
Depuis la pandémie, la consommation d’hallucinogènes au sein de la génération Z a sensiblement augmenté. Et elle ne montre aucun signe de redescente.
Que l'on parle microdosing de psilocybine ou soin de la dépression à la kétamine, les produits hallucinogènes ont connu au cours des cinq dernières années un spectaculaire pic de consommation. Sur cette même période, la consommation d'alcool a nettement reculé, et ce alors qu'un jeune sur cinq expérimente le microdosage de psychédéliques durant le confinement. Des drogues dites « insociables » pour des années peut-être peu enclines aux relations. Mais aujourd’hui encore, l’usage de drogues hallucinogènes (LSD, champignons magiques, 2C-B, DMT et kétamine) dépasse la MDMA et l’ecstasy sur le podium des substances les plus consommées. Serait-ce uniquement car les jeunes désertent les bars et les clubs (l’entrée est trop chère) pour se glisser au lit à 21h ?
« Pas besoin de se foutre en l’air pendant des heures »
Non, c’est juste qu’ils font la fête différemment. En substituant par exemple la 2C-B, une drogue psychédélique synthétique qui offre un mélange d'effets hallucinogènes et stimulants, aux traditionnels MDMA et ecstasy. Parmi les avantages recensés : des montées plus douces, des descentes moins brutales, et des prix plus avantageux. En Grande-Bretagne, un gramme de kétamine coûte entre 20 et 30 £, soit moitié moins que la cocaïne. La durée des effets serait aussi plus facile à juguler : « Avec la ket, tu n’as pas besoin de te foutre en l’air pendant des heures comme quand tu prends une pilule », rapporte Ricky*, 25 ans, à Dazed. (Récemment, la kétamine a toutefois été mise à l’amende sur Twitter par le DJ londonien salute, qui avançait qu’il y avait « bien trop de ket sur les pistes de danse britanniques ». En tant que drogue dissociative pouvant produire un sentiment de détachement de l'esprit et du corps, elle conférerait parfois selon le DJ des allures de zombies aux consommateurs.)
Selon Paul North, expert en réduction des risques, il est logique que les consommateurs se tournent vers les hallucinogènes pour faire la fête, d'autant plus que les dealers proposent désormais une grande variété de produits. « Le marché de la drogue s’est vraiment ouvert aux jeunes, surtout juste avant la pandémie », explique-t-il à Dazed. « Les dealers ont élargi leurs menus – ceux qui vendent de l’herbe vendront probablement aussi du LSD et des champignons. Ils vendent à peu près n’importe quoi. » Un accès facilité par la démocratisation de Telegram et du Dark Web.
Des drogues vues comme curatives
Pour l’expert, l'essor des hallucinogènes est aussi imputable à un changement de perception à l’égard de ces drogues, désormais vues comme « plus curatives que nocives ». Il précise : « Sur le plan social et culturel, nous assistons à davantage de recherches sur les hallucinogènes et les thérapies assistées par les psychédéliques, ainsi que sur les effets positifs que ces drogues pourraient avoir sur la vie des gens. Ce genre de récits touche les jeunes, en particulier ceux qui sont très actifs sur les réseaux sociaux et qui s’intéressent également à la drogue. » C’est le cas d’Alex, 24 ans, qui consomme des hallucinogènes à des fins de développement personnel là où il sent à l’aise, à la maison ou chez des amis. Pareil pour John*, 20 ans, qui explique que les champignons l’ont aidé à devenir plus empathique : « Ils m'ont fait réfléchir à mes actions et mes comportements passés et m'ont donné envie de les améliorer. Mes expériences avec les psychédéliques ont été variées et différentes à chaque fois, d'euphorisantes à profondément troublantes. Mais aussi effrayantes qu'elles aient parfois pu être, j'ai toujours eu l'impression d'en ressortir en meilleur état. »
*Le prénom a été modifié
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