Cerveau doré

Braintech : le business juteux du cerveau

© eranicle via Getty Images

Toujours plus vite, toujours plus fort... le grand business du cerveau nous invite à pousser nos curseurs de performance au max. Si vous aimez les gadgets, les casques, les applis et les cachets... vous allez adorer. Sinon... c'est nettement moins marrant. 

Sleep Tech : ton sommeil vaut de l’or

Au repos, votre temps de cerveau disponible vaut (encore) de l’or ! Le marché de la SleepTech prend la tête du marché de la e-santé et pourrait peser, d’ici 2020, 80 milliards de dollars au niveau mondial. Pas étonnant puisqu’une personne sur trois déclare avoir des problèmes de sommeil. Les entrepreneurs de la tech ne s’y sont pas trompés, et débordent d’imagination pour vous faire sombrer dans un sommeil réparateur. Vous ne manquerez pas de choix. Développée avec des psycho-acousticiens, l’application Pzizz propose de vous bercer de bruits blancs. Le galet lumineux Dodow (49 euros) projettera sur votre plafond un point de lumière. Fixez-le, il vous fera passer de 11 à 6 respirations par minute. Si vous ne craignez pas le total look tech, vous pouvez opter pour le Vision Care Eye Massager (130 euros environ). Mis au point par un médecin chinois spécialiste en acupression, ce masque combine vibrations, chaleur et petits tapotements sur des points d'énergie… Autre option, le DreaminzZz (199 euros) déclenche l’hypnose grâce à des LEDs multicouleurs et à un vibreur. Le bandeau Dreem (499 euros) permet d’amplifier le rythme de vos ondes cérébrales en diffusant des sons synchronisés. Plus régressif, le Somnox, un coussin connecté à tenir contre soi, qui vous incite à caler votre respiration sur la sienne. Après un sommeil si durement conquis, vous pourrez aussi opter pour un réveil high-tech. Le radioréveil Fitfort (40 euros) simulera l’aube rien que pour vous. Les dataïstes adoreront consulter les données collectées par leur sous-matelas Withings. Et ceux qui décidément n’arrivent pas à dormir pourront toujours entamer une conversation avec le chatbot Team de Nuit, qui répond aux questions des insomniaques.

Brainfitness : ton cerveau, tu dois muscler

Les hypocondriaques auront beau jeu. Le déclin cognitif progressif touchera plus de 100 millions de personnes dans le monde d’ici 2050. Évidemment, la tech prend les devants pour vous muscler le cerveau. Pour booster vos capacités cognitives, d’attention, de résolution de problèmes, vous trouverez tout ce qu’il faut en matière d’applis. Toutes misent tout sur la « gamification ». Mais attention, on n’est pas sur Candy Crush, non plus. On vous promet de la rigueur et de l’efficacité, avec déclarations de neuroscientifiques à l’appui. À vous de faire votre choix entre Peak, Lumosity, ou le plus décalé Big brain, entre autres. Pour ceux qui veulent ne viser qu’un seul objectif, la mémoire par exemple, vous pourrez aller vous amuser sur Memorado ou NeuroNation. Les athlètes de la performance pourront basculer sur une option casque, nettement plus onéreuse. Pour 349 dollars, Halo promet de stimuler l’agilité de votre cerveau. Muni d’électrodes, il envoie des impulsions électriques de faible intensité dans la partie de votre cortex qui contrôle les mouvements. Vos neurones tout ragaillardis enverraient ainsi des signaux amplifiés à vos muscles. Les effets ? Augmenter vos performances physiques, mais aussi votre mémoire, votre concentration et l’assimilation de nouvelles compétences. L’armée américaine aurait testé (et approuvé). D’après le fabricant, l’US Air Force aurait constaté une réduction de 50 % du temps de formation des pilotes de drones. Des essais menés avec des membres de l'équipe américaine de ski olympique auraient montré une amélioration de 31 % de leur force musculaire. Non mais Halo, quoi !

Braincoolest : pour être zen, suivez le programme

Un Français sur quatre se déclare stressé. Alors, forcément, tout ce qui peut détendre trouve preneurs. D’où le petit succès des applis de méditation. Petit BamBou revendique 1,5 million d'inscrits et chaque semaine 400 000 utilisateurs actifs. C’est loin derrière Tinder… mais c’est plus qu’honorable. L’outil propose aux néophytes un programme léger : dix minutes quotidiennes. Des programmes spécialisés et payants permettraient, par exemple, d’arrêter de fumer. Mais Petit BamBou pourrait prendre un coup de speed avec l’arrivée sur le marché francophone du leader Headspace, qui compte plus de 42 millions de téléchargements. Sur un autre terrain, le Français Open Mind Innovation s’attaque au stress des cadres sup. En leur vissant un casque sur la tête, la startup veut mesurer combien leur cerveau est en panique, et leur proposer un programme pour reprendre le contrôle.

Nootropique et smartdrug : les cachets de la performance

La folie des compléments alimentaires n’épargne pas notre cerveau. Le marché explose et pourrait atteindre 6 milliards de dollars en 2024. Le phénomène a été porté par le film Limitless, sorti en 2011 et adapté depuis en série. On y découvre un antihéros dont les capacités cognitives gonflées au NZT.48 se mettent à dépoter. Les nootropes et les smartdrugs sont des substances censées augmenter nos capacités cognitives. Cette catégorie réunit des produits en vente libre plus ou moins naturels, et d’autres qu’on se procure sur ordonnance et qui suintent la chimie. En France, Noomind veut devenir la référence avec un produit dit « 100 % naturel ». Pour 60 gélules, il vous en coûtera 35 euros. Pour passer au cran du dessus, il vous faudra convaincre votre médecin. La Modalphine peut vous tenir éveillé et aurait été utilisée par les militaires. La Ritaline, commercialisée pour le traitement du trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), est prisée par les étudiants à l’approche des examens pour son effet psychostimulant. Le phénomène prend une telle ampleur chez les Anglo-Saxons qu’on lui a donné le surnom de « kiddy coke » – la « cocaïne des enfants ». En France, en 2015, elle était consommée par 1,5 % des étudiants en médecine, et un lycéen sur six déclarait avoir pris au cours des douze derniers mois un produit dans le cadre de la préparation d’un examen (selon une enquête de l’OFDT).


Cet article est paru dans la revue 19 de L'ADN consacrée au cerveau. Pour vous procurer ce numéro, il suffit de cliquer ici.

Béatrice Sutter

J'ai une passion - prendre le pouls de l'époque - et deux amours - le numérique et la transition écologique. Je dirige la rédaction de L'ADN depuis sa création : une course de fond, un sprint - un job palpitant.

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