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La Nature a des droits et elle gagne déjà des procès. La preuve dans l’actu.

© Szabolcs Toth

La parole est à la défense… de la Nature !

C’est en 1972 qu’apparaît pour la première fois l’idée de reconnaître la nature comme sujet de droit. Pour faire capoter le projet de Walt Disney Company qui souhaitait construire une station de ski dans la vallée de Mineral King, une région réputée pour ses séquoias, le juriste Christopher Stone s'est fendu d’un article intitulé « Les arbres doivent-ils pouvoir plaider ? » . Quelque 50 ans plus tard, les droits de la nature n’ont jamais été aussi proches d’être reconnus plus largement. Et l’actualité le prouve.

Quand la Nature gagne

Depuis 2008 en Équateur (avec les droits de Pachamama, la « Terre Mère » ) et depuis 2009 en Bolivie, les droits de la nature sont inscrits dans la Constitution. Le Costa Rica a spécifié dans la sienne un « droit à un environnement sain et écologiquement équilibré » … dès 1994. Ce qui porte les activistes à poursuivre, au nom de la Terre, les entreprises voire les gouvernements. En 2011, un premier procès est instruit par l’ONG Global Alliance for Rights of Nature contre un constructeur d’autoroutes qui songe à bâtir à travers le fleuve équatorien Vilcabamba. Le fleuve gagne. 

Ces droits émergents font jurisprudence : en 2017, en Inde, en Colombie et en Nouvelle-Zélande, 4 fleuves remportent aussi leur procès. En Nouvelle-Zélande, cette victoire est couronnée par la nomination de deux « gardiens » de la rivière, un représentant des indigènes maoris et un représentant du gouvernement. 

Le fleuve Vilcabamba gagne son procès en 2011 (Crédits : Wikimedia)

Plus récemment, en février 2021, le cas s’est posé cette fois-ci sur le continent nord-américain où la rivière Magpie s’est vu accorder le statut de personnalité juridique, sous la vigilance de « gardiens » issus des collectivités locales et des Innus (peuple autochtone qui vit dans la région).

En Europe, c’est en Corse qu’une entité naturelle s’est vu attribuer « officieusement » une personnalité juridique. À l’initiative, un collectif d’associations locales, ainsi que l’association Notre Affaire à Tous (qui avait, pour rappel, attaqué l’État français en justice pour inaction climatique) ont composé en juillet dernier une Déclaration des droits du fleuve Tavignanu sur la suggestion de la juriste Valérie Cabanes. La prochaine étape est de lui donner une valeur juridique, une première sur le territoire français. 

Panama : humains, nature, même combat

Un an durant, l’Assemblée nationale du Panama a débattu. Mais là aussi, la nature a obtenu gain de cause. Une loi vient tout juste d’être adoptée – et entrera en vigueur en 2023. Elle accorde aux entités naturelles (arbres, fleuves, coraux, montagnes, au Vivant dans son ensemble) les mêmes droits que les humains, les entreprises et les gouvernements. Les humains et les non-humains forment désormais « une communauté unique, indivisible et autorégulée d’êtres vivants et d’écosystèmes liés les uns aux autres », peut-on lire dans la loi

Cette semaine, le 12 avril 2022, le lac Mary Jane a déposé plainte à la Cour de justice de Floride, de concert avec les marais de Crosby Island et deux tourbières, contre un projet immobilier. Dans les colonnes du New Yorker, on apprend comment Happy, un éléphant qui vit dans un zoo dans le Bronx à New York et Justice, un cheval appaloosa ont précédé le fleuve auprès des tribunaux américains et porté plainte contre leur propriétaire pour négligence. Entretemps, au Chili où est composée actuellement une nouvelle Constitution, 6 articles reconnaissant la crise climatique, les devoirs du gouvernement vis-à-vis de la nature ou les droits des animaux viennent d’être approuvés en première lecture. Le chemin était long – 50 ans, rappelez-vous Christopher Stone et le droit de plaider aux arbres ! Mais définitivement, la nature contre-attaque et commence à être entendue.

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