
Conflit israélo-palestinien, guerre en Ukraine, inflation et catastrophes naturelles. C'est « l'automne au fond du seau ».
À la machine à café ou dans l’ascenseur, les regards hébétés se croisent, les mots sont articulés avec difficulté. La mine fatiguée, les gens haussent les épaules, soupirent et peinent à terminer leur phrase. Les gens Les réseaux ont consacré au phénomène une formule : « L'automne en PLS », leitmotiv de la saison. Censée capturer l’esprit du moment, l'expression née en ligne est tapée mollement sur les claviers d’internautes au bout du rouleau. Après avoir rêvé d'étés chauds et sauvages, il semblerait que la morosité soit de rigueur, même chez les filles qui aiment l'automne.
Au fond du trou, voilà notre place
Sur TikTok, l’expression prolifère depuis fin septembre. On la retrouve sous le hashtag #rockbottomautumn, qui pourrait se traduire par « automne au bout du rouleau » ou « automne au fond du seau ». Bref, une saison qui nous met à plat et nous pousse à bout. Non pas à cause du froid humide et glaçant des sanglots longs des violons de l'automne, mais du flux constant d'actualités violentes et sordides. Une fatigue informationnelle qui touche 53 % des Français, provoquant angoisses, abattement et parfois insomnies. En ligne, les internautes se filment aussi en direct de leur bagnole, le regard dans le vide, au son d'un morceau autotuné, sur des extraits de paroles type « je n'ai plus de larmes à pleurer » ou encore « mais où allons-nous comme ça ? » accompagné de la légende ironique : « au top ». D'autres optent pour un constat plus sobre à l'instar de Danyell Amee qui explique : « Comprenez-moi bien, j'aimerais beaucoup passer un automne de déglingué, mais je vis plutôt un automne au bout du rouleau. Et je pense que c'est notre cas à tous ». D'autres encore adoptent une posture plus sarcastique, affichant leur toute dernière coupe de cheveux audacieuse (foutu pour foutu) ou leur prestation artistique mi-mélancolique, mi-comique. C'est le cas de JaneWithaT, qui partage sur fond de Taylor Swift une chorégraphie déroulée avec en arrière-plan un coucher de soleil orangé agrémentée de la légende : « Ambiance : au bout du bout, mais on en fait de l'art. »
Le vent a tourné
Le moins que l'on puisse dire, c'est que le vent a tourné. Après la brève effervescence post-déconfinement annonciatrice d'un été orgiaque, le soufflé est vite retombé, laissant place à climat relativement terne. En France, les passages aux urgences des 15-17 ans pour idées suicidaires et troubles anxieux sont en hausse, indique un rapport. D'après une récente publication de l'UNICEF, plus d’un adolescent sur sept dans le monde vivrait avec un trouble mental diagnostiqué. Des maux que l'on trouve également chez des individus plus vieux. À Strasbourg, l’association Ithaque s'attache depuis 2014 à suivre des hommes âgés de 18 à 35 ans qui ne sortent plus de chez eux et vivent claquemurés dans leur chambre, à la façon de la première génération d'hikikomoris japonais aujourd'hui septuagénaires. Un phénomène difficile à quantifier, mais qui irait croissant selon l'organisme.
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