
Une influenceuse TikTok aux centaines de milliers d'abonnés a été exécutée par balle en plein jour au Chili.
Connue sous le pseudonyme « Narco Queen », Sabrina Durán Montero a été assassinée dans les rues de Santiago du Chili fin octobre de huit balles dans le corps. Âgée de 24 ans, l'influenceuse était une narcotrafiquante reconnue. La police avance la thèse d'un règlement de comptes d'un gang de drogue rival.
La Queen du narcotrafic
Sabrina et deux de ses frères soupçonnés de « fourniture, distribution et trafic de cannabis, de cocaïne, de MDMA et de champignons magiques » avaient été arrêtés début 2023. Cadette d'une famille de neuf frères et sœurs et mère d'un garçon de 10 ans, la « Narco Queen » a grandi au milieu de la drogue. Des documents judiciaires cités par les médias locaux révèlent son implication précoce dans le commerce de substances illégales alors qu'elle était encore adolescente. Au cours de son incarcération, la jeune femme aurait entamé une relation avec Antonella Marchant, la cheffe du gang Los Marchant arrêtée en 2021 et purgeant actuellement 15 ans de prison. En liberté conditionnelle au moment de sa mort, la jeune femme publiait sur TikTok sous le nom de « Joakina Gusman » (@katrinagusman), une référence à Joaquín « El Chapo » Guzman, l'ancien patron du cartel de Sinaloa.
Le business de la drogue sur les réseaux sociaux
La « Narco Queen de Peñaflor », cheffe d'un gang criminel dans la banlieue de Peñaflor à Santiago, a gagné en popularité en documentant sa vie derrière les barreaux. Depuis sa prison, maquillée et arborant des bijoux volumineux, la jeune femme partageait des chorégraphies sur du reggaeton. Au moment de sa mort, elle était suivie par près de 500 000 abonnés (aujourd'hui elle cumule 634 000 followers). Rien de surprenant selon Pilar Lizana, spécialiste de la sécurité au centre de recherche chilien AthenaLab : « L'État de droit a reculé dans certaines régions, entraînant un terrorisme rural dans le sud et des saisies de terres à Alto Hospicio. Le crime prend alors le dessus pour combler le vide. Les jeunes admirent souvent des individus comme Ina, qui représentent un monde de pouvoir, de richesse rapide, de voitures de luxe volées et d'armes à feu. »
Un point de vue partagé par le sociologue Rodrigo Ganter, auteur d'un livre sur la narcoculture chilienne. Selon lui, le cas montre comment le trafic de drogue s'est étendu à de nouveaux domaines, touchant un segment spécifique de la société au cours de la dernière décennie. Les drogues « ont désormais une influence majeure sur les préférences, l'esthétique, les modèles et les aspirations de groupes sociaux spécifiques ». Mais, au-delà de la fascination des jeunes pour la narcoculture, la présence de trafiquants sur les réseaux sociaux a également une vocation fonctionnelle selon Pablo Carvacho, directeur du Centre chilien de recherche sur la justice et la société. « Pendant la pandémie, de nombreuses activités du monde réel – y compris la criminalité – ont migré en ligne. Les trafiquants de drogue recherchent des acheteurs potentiels dans l’espace numérique. Il ne s'agit pas seulement d'une représentation culturelle du crime, il y a aussi un aspect fonctionnel ».
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