le président chinois géant derrière un barrage hydroélectrique

Comment Taïwan tente de faire barrage à la désinformation chinoise

Le pays a mis en place stratégie nationale de fact-checking qui a pour mission de préserver la démocratie. 

Alors que la campagne pour l’élection présidentielle bat son plein (le scrutin aura lieu en janvier 2024), Taïwan doit faire face à l’une des campagnes de désinformation et d’influence politique la plus importante de son histoire. Convoitée par la Chine qui la considère comme une province rebelle devant être réintégrée au sein de la République Populaire, l’île est devenue un laboratoire en matière de déstabilisation politique par le biais du numérique.

Le mal qui vient de TikTok

Au programme : rumeurs de pénuries qui déclenchent de véritables ruées vers les magasins, fake news et critiques virulentes concernant le parti taïwanais au pouvoir qui penche fortement du côté de l’indépendance, reprises d’émissions issues de la télévision chinoise et clips de propagande amusants. Tout ce contenu est diffusé 24/24 sur la plateforme Douyin, la version chinoise de TikTok. D'après L'Express, la plateforme est utilisée par 4,2 millions d’utilisateurs sur une population de 24 millions de personnes, dont 40 % de jeunes adultes taïwanais. Même le langage et les expressions purement chinoises commencent à se frayer un chemin parmi la jeunesse du pays, qui consomme des sketchs et des clips musicaux populaires venant du continent. Cette influence culturelle se faisait dans l‘autre sens il y a quelques décennies, alors que la Chine sortait du marasme maoïste. 

Dans une enquête du New York Times, on apprend que cette désinformation se fait de plus en plus subtile et organique. Au lieu de bombarder les réseaux de messages pro Pékin à travers une multitude de faux comptes, les agents chinois mènent une « guerre cognitive » permettant d’accentuer les divisions sociales : augmentation artificielle du nombre de morts dues au Covid, production de faux documents suggérant une mauvaise gestion de l’argent public, et falsification de la parole de célébrités par le biais de deep fakes pour critiquer la présidente Tsai Ing-wen ainsi que son vice-président et candidat à sa succession, Lai Ching-te.

Faire barrage à la désinformation

Pour contrer cette guerre, le pays a donc mis en place une véritable stratégie anti-désinformation à l’échelle nationale. L’article cite le groupe Fake News Cleaner, composé de 22 conférenciers et 160 bénévoles qui sillonnent les universités, les temples et les petits villages de pêcheurs pour former les gens aux fake news et aux outils informatiques. Taïwan a aussi mis en place Cofact, un organisme de vérification de l’information intégré à une application de réseau social populaire appelé Line. Enfin, les citoyens peuvent se tourner vers le Taiwan Fact-checking Center, une ONG indépendante lancée en 2018 qui s’est illustrée durant la pandémie en lançant l’Alliance Corona Virus Fact, le plus grand projet de fact-checking jamais réalisé avec plus de 10 000 informations vérifiées par une centaine de personnes à travers le monde. Reste que tous ces moyens ne donnent pas les résultats escomptés sans une véritable mobilisation de la population. En juin dernier, la présidente Tsai Ing-wen a appelé les citoyens taïwanais à lutter ensemble contre la désinformation. Plus que l’avalanche de fake news, c’est avant tout l’apathie de la population qui doit être contrée.

David-Julien Rahmil

David-Julien Rahmil

Squatteur de la rubrique Médias Mutants et Monde Créatif, j'explore les tréfonds du web et vous explique comment Internet nous rend toujours plus zinzin. Promis, demain, j'arrête Twitter.

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