Pubs et archives : de Nike à Visa, les marques racontent leur histoire

Pubs et archives : de Nike à Visa, les marques racontent leur histoire

Avec l'INA
© Florence Banville

Les marques de sport s’en sont fait une spécialité, mais elles sont loin d’être les seules : de Pierre et Vacances à Ebay en passant par Valeo, les enseignes parient sur leur histoire pour soigner leur image. Une stratégie de communication où l’archive tient une place de choix.

Il y a quelques années, lorsque Jean Watin-Augouard se présentait comme « historien des marques », l’accueil était plutôt frisquet. « Pour les entreprises, l’histoire, c’était le passé. C’était poussiéreux et ça ne servait à rien », expose-t-il. Depuis, le regard a changé. « On s’est rendu compte que c’est un outil de communication extraordinaire. Mon histoire n’appartient qu’à moi, c’est un marqueur de singularité. »

Si le côté rétro a aujourd’hui retrouvé ses lettres de noblesse, la valeur portée par les images d’archives va bien au-delà, acquiesce John Dempsey, directeur général de Bodega, le studio créatif et social de Wieden+Kennedy (W+K) à Portlandune agence créative qui a signé de nombreuses pubs pour Nike mais aussi Old Spice, KFC ou Visa. « Il ne fait aucun doute que la nostalgie est une tendance actuelle dans tous les secteurs d'activité, les esthétiques remixées et réécrites étant de plus en plus populaires auprès des jeunes publics. Mais plus important encore : les archives montrent le chemin parcouru par une entreprise, ainsi que les succès et les erreurs dont elle a tiré les leçons en cours de route. Ainsi, en puisant dans ces parties de l'histoire de l'entreprise, on peut l'aider à se rapprocher de sa forme idéale, qui se trouve être excellente pour le marketing. »

Remettre l’humain au cœur de la marque

En faisant défiler les époques, « les images d’archives servent à montrer que la marque s’inscrit dans l’histoire de la société », pose Jean Watin-Augouard. Il rappelle ce que constitue l’histoire d’une marque : « c’est un engrenage de plusieurs morceaux : des produits, des gens qui innovent et produisent, des usines, des consommateurs, des métiers, de la communication, des échecs et des réussites. » Pour l’historien, après une période où la pub a « idolâtré la marque au détriment de ceux qui la font », on parle de plus en plus des hommes et des femmes qui la construisent. « C’est important, car c’est une façon de pérenniser la marque ».

Pour mettre la dimension humaine en avant, l’équipementier automobile Valeo célèbre cette année ses 100 ans « d’aventure industrielle ». Pour illustrer son centenaire, Valeo s'est tourné vers l'INA pour obtenir des images de ses sites de production et en a tiré plusieurs vidéos. « C'est formidable de découvrir les archives de l'INA, se réjouit François Marion, Directeur de la communication institutionnelle et des relations investisseurs. Elles nous font saisir l'immense transformation de Valeo en 100 ans, grâce à des hommes et des femmes passionnés, engagés, qui ont conduit le modeste atelier de Saint-Ouen au grand groupe présent sur tous les continents et à la pointe de la technologie. » Pour le directeur de la communication institutionnelle, enrichir les contenus dédiés à la célébration par des vidéos historiques était « une évidence », « afin que le public puisse se plonger dans ces 100 années d’innovation passionnante. »

Parier sur l’histoire des autres

Il y a son histoire propre… et celle des autres. Les marques de sport se sont fait une spécialité d’endosser le parcours des athlètes qu’ils équipent. Ainsi, lorsque Serena Williams est partie à la retraite, Nike (avec qui Williams a co-signé des collections) s’est fendu d’un spot d’une minute signé W+K sur la force de caractère de l’iconique joueuse de tennis. « By changing nothing, she changed everything », assène la marque en guise de slogan.

Pour Adidas, c’est la détermination de Beyoncé qui devient un argument de vente (les deux collaborent sur la marque IvyPark), avec des images d’archives d’une Beyoncé enfant rêvant déjà de devenir une star.

La marque Visa mise elle aussi sur les exploits héroïques de personnalités du monde du sport. Dans sa campagne Visa Go World, lancée en 2008 et utilisée en amont des Jeux olympiques de Londres en 2012, l’entreprise utilise les légendaires images d’archives de Derek Redmond aux JO de 1992 : en finale du 400m, l’athlète se blesse. Son père le rejoint sur la piste et le soutient pour l’aider à franchir la ligne d’arrivée. Un moment d’une émotion rare et un succès marketing pour l’entreprise : ses publicités pour les JO de Londres ont comptabilisé 25,7 millions de vues.

« Lorsque c’est bien fait, l'histoire de l'entreprise peut être comprise à travers l'histoire des personnalités partenaires, analyse John Dempsey. Dans le cas de Nike, l'entreprise s'est toujours considérée comme la voix de l'athlète. Ainsi, lorsqu'ils racontent l'histoire d'une personne comme Serena, ils défendent leurs propres valeurs fondamentales dans le processus, montrant à leur public qu'ils se soucient surtout des histoires de grandeur qui font de la personne un athlète, et plus important encore, de l'athlète une personne. »

Des longs formats pour une valeur ajoutée

Dans une époque médiatique où les vidéos de quelques secondes se taillent la part du lion, les publicitaires continuent de parier sur les formats longs pour faire entrer le consommateur dans l’univers de la marque. Ainsi, pour célébrer les 40 ans de son modèle Air Force 1, Nike a mis en place une série d’interviews en plusieurs épisodes avec des acteurs de la culture hip-hop d’aujourd’hui.

De son côté, Formula One Group, chargé de la promotion des événements de Formule 1, réalise depuis 2019 une série en collaboration avec Netflix baptisée Formule 1 : Pilotes de leur destin (Formula 1: Drive to Survive). Cinq saisons plus tard, le succès phénoménal du show a permis d’augmenter l'audience du championnat du monde.

« Les contenus courts et longs sont tous deux nécessaires dans le climat médiatique actuel, mais ils doivent être utilisés pour des raisons différentes, approfondit John Dempsey. Lorsque la vidéo courte est bien faite, elle transmet la valeur et la personnalité d'une marque en accord avec les tendances modernes qui évoluent rapidement. Le contenu long format doit être traité avec plus de patience et doit être utilisé pour raconter une histoire plus profonde qui sert un réel objectif pour le public et le récompense pour le temps qu'il y consacre. Ce format évolue régulièrement, comme en témoigne le partenariat entre Nike et Netflix, où le contenu "long format" se présente sous la forme d'entraînements qui apportent une réelle valeur ajoutée à la vie du client. Maintenir l'attention du public pendant plus de deux minutes sera un défi de plus en plus grand, l'innovation est donc indispensable. »

Pour les experts de la communication, il faudra innover en osant utiliser les archives hors de l’esthétique rétro qu’on a tendance à leur prêter, conseille le publicitaire. « La chose la plus importante est de toujours garder une connexion authentique avec l'héritage de l’entreprise et ce qu'elle s’est promis de faire pour ses clients mieux que quiconque. Les grandes entreprises se souviennent de ce qu'elles étaient à leurs débuts et des raisons qui les ont poussées à se lancer, et elles intègrent ces éléments dans toutes les décisions qu'elles prennent aujourd'hui. » Revenir sur son histoire permet donc de continuer à l'écrire, au présent. 


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