
Ces dernières décennies, des pas de géants ont été réalisés dans la compréhension de la vie végétale : intelligentes, communicantes et capables d’adaptation. Rencontre avec le biologiste Bruno Moulia, après laquelle vous ne regarderez plus votre géranium de la même façon.
Plus récemment, un groupe de chercheurs a prétendu faire de la neurobiologie des plantes, position qui fut immédiatement dénoncée par d’autres scientifiques. « Preuve que la notion d’intelligence n’est pas une notion simple à définir. Pour y parvenir, nous devons la décomposer et sortir de notre posture anthropocentrée. Il est bien évident que nous ne pourrons jamais faire passer un test de QI à une plante. Pour autant, nous pouvons nous pencher sur ses potentiels de cognition. Il existe des faits irréfutables qui prouvent que les plantes sont douées de sens, perçoivent le monde extérieur et y répondent de manière parfaitement adaptée. »
Les plantes sont extrêmement sensibles à leur environnement, elles ont des formes de perception, de vision, de toucher, d’odorat, de goût, et ce sixième sens que l’on oublie souvent : la proprioception, c’est-à-dire le sens de la forme de leur corps. « Si vous fermez les yeux et que vous bougez votre bras, vous savez pertinemment dans quelle position il est. Les plantes ont cette même capacité. Elles perçoivent de plus la gravité, et s’orientent en fonction d’elle – un peu comme nous le faisons avec notre oreille interne. » Pourtant, n’allez pas croire qu’il s’agit juste d’un système réflexe. Les plantes font plus que ça : elles sont capables de réponses qui combinent les différentes sensations pour arriver à une réponse adaptée. « À l’Inra, nous avons beaucoup travaillé sur leur sensori-motricité, cette capacité d’opérer des mouvements à partir de leurs sensations. »
Non, les plantes ne sont pas télépathes, comme le suggéraient les travaux de Cleve Backster : celui-ci prétendait, grâce à un détecteur de mensonge apposé à des plantes, avoir mesuré ce qui s’apparenterait à des émotions, de l’empathie et même de la télépathie… Ses démonstrations ont depuis été réfutées. « En vérité, la plante émet des odeurs, elle diffuse un gaz – l’éthylène – qui est transporté par le vent et capté par les plantes voisines. Grâce à ces messages d’alertes de grand vent ou d’attaques mécaniques, les autres plantes mettent en place un système de durcissement au stress alors même qu’elles n’ont pas été stressées. Par ce biais, elles sont donc capables d’échanger entre elles des informations. Des erreurs ont été commises par le passé car on avait omis le fait que les plantes peuvent s’envoyer des signaux via différents canaux, aériens ou racinaires par exemple. Cela implique pour nous expérimentateurs que nous devons être très attentifs à la manière dont nous les conditionnons en laboratoire, car ceci peut avoir des incidences sur leur capacité ou non à communiquer. »
Peut-on parler de synapses végétales ? L’hypothèse a été émise il y a une dizaine d’années, mais aucune découverte ne peut encore l’affirmer. À ce jour, des recherches sont en cours, notamment au niveau du phloème, un tissu particulier de la plante, très différent a priori du système nerveux. Quoi qu’il en soit, les plantes ont sans doute développé une organisation interne très différente de la nôtre.
« Le corps humain renferme différents systèmes – squelettique, musculaire, vasculaire, nerveux, lymphatique… Les plantes, elles, font avec un même système plusieurs choses à la fois. Le phloème, par exemple, est un système vasculaire qui permet de transporter la sève élaborée et en même temps d’envoyer des signaux électriques. Au contraire de nous, elles font tout à l’économie : chacun de leur tissu est capable de combiner différentes actions. Parce qu’elles sont très parcimonieuses, et font beaucoup avec peu, autopsier une plante est plus difficile : une fois que l’on a trouvé la fonction d’un système, on ne sait pas s’il en remplit d’autres. »
PARCOURS DE BRUNO MOULIA
Directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), laboratoire Physique et physiologie Intégratives de l’Arbre en environnement Fluctiant (PIAF), Inra et université Clermont-Auvergne (UCA), Clermont-Ferrand, Bruno Moulia est l’un des pionniers de la biomécanique et de la mécanobiologie végétales.
C'est impressionant, ce que je viens de lire. Si les développeurs peuvent capitaliser dans un logiciel ou applications spécifiques. Ce serait bien