YouTuber El Rubius

Andorre : les youtubeurs espagnols alimentent une crise du logement

© El Rubius via YouTube

Pourquoi certains youtubeurs s’installent-ils en Andorre ? Pour payer moins d'impôts. Une attractivité qui a conduit le législateur à réglementer.

Andorre (où il se dit qu'il y aurait plus de voitures que d'habitants) est un micro-État montagneux coincé entre la France et l'Espagne. Selon le site Andorra Partner, la principauté serait devenue le repaire des youtubeurs espagnols les plus suivis. Mais qu’y a-t-il en Andorre qui attire tant ? Ses stations de ski, ses boutiques hors taxes, une des espérances de vie les plus longues au monde... sûrement. Mais pas seulement. L'État offre également une fiscalité avantageuse, stimulée par de faibles impôts et un niveau élevé de secret bancaire.

Des atouts financiers qui attirent les youtubeurs, mais pas que

Si il est vrai que la faible fiscalité du micro-État a toujours attiré les plus fortunés, l'arrivée récente des plus grands créateurs espagnols de contenus (principalement des gamers) a contribué à braquer les projecteurs sur la principauté. Les propos lors d’un direct sur la plateforme Twitch d'El Rubius – suivi par ses 40,3 millions d’abonnés sur YouTube – ne sont pas passés inaperçus : « Cela fait dix ans que j’ai une carrière YouTube et dix ans que je paie mes impôts en Espagne. Je sais qu’il y aura des gens pour me critiquer, mais souvent ils parlent sans savoir », s'est justifiée la star âgée de 30 ans. Une déclaration qui a eu un effet boule de neige selon M. Bartolomé, secrétaire d’État à l’économie de la principauté : « En situant Andorre, certains ont pu le découvrir comme un pays qui est juste à côté de l’Espagne avec des conditions de vie qu’ils considèrent comme optimales. » Depuis, traders, influenceurs, mais aussi sportifs de renom ont emboîté le pas des « gamers ». Preuve de l'engouement, les agences facilitant les expatriations vers ce petit pays tel que Set up Andorra sont très sollicitées : « Il y a beaucoup de youtubeurs français qui me contactent, qui étaient à Dubaï, qui trouvaient ça génial, mais maintenant, ça les fatigue et ils visent l’Andorre », se réjouit Virginie Hergel, une Française installée à Andorre depuis vingt-deux ans. Interrogée par L'Union, elle n'hésite pas à souligner « l’anonymat et la qualité de vie » dont bénéficient certaines de ces stars.

Limiter l'accès à la propriété

Si cette nouvelle population est pour M. Bartolomé une opportunité de « diversifier une économie très dépendante du tourisme, de la neige et du commerce », son arrivée fait polémique. En cause : une hausse de plus de 30 % des prix de l'immobilier obligeant les habitants les moins aisés à traverser la frontière vers l'Espagne. Mais ce n'est pas tout. L'attrait croissant d'Andorre pourrait également menacer une de caractéristiques uniques de la principauté : son statut actuel de seul État ayant le catalan comme unique langue officielle. Une spécificité menacée par l'arrivée massive de nouveaux arrivants parlant l'espagnol castillan. Pour répondre à ces deux préoccupations, les législateurs andorrans viennent de proposer des mesures radicales. Tout d’abord, une interdiction, pour tout non-résident de moins de 3 mois, d'acheter une propriété. Une loi provisoire qui devrait être remplacée à court terme par une taxe sur tous les achats immobiliers des non-résidents. Les recettes de cette taxe seront destinées à la « construction de logements locatifs abordables ». Le Conseil général prévoit également d'exiger que tous les candidats au séjour passent un examen en catalan afin d'encourager les migrants à adopter la culture locale et à préserver la langue. Des propositions qui ne font pas l'unanimité, certains craignant qu'Andorre ne se transforme en un Monaco.

Étrangement, la taxe foncière proposée par le législateur ne semble pas avoir ébranlé les nouveaux expatriés fortunés (peut-être parce qu'elle n'est pas assez stricte pour contrebalancer les nombreux avantages de la résidence fiscale andorrane). En revanche, l'examen en catalan a fait réagir. C'est le cas par exemple du streamer Agustin51 (4,71 millions d'abonnés sur YouTube), qui dans une récente vidéo a proclamé que le gouvernement était une « dictature » pour avoir imposé un cours de langue gratuit de 30 heures pour les non-résidents.

Le difficile équilibre des micro-États à la fiscalité alléchante

Andorre n'est pas le seul micro-État européen qui peine à trouver un équilibre entre une fiscalité attractive et l'exode des habitants à faibles revenus. Au Luxembourg, où il n'est pas interdit aux non-résidents d'acheter une propriété, l'envolée des prix de l'immobilier empêche les travailleurs à faibles revenus de résider à proximité de leur lieu de travail. La politique luxembourgeoise de gratuité des transports en commun a été en partie introduite pour aider les travailleurs transfrontaliers à se rendre quotidiennement au Grand-Duché. Le Liechtenstein réserve quant à lui l'accès à la propriété à des résidents de la principauté depuis au moins trois ans et sous réserve d'une autorisation du gouvernement.

Peggy Baron

Chaque jour je m'installe à la terrasse de l'actu et je regarde le monde en effervescence. J'écris aussi bien sur les cafards cyborg que sur le monde du travail, sans oublier l'environnement et les tendances conso.

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