crimes commis et réels, avant que cela soit de la politique, vous semblez l'oublier pour à votre tour devenir un énième commentateur discutant les attitudes et non plus les faits, c'est du journalisme cela ? Faire votre bruit vous aussi à coup de langage technique commentant les commentaires, n'est ce pas un peu détourné l'attention du vrai problème qui est l'inexécution et ces conséquences que l'on les retrouvent de manière constantes et croissantes dans les tristes faits divers de notre société. Je m'interroge sur votre "apport" d'un point de vue journalistique. Votre ligne éditoriale devrait peut être se dicter en fonction de ce que pense la famille de la petite Lola non ? Avez-vous pris la peine de vous poser cette question ? Je n'ai pas la réponse. Mais elle devrait faire sens je crois.

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