
Surmédication, contention, hospitalisations forcées, maltraitances psychologiques... les patients racontent les abus qu’ils ont vécus au sein du système psychiatrique sur TikTok et Instagram.
« Salut, aujourd’hui on se retrouve pour une nouvelle tier list des moyens les plus inhumains pour maintenir quelqu’un dans le système psychiatrique. On commence avec le fait de ne jamais t’écouter quand tu parles des effets secondaires de ton traitement. »
Avec son style de montage hyperactif et un débit de parole digne d’une sulfateuse, Slave (@letsloveslave) a connu un succès fulgurant sur les réseaux. Son sujet de prédilection n’est pourtant pas très courant. Slave évoque sans tabou les violences psychiatriques qu’il a pu subir. Et c’est loin d’être le seul.
Renaissance de l’antipsychiatrie sur les réseaux
Manque d’écoute, absence de psychothérapie, hospitalisations sous contrainte et privations de liberté : sur TikTok, Instagram, Twitch ou YouTube, une nouvelle vague de critique radicale de la psychiatrie prend forme, au même titre que les contenus liés à la santé mentale. Le mouvement de l’antipsychiatrie – qui critique les pratiques psychiatriques traditionnelles en dénonçant la médicalisation excessive et la stigmatisation des personnes en souffrance mentale, historiquement associé à des figures de grands intellectuels comme le psychiatre et professeur émérite de psychiatrie hongrois, Thomas Szasz, ou le philosophe français Michel Foucault – renaît sur les plateformes numériques, porté par des créateurs de contenu qui allient divertissement et militantisme.
Avec des vidéos courtes, souvent empreintes d'humour noir ou de sarcasme, des TikTokeurs comme Slave (@letsloveslave), mais aussi d’autres créatrices françaises telles qu’Alice (@fleeseedy) ou Caroline Gonzalez (@la_caroligue), suscitent des dizaines de milliers de vues. Ces contenus naviguent entre l’analyse personnelle et la critique institutionnelle, résonnant auprès d’un public souvent jeune et sensible à la question de la santé mentale, provoquant discussions et partages d’expériences avec les abonnés.
Un format percutant pour des idées complexes
Slave, suivi par 30 800 abonnés, utilise dans ses vidéos un format particulier : les tier lists. Il s’agit d’un classement hiérarchisé d'éléments (personnages, jeux, films, etc.) selon leur qualité ou leur popularité, et qui, en comparant des éléments, est fait pour susciter des débats. « J’aime bien le format des tier lists, donc je l’ai utilisé assez naturellement, ça s’adapte un peu à tout et ça permet de faire passer un message assez simplement en utilisant aussi l’humour », explique le créateur de contenus.
Les sujets abordés sont variés et font référence à des problématiques précises liées aux mauvaises prises en charge en psychiatrie. On peut visionner des tier lists sur « les pratiques psy les plus déshumanisantes » ou bien sur les « effets secondaires des médicaments ». Et si Slave a décidé de parler de ces sujets, ce n’est pas par hasard : « J’ai connu le système psychiatrique très jeune et j’ai subi de nombreux abus. Par exemple, on m'a prescrit des médicaments sans même m’expliquer les effets secondaires, qui sont parfois très lourds. »
Selon un rapport d’Amnesty International publié en 2021, les personnes hospitalisées en psychiatrie signalent régulièrement des abus, allant de la contention forcée à la violence psychologique. Au-delà du mouvement lui-même, l’antipsychiatrie numérique reflète une interrogation plus large sur la gestion des troubles mentaux dans nos sociétés modernes.
ANTIIIIIIII PSYCHIATRIQUEEEEEEE VIVEE CONTROLE ET SLAVE!
Vive l'antipsichatrie mes baka ça bouge pas