un extrait du film Elyseum

Tourisme de luxe : jusqu’où aller pour vivre plus longtemps ?

Tests épigénétiques au check-in, caissons hyperbares et protocoles ultra-personnalisés… L'hospitalité de luxe mise désormais sur la longévité. Une révolution qui transforme les palaces en laboratoires du bien-être.

« Nous commençons à peine à réaliser à quel point nous sommes notre bien le plus précieux. Ce n'est pas notre voiture. Ce n'est pas notre maison. Ce n'est pas notre partenaire. C'est notre corps. » Cette déclaration aurait pu sortir de la bouche d’un gourou new age, bien décidé à vous libérer de votre ego matérialiste mal placé. Elle est pourtant signée Philippe Zuber. Ce Français dirige Kerzner International, groupe hôtelier d'ultra-luxe basé à Dubaï, qui opère les prestigieuses marques d'hospitalité One&Only et Atlantis. Et son propos est révélateur de la nouvelle obsession du secteur de l'hospitalité de luxe pour la longévité.

La santé, investissement ultime

C'est ainsi que dans les palaces du monde entier, cette révolution prend forme. Les caissons hyperbares côtoient les bars à champagne, les spas traditionnels s'équipent de laboratoires d’analyses biologiques en tous genres, les suites se parent de dispositifs de luminothérapie… La longévité donne même son nom aux lieux : un « longevity floor » parmi les 122 étages du futur Six Senses Residences Dubai Marina qui deviendra, à sa livraison en 2028, la plus haute tour résidentielle au monde ; un hôtel entier comme le Longevity Health and Wellness Hotel en Algarve, au Portugal. Il en faut bien autant pour répondre à la demande croissante d'une clientèle fortunée qui considère aujourd’hui la santé comme l'investissement ultime.

Et les chiffres en témoignent : l'industrie mondiale du bien-être pèse 5 100 milliards de dollars et devrait croître de 7,3% par an jusqu'en 2028, atteignant ainsi près de 9 000 milliards de dollars (chiffres Global Wellness Institute), cité par le rapport New Codes of Luxury Longevity & Wellbeing Strategies. A lui seul, le segment du tourisme wellness devrait atteindre 1 350 milliards de dollars en 2028, soit une croissance cumulée de 100% en 5 ans. Publié par le cabinet de tendances The Future Laboratory et l'agence luxe et lifestyle Together Group, le rapport met en lumière la convergence entre beauté, santé et hospitalité, qui forge selon lui un nouveau paradigme, le « luxe transformationnel » – issu de « l’économie de la transformation » où l’expérience et le sens priment sur le produit et la matérialité.

« Bien-être transformationnel »

La tendance se matérialise dans des projets hôteliers d'envergure. À Dubaï, le complexe One Za'abeel illustre parfaitement cette convergence. Développé par Kerzner International, il abrite SIRO, le premier hôtel entièrement dédié au fitness et à la récupération, aux côtés d'un « longevity hub » Clinique La Prairie. Cette nouvelle marque, entièrement dédiée au « bien-être transformationnel » , devrait continuer à se développer avec une ouverture cette année au Montenegro, puis en Arabie Saoudite, au Mexique et au Japon. Chaque client y bénéficiera d'un programme personnalisé, de technologies de récupération en vogue comme la cryothérapie, le cupping ou la thérapie par lumière rouge, et un accompagnement sur-mesure. Philippe Zuber précise : « Nous croyons que le client contrôle son expérience. Ils savent ce qu'ils veulent. Et ce qu'ils ne veulent pas. »

Rebecca Burdess, directrice mondiale de l'expérience client du groupe hôtelier Maybourne, interrogée par The Future Laboratory, confirme : « Nos clients, nos membres, sont incroyablement bien informés. Ils sont hautement qualifiés, cultivés, et comprennent l'univers de la santé, du bien-être et de la longévité. Ils sont profondément investis dans leur propre santé. » Et de fait, il ne faudrait pas verser dans une prise en main trop infantilisante devant une clientèle devenue experte, nourrie aux podcasts et aux protocoles d'optimisation des biohackers-stars.

Diagnostic de santé dès le check-in

Car à la source de cette popularisation, on trouve bien sûr l’influence du milliardaire Bryan Johnson – figure messianique du biohacking, dont la croisade pour « ne pas mourir » a eu le droit à son documentaire Netflix. Mais à l’opposé de cet extrême technophile, une autre voie gagne du terrain : celle du retour aux fondamentaux (alimentation, mouvement, pratiques spirituelles, connexion), incarné par les « Blue zones » – ces régions du monde où l’on vivrait plus longtemps (et mieux) qu’ailleurs. Le phénomène, développé par Dan Buettner, est devenu business global, entre éditions, retraites touristiques… et documentaire Netflix. Aujourd’hui, les nouvelles approches du tourisme de la longévité cherchent souvent à réconcilier ces deux pôles, quelque part entre technologies de pointe et sagesse ancestrale.

Reste désormais à découvrir ce que ces nouveaux temples de la longévité proposent concrètement… et à quel prix. Rendez-vous la semaine prochaine pour la deuxième partie.

Carolina Tomaz

Journaliste, rédactrice en chef du Livre des Tendances de L'ADN. Computer Grrrl depuis 2000. J'écris sur les imaginaires qui changent, et les entreprises qui se transforment – parce que ça ne peut plus durer comme ça. Jamais trop de pastéis de nata.

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