Libération sexuelle : pourquoi le repositionnement de Durex marque un vrai tournant

Libération sexuelle : pourquoi le repositionnement de Durex marque un vrai tournant

© Durex - Havas London

Non, la pornographie n’est pas la norme. Au lit, il nous arrive tous de faire semblant et oui, les MST existent toujours. Cela fait deux ans que la marque Durex travaille son repositionnement en ce sens. Objectif ? Briser les tabous, les conventions et les stéréotypes qui cadenassent encore notre intimité.

M’arrêter sur une pub dans le métro ne m’était pas arrivé depuis longtemps. Il faut dire que les paris Betclic et les livraisons Deliveroo me font rarement lever le nez de mon smartphone. Mais depuis quelques jours, c'est différent. Là, entre deux rames de métro, l’intimité de monsieur et madame Tout-le-monde est exposée au grand jour. Et ça accroche.

On apprend par exemple que 71% des hommes utilisent la pornographie comme modèle pour leur vie sexuelle, que les femmes n’ont pas le monopole de la simulation puisque deux tiers de la population n’est pas pleinement satisfaite de sa vie sexuelle. Libre à chacun et chacune de tirer ses conclusions bien sûr. 

Actuellement en pleine campagne de repositionnement, la marque Durex a décidé de s’ériger en pourfendeuse des « conventions sexuelles répressives », selon les termes d’un communiqué. Elle nous adresse même une lettre ouverte dans laquelle elle célèbre la diversité des pratiques sexuelles et met en avant les biais genrés qui nous empêchent, disons-le franchement, de prendre pleinement notre pied. Et autant dire qu’on préfère largement ça...

… à ça. 

Campagne Durex - Really Big

La marque a donc heureusement viré de bord en matière de communication et a aujourd’hui le mérite de confronter les hommes et les femmes aux représentations irréalistes qu’ils se font du sexe, notamment à cause de la pornographie en ligne. Et comme l’explique Elliot Harris, directeur de création chez Havas Londres en charge de la campagne, il est parfois bon de se rappeler « qu’avoir des orgasmes à répétition dans des draps de soie n’a jamais été la norme ».

Le sexe, c’est plus ce que c’était

Basée sur une étude mondiale menée en 2017 par Durex, la campagne se veut le reflet de pratiques intimes en pleine mutation, mais aussi un « guide » pour les jeunes générations en quête de représentations positives et inclusives de la sexualité.

 
 
 
 
 
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« Il y a eu une prise de conscience sur le marché, notamment au sujet des campagnes qui ne représentent que des relations hétérosexuelles ou des histoires d’un soir entre filles et garçons, explique le créatif. C’est sur la base de ces données que nous avons travaillé pour lancer la marque sur un nouveau terrain, avec un nouveau principe directeur : démocratiser le sexe positif pour tout le monde, quel qu’il soit. »

Dans les médias et la culture populaire, l’approche pédagogique et bienveillante de la sexualité est de plus en plus présente. Des séries Sex Education et Big Mouth sur Netflix aux podcasts faisant la part belle au plaisir féminin en passant par la série YouTube Entre Mecs, on y découvre que draguer, jouir ou simplement communiquer avec son ou sa partenaire est loin d’être acquis. « La marque devait devenir cette force encourageante qui permet aux gens de découvrir ce qu’une bonne sexualité signifie pour eux, explique Lorenzo Fruzza, directeur du design chez Havas Londres. Le sujet touche à quelque chose de très individualiste et il était important de travailler avec plusieurs regards différents, s’assurer aussi que nos propres convictions n’interfèrent jamais. »

 
 
 
 
 
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« Ce n’est que le début »

Pour l’instant lancée en France et au Royaume-Uni, la campagne devrait se déployer sur une quarantaine de marchés mondiaux dans les semaines qui viennent. « Il a bien sûr fallu s’adapter à chaque marché et à chaque culture, voire à la loi. En Russie, l’homosexualité est encore considérée comme illégale, en Chine vous n’avez pas le droit de parler de sexe à la télévision… »

Alors que la campagne semble avoir visé juste sur les réseaux sociaux, elle n’a pourtant pas convaincu tous les médias avant son lancement, confie Elliot Harris. « En bossant sur ce projet, j’ai pris la mesure du conservatisme de certains patrons de presse. Beaucoup trouvent acceptables de donner de la visibilité au plaisir masculin, au Viagra ou aux représentations sexistes des femmes façon beach body ready, mais refusent de parler de plaisir féminin. Certains s’opposaient même à la mention du mot "sexe" au sein de la campagne… Je pense qu’avec ce genre d’initiative, on contribue à briser ces conventions. »

Le créatif va jusqu’à affirmer que la campagne est l’une des plus importantes de sa carrière. « C’était une grande responsabilité. Professionnellement, vous devez visez juste, car si vous vous plantez, la marque est foutue. En ce qui me concerne, j’ai cinq filles. Je ne peux qu’être au courant de ce qu’il se passe dehors, comme sur Instagram… rien ne s’arrête, tout est sujet à l’hypersexualisation. C’était super important pour moi aussi. Je crois qu’on est sur le bon chemin, mais aussi fiers que nous soyons de cette campagne, ce n’est que le début. »

Margaux Dussert

Diplômée en marketing et publicité à l’ISCOM après une Hypokhâgne, Margaux Dussert a rejoint L’ADN en 2017. Elle est en charge des sujets liés à la culture et la créativité.
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