Sam Bankman-Fried entouré de menottes

Sam Bankman-Fried coupable : le premier d’une longue série de patrons de la crypto à tomber

Sam Bankman-Fried, PDG de FTX, a été reconnu coupable. Et il ne sera sans doute pas le dernier dans le monde crypto. Un « secteur où règnent la fraude, l'escroquerie, les faillites et le blanchiment d'argent », selon les régulateurs américains.

Sam Bankman-Fried est-il le vilain petit canard dont l’industrie des cryptomonnaies devait absolument se débarrasser ? Ou est-il symptomatique de l’industrie tout entière ? Son verdict rendu le 2 novembre après des délibérations rapides (moins de 5 heures), n’a pas étonné grand monde. Selon le jury, le patron de la plateforme d’échange FTX est bien coupable des milliards de dollars perdus par ses utilisateurs, qu'il a trompés en plaçant leur argent dans des investissements risqués. Il encourt jusqu’à 110 ans de réclusion criminelle. L’annonce de la peine est fixée pour le 28 mars 2024. 

Pendant les cinq semaines d’audience, les témoignages accablants à l’encontre de l’entrepreneur se sont succédé, notamment ceux venant de ses ex-collègues. La dernière semaine, l’accusé a pris le risque de témoigner à son propre procès. Sa posture faussement ingénue et amnésique, tout comme son évitement des questions des avocats ont fini de convaincre le jury de sa culpabilité. 

Encore une énième histoire de patron déchu ? Oui... mais pas seulement

L’industrie de la tech est habituée aux histoires de patrons un jour adulés puis relégués à la case escrocs. Ce fut le cas d'Elizabeth Holmes, la fondatrice de Theranos, ou encore d'Adam Neumann, le PDG de WeWork. Souvent, plutôt que d’interroger le financement et le fonctionnement de l’industrie de la tech, leurs chutes sont classées comme des histoires individuelles, des contre-exemples à ne pas reproduire. 

Certains acteurs et reporters spécialistes de l’industrie tentent de reproduire ce narratif, en estimant que SBF est une erreur du système, un escroc non symptomatique du reste du secteur, comme le rapportait cet article de Wired

 « L’une des nombreuses fraudes de ce secteur » 

Pourtant SBF n’est pas une exception, mais bien « l’une des nombreuses fraudes de ce secteur », souligne Zeke Faux, journaliste pour Bloomberg et auteur de Number Go Up, une enquête sur le monde des cryptos. « Toutes les entreprises que j’ai rencontrées dans le cadre de mes recherches sont soit en faillite, soit elles attendent un procès ou ont déjà été jugées. » 

Binance, l’autre grande plateforme d’échanges, rivale de FTX, est accusé de 13 chefs d’inculpations par la SEC. Le gendarme de la Bourse américaine a aussi porté plainte contre Coinbase. Parmi ceux qui risquent le plus gros, on trouve Alex Mashinsky, patron de la société de prêt Celsius Network, qui est accusé d’avoir gonflé artificiellement le prix de son token. Son procès criminel est annoncé pour septembre 2024. Politico rappelle que depuis la chute de FTX, la Securities and Exchange Commission a engagé plus d'une vingtaine d'actions en justice liées aux cryptomonnaies. Son président, Gary Gensler, a qualifié cette activité de « secteur où règnent la fraude, l'escroquerie, les faillites et le blanchiment d'argent ».

« Nous aurons assez de menottes pour tous »

Les mots du procureur général Damian Williams prononcés à la suite du verdict laissent également peu de place au doute quant au traitement qui sera accordé aux fraudeurs de l’industrie. « Sam Bankman-Fried a perpétré l'une des plus grandes fraudes financières de l'histoire des États-Unis – un stratagème de plusieurs milliards de dollars destiné à faire de lui le roi de la cryptomonnaie – mais si le secteur de la cryptomonnaie est nouveau, et si les acteurs comme Sam Bankman-Fried le sont aussi, ce type de corruption est vieux comme le monde. (...) Cette affaire s'est déroulée à la vitesse de l'éclair – ce n'était pas une coïncidence, c'était un choix. C’est un avertissement à tous les fraudeurs qui se croient intouchables, qui pensent que leurs crimes sont trop complexes pour que nous les attrapions, qu'ils sont trop puissants pour être poursuivis ou qu'ils sont assez intelligents pour se tirer d'affaires s'ils sont pris. Ces personnes devraient y réfléchir à deux fois et cesser leurs activités. Et s'ils ne le font pas, je promets que nous aurons assez de menottes pour tous. »

Marine Protais

À la rubrique "Tech à suivre" de L'ADN depuis 2019. J'écris sur notre rapport ambigu au numérique, les bizarreries produites par les intelligences artificielles et les biotechnologies.

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commentaires

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  1. Avatar Héloise Mreal dit :

    En gros, Bankman explique qu’il a vérifié la légalité de certaines des décisions qui lui sont reprochées.
    Non, en gros, il explique qu’il a cherché à frauder un maximum en restant le mieux possible dans les clous.
    Cela me rappelle beaucoup M. Joao Severino, Rafael Gold et Horst Jicha. Les criminels d'usitech qui ont fraudé plusieurs au Nouveau-Brunswick.

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