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Les seniors, la clé d’une relance durable ?

Avec Bayard
© powerofforever_Getty

Dans un contexte de reprise économique incertain, les entreprises n’ont pas d’autres choix que de s’adapter. Une injonction qui s’ajoute à une autre, tout aussi pressante, celle de s’engager pour la société. De quoi reconsidérer les profils plus expérimentés, souvent gages de résilience et d’ancrage ?

« Gouverner, c'est savoir s'adapter aux circonstances et être pragmatique. », a récemment déclaré Jean Castex, le Premier ministre, à l’occasion de sa rentrée médiatique. En quête de confiance, il souhaite rassurer les Français inquiets face au risque de crise économique et sociale. Résistance, adaptation, résilience… seraient ainsi les maîtres-mots de cette rentrée. Et pour cause, il va vite falloir trouver des solutions pour limiter les dégâts d’une récession économique que l’on annonce déjà historique pour l’année 2020. Mais aussi pour emboîter le pas de la transition sociale et écologique qui était au sommet des agendas des universités d’été du Medef ou encore du collectif #Nousommesdemain. Les entreprises sont sommées de faire mieux avec moins… et pour tous. Chiche ?

Les profils expérimentés pour s’adapter

Saviez-vous que les profils expérimentés en activité ont mieux vécu le confinement que les autres profils dans l’entreprise ? Selon les récents travaux du Club Landoy, un think tank dédié à la révolution démographique, les seniors se sont plus vite et mieux adaptés aux conditions imposées par le télétravail que les autres collaborateurs. Pourquoi ? Ils connaissent leur entreprise et leur secteur sur le bout des doigts ! Aussi leur autonomie a été un atout pour des managers débordés par des demandes de salariés peu habitués à être coupés physiquement de leurs collègues. De quoi écarter une idée reçue sur le manque d’agilité des seniors, qui aujourd’hui, en pâtissent toujours. Pour rappel, le taux d’emploi des seniors reste faible en France par rapport à la moyenne de l’Union européenne et de l’OCDE pour les 60 ans et plus (52,1% en 2018, contre 58,7% pour l’ensemble de l’Union européenne).

…et transmettre

Le plan de relance du Premier ministre fera-t-il ainsi une belle place aux seniors ? Ce que l’on sait déjà : un volet du plan intégrera 6,5 milliards d’euros de mesure de soutien à l’emploi des jeunes pour faciliter leur entrée sur le marché du travail. Mais quid des seniors ?   Doivent-ils laisser la place aux jeunes comme l’a récemment titré le quotidien La Croix ? Comment conjuguer embauche des jeunes et maintien de l’emploi des plus âgés ? Les entreprises tentées de se séparer de leurs profils les plus expérimentés, jugés trop chers, à coup de départs anticipés, seraient une lourde erreur, selon Stéphane Carcillo, à la tête de la division « Emploi » et spécialiste de l’insertion professionnelle à l’OCDE : « L’emploi n’est pas un gâteau que l’on partage. Le meilleur moyen de favoriser l’insertion professionnelle des jeunes, c’est simplement de créer des emplois, pas de mettre les seniors à la retraite en espérant qu’ils soient remplacés. » Et si pour éviter ce que beaucoup redoutent, à savoir une rupture intergénérationnelle, les entreprises devenaient un espace de solidarités ? Si cette cohésion est une force pour la société, comme elle l'a brillamment démontré pendant le confinement, pourquoi ne le serait-elle pas pour l’entreprise ? Selon les travaux du Club Landoy, dans les faits, la crise sanitaire n’a pas opposé les jeunes générations et les seniors. La société de conseil en ressources humaines Robert Half a conduit une étude auprès de 603 cadres français qui managent des seniors. Interrogés sur les avantages à employer des plus de 55 ans, 63 % des répondants évoquent le transfert de savoir et de compétences aux jeunes générations.

Les profils expérimentés pour innover

S’adapter à l’incertitude, les entreprises s’y font plutôt bien car elles ont retenu les leçons de la crise économique de 2008. Mais désormais, à ce new normal, s’additionne la responsabilité de se rendre utile, de s’engager et de contribuer à résoudre les défis colossaux qui nous font face (démographiques, alimentaires, écologiques, sociaux, numériques…). Ces défis qui menacent, chaque jour un peu plus, des modèles économiques déjà éprouvés par de multiples et rapides mutations.

Et si la clé d’une relance durable pour les entreprises étaient les... seniors ? Ils ont de l’expérience et de l’expertise. Pragmatiques, ils rassurent et peuvent alerter sur les éventuelles dérives managériales inadaptées. De plus, les seniors sont souvent engagés dans des associations et solidement ancrés dans leur territoire. Des compétences qui peuvent s’avérer utiles à l’heure où l’on parle sérieusement de relocaliser des chaînes de production. Les profils expérimentés sont aussi créatifs, ils lancent des clubs, des associations, dynamisent leur quartier avec peu de moyens et beaucoup d’inventivité. Bref, de vrais pros de l’innovation frugale ! Une étude américaine en a même fait le constat : les seniors sont des leaders de l’innovation. « Les adultes plus âgés sont souvent des chefs de file de l'innovation qui utilisent leurs connaissances et leur créativité pour revitaliser les communautés et améliorer l'environnement », explique John Carroll, professeur de sciences et technologies de l'information et associé de l'Institute for CyberScience de Penn State.

Les seniors proposent des innovations qui ne sont pas hors-sol, mais au contraire qui disposent de solides racines. Le tout grâce à un savoir-faire, une vie d'expériences, une conscience des besoins, un sens collectif et un certain sens de la débrouille. Des compétences et des ressources qui peuvent être au cœur d’une reprise durable et porteuse de sens. Aux entreprises de s’en saisir !

  

Sarah Sabsibo

Après un master de journalisme à l’IICP, Sarah Sabsibo débute sa carrière dans le développement durable, l’industrie automobile et les mobilités. Elle intègre plus tard La Côte Bleue et travaille sur des sujets liés à l'écologie, la finance solidaire et l’innovation sociale. Elle exercera à la communication du Mouvement des entrepreneurs sociaux avant de rejoindre L’ADN Studio.
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