
Que faire, face aux IA et à la perte de nos emplois ? Selon Kim Goldstein, fondatrice de la société Koa Koa, il faut transformer nos enfants en « makers ». Et ça passe - breaking news - par les jeux, l’éducation et la créativité.
65% des enfants scolarisés aujourd’hui exerceront des métiers qui n’existent pas encore avançait le Forum économique de Davos début 2018. Un nombre que reprend à son compte Kim Goldstein, fondatrice de Koa Koa. Lancée il y a trois ans et spécialisée dans les loisirs créatifs, l’entreprise propose aux enfants de fabriquer leurs propres jouets à l’aide de kits de pièces détachées. Lunettes pour voir comme les animaux, tee-shirts à colorier pour découvrir ses organes, dessins à encre conductrice ou sonnettes à engrenages à fabriquer soi-même… « ces jeux sont une invitation à percer le mystère des objets qui les entourent » , rapporte cette dernière.
En filigrane, un enjeu de taille : inciter les générations futures à créer et innover dans un environnement de plus en plus automatisé. Épurée et minimaliste, l’esthétique de ces jouets permet en effet aux enfants de voir, concrètement, ce qu’il se passe à l’intérieur et la manière dont ils sont fabriqués. On n’est pas très loin du « Comment ça marche ? » de Michel Chevalet, l’aspect « maker » et créatif en plus.
Apprendre à faire plutôt qu'à consommer
« J’ai eu l’idée d’adapter un concept américain au marché français au moment où c’était en plein boom », explique Kim Goldstein. « Ayant moi-même grandi dans une famille de créatifs et vécu aux États-Unis, je me suis rendu compte que les loisirs d’apprentissage créatif n’étaient pas du tout développés en France, qu’il y avait des choses à faire ».
Surfant sur le mouvement « maker » né en Californie dans les années 2000, cette ancienne de Sciences Po prône aujourd’hui une approche plus aboutie de la mouvance DIY ( « Do it yourself » ) : « Il n’y a pas si longtemps, on savait encore construire une maison, conserver de la nourriture… Aujourd’hui, nous sommes devenus des consommateurs plus que des faiseurs. L’idée de Koa Koa, c’est d’apprendre aux enfants à fabriquer plutôt que de systématiquement consommer ».
Les « STEM & STEAM TOYS » : un mouvement anglo-saxon qui peine à se frayer un chemin en France
« Face à l’automatisation et à la disparition de certains emplois, la compétence clé d’aujourd’hui, c’est notre capacité à innover, à faire ce qu’une machine ne pourra pas faire », poursuit Kim Goldstein. Elle cite, à titre d’exemple, les avancées des cursus d’enseignement anglo-saxons. « Aux États-Unis, on prône une approche créative et multidisciplinaire des sciences. Il y avait les enseignements STEM (Science, Technology, Engineering, Mathematics), il y a aujourd’hui les STEAM avec la lettre A pour « Art » en plus » .
En découle la tendance des « STEM toys » et « STEAM toys » ou « smart toys » , des jeux pédagogiques qui apprennent aux enfants à innover et à faire preuve de résilience face à un problème. Code, robotique, construction, sciences… il y en a pour tous les goûts. « Je suis fascinée de voir à quel point les Anglo-saxons sont en avance. Quand je rencontre certains acheteurs en France, je remarque que peu d'entre eux connaissent ces catégories de jeux. Chez nous, on en est encore à compartimenter sciences, art et créativité », se désole Kim Goldstein.
Depuis quelques années, le mouvement prend de l’ampleur et séduit de plus en plus de familles. Dans un sondage mené par BSM Media et Digital Kids Media, on apprend que 65% des parents sont prêts à payer plus cher pour un jouet connecté intelligent que pour un jouet traditionnel. Biberonnés aux nouvelles technologies, les parents d’aujourd’hui voient leurs décisions d’achat changer pour leurs enfants. On veut désormais du divertissement avec plus d’huile de coude dedans.
Bâtir une génération de makers
Pour fabriquer ses jouets, Kim Goldstein peut compter sur le bagage artistique du designer Oscar Diaz. Formé aux Beaux-Arts de Bordeaux, il est aussi passionné de sciences et compte, parmi ses clients réguliers, Hermès, Muji et Veuve Clicquot. Un atout considérable qui vient conférer un cachet artistique à l’offre de Koa Koa. « Ce qui est génial, c’est que je propose mes produits aussi bien à des enseignes culturelles qu’à des musées d’art et de sciences », rapporte la fondatrice.
Au départ proposés à l’abonnement, ses kits sont aujourd’hui vendus en physique, chez Nature et Découvertes, Oxybul et à la FNAC. De plus en plus, l’offre séduit aussi les grandes institutions culturelles. « À Paris, nous sommes aujourd’hui à la Cité des Sciences, à la Fondation Louis-Vuitton, à la Gaîté Lyrique… nous rentrons aussi à la Tate Modern, Tate Britain, Tate Liverpool, à la Science Gallery de Dublin, au Science Museum aussi ». Et comme si cela ne suffisait pas, Koa Koa commence aussi à s’exporter en Asie, notamment en Chine et au Japon. L’ouverture d’une boutique dédiée est même prévue en Corée du Sud.
À terme, Kim Goldstein pense à relancer son format abonnement. Elle pense surtout à monter le « Maker Club », une plateforme qui réunirait parents et enfants autour d’ateliers de bricolage et qui inviterait les enfants à « hacker » leurs propres jouets pour les détourner de leur finalité originelle. Les IA n’ont qu’à bien se tenir !
(Image : Getty)
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