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Transmission d'émotions : quand le cerveau d'un inconnu nous aide à aller mieux

Oubliez les objets connectés et autres trackers d’activité. Pour aider à se soigner ou à se sentir mieux, les chercheurs raccordent les humains entre eux. Plongée dans le partage d’émotions 4.0.

Pour comprendre comment fonctionne le cerveau, la science ne passe pas par quatre chemins. Elle utilise traditionnellement des interfaces permettant de connecter notre cortex à des machines. Appelées BCI (pour Brain Control Interface), ces capteurs tentent de comprendre la manière dont nous fonctionnons et décortiquent l'activité cérébrale pour comprendre comment se forment nos émotions.

Des chercheurs vont désormais plus loin. Ils font le choix de connecter les humains entre eux - non plus à des machines- afin qu'ils partagent des émotions fortes comme la joie ou la souffrance. Aisément transmissibles, ces états peuvent être compris de tous. Sans langage, sans paroles, sans même se voir. Ressentir la douceur d’une main posée délicatement contre la sienne, comprendre la détresse d’une personne en la serrant. Autant d’émotions qui transitent entre humains et dont le fonctionnement exact n’est pas encore connu des scientifiques.

Remy Ramadour est un précurseur en la matière. Sa société, Ullo, raccorde les humains entre eux pour les faire vivre en symbiose. Il nous explique en quoi consistent ses recherches.

Comment raccorde-t-on les humains entre eux ?

Remy Ramadour : Notre spécialité est d’investiguer le champ des neurosciences dans le domaine des interactions sociales. Il s’agit d’opérer un couplage cérébral et cardiaque entre deux êtres vivants. On ne parle pas d’implanter des capteurs directement dans le cerveau mais de faire se coordonner deux rythmes cardiaques pour qu’ils forment une symbiose.

N’ayant pas de cobayes sous la main, nous sommes parvenus à faire coïncider les battements de cœur d’un humain et d’un chat. Une fois cette synchronisation opérée, ces deux êtres vont partager un ensemble d’émotions qui leur sont propres. L’une des deux personnes va ressentir une douleur et va la transmettre à l’autre. De fait, celui qui reçoit cette information va également la prendre à son compte, réduire cette même douleur et contribuer à sa guérison.

Pour parvenir à ces résultats, nous travaillons principalement sur le rythme de respiration. L'objectif est d'établir ce que l’on appelle une cohérence cardiaque entre deux individus. Une fois ce lien tissé, deux individus peuvent ressentir des émotions identiques.

Quels domaines sont concernés par ces avancées technologiques ?

Remy Ramadour : Le biofeedback collaboratif est un domaine encore relativement peu approché par la science mais il permet de nous ouvrir à de nombreux domaines. Etablir un lien physiologique entre deux personnes peut devenir vital pour une personne qui travaille quotidiennement au contact des animaux. Un écuyer pourrait mieux comprendre son cheval, un vétérinaire appréhender la douleur d’un chien ou d’un chat…

La dimension sportive est également importante. Nous travaillons sur l’exaltation sportive, lorsqu’elle est provoquée par un événement. Prenez l’exemple d’une foule qui se soulève après qu’un but soit marqué au football. Nous tentons de capturer cette émotion pour la partager à un autre public, à l’autre bout du monde. Une équipe sportive pourrait également profiter de ces outils. Une team dont les résultats ne seraient pas suffisants par manque d’esprit collectif pourrait travailler sur des exercices de familiarité, de partage de soi voire à des rapprochements physiques.

Plus récemment dans la pop culture, la série Sense 8 des sœurs Wachowski a exploré ce terrain. Elle a démontré que les gens pouvaient partager individuellement des émotions collectives en formant une sorte de réseau social évolué. Nous n’en sommes pas encore à ce point mais ces sentiments permettent de recréer du commun, de remettre du lien entre les personnes.

En matière de santé, comment vos travaux peuvent profiter aux personnes en souffrance ?

Remy Ramadour : Dans nos premières recherches, nous utilisions des outils de mesure physiologiques nous permettant de comprendre une émotion. Nos sujets étaient principalement des personnes âgées ou des autistes. Elles étaient dotées de capteurs relevant leur rythme respiratoire. Ces éléments étaient connectés à un décor en sable à modeler (un matériau souple). Chaque respiration faisait évoluer ce même décor, créant de fait une interaction entre un objet et une personne dans le but de contrôler son émotion et de se concentrer sur des idées positives.

Nos recherches en matière de synchronisation biologique se portent à présent sur la relation mère/enfant. Des gestes d’un parent vont renforcer certains traits ou inhiber des maux chez les plus jeunes. On pense naturellement au peau à peau ou au simple fait de se tenir la main mais cela peut aller plus loin.

Connecter les humains revient-il également à les rendre plus résistants aux maux dont ils souffrent ?

Remy Ramadour : Le principe directeur de nos travaux est d’obtenir des comportements alternatifs par rapport à l’état d’une personne. Un autiste ne se concentrera plus sur des pensées rémanentes négatives lorsqu’il fixera son attention sur une autre activité. Le patient va ainsi développer des mécanismes naturels de défense et débloquer des comportements physiologiques internes pour qu’il se protège.

Etant moi-même cobaye de plusieurs expériences conduites par Ullo, j’ai par exemple développé une capacité d’écoute de la respiration des autres. En écoutant le rythme respiratoire d’un correspondant, ses intentions de voix, son intonation, je suis à même de déterminer certaines de ses principales émotions. Ce qui n’est que du ressenti peut se transformer en véritable donnée scientifique, lorsque l’on ajoute des capteurs et autres outils de mesure.

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commentaires

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  1. Avatar Thinkgreen dit :

    Article pas si évolutionnaire que ça pour ma part.. (et manquant de profondeur scientifique)

    Deux points intéressants notés de mon côté :
    L'importance de la lecture des émotions innée, qui peut être travaillée soi-même.

    Le lien autisme et rétroaction négative est aussi intéressant
    => importance de l'éducation à une gestion positive des émotions (prévention des conflits, etc..)

  2. Avatar Anonyme dit :

    Rien de nouveau. L haptonomie permet au futur père de se connecter à son épouse au moment de l accouchement et de partager et soulager les douleurs de la maman

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