
TikTok, c’est l’app phénomène qui vous fait craindre d’être has been en permanence. Mais comme sur toute plateforme, il est possible d’en apprivoiser les codes. Voici 4 conseils pour se lancer sans être ridicule.
On ne parle que d’elle depuis plusieurs mois : TikTok, la déferlante qui enregistre plus de 1,5 milliard de téléchargements depuis son lancement. L’année dernière, l’application de partage de courtes vidéos (anciennement Musical.ly) en comptait 700 millions, soit suffisamment pour battre Facebook et Messenger et devenir la deuxième application la plus téléchargée au monde après WhatsApp. Avec des chiffres pareils, autant dire que les annonceurs sont sur le pont.
En France pourtant, l’application dont les codes rappellent ceux de Vine est encore jeune. Lancée en 2018 dans l’Hexagone, elle annonçait récemment être prête pour sa monétisation et le lancement de formats publicitaires. Et si les marques veulent évidemment une part du gâteau, certaines sont encore frileuses à l’idée d’investir la plateforme. Il faut dire qu'elles n’ont que très peu d’informations sur ses utilisateurs, ce qui rend le ciblage compliqué, et que la versatilité de ses contenus inquiète.
Sketchs, chorégraphies, farces ( « pranks » ), « Lip sync et acting », profusion de mèmes et de challenges obscurs à reproduire et à partager… TikTok, c’est une machine à buzz, mais surtout un abécédaire de langages et de signes qu’il faut métaboliser avant d’y régner. Voici 4 conseils pour se lancer sans être totalement à côté de la plaque.
@campetter When u try to teach your grandma who is 92 years old a tiktok thing #grandma #old #foryou #foryoupage
1) Apprivoiser le monstre (et lever quelques idées reçues au passage)
Votre mission si vous l’acceptez : produire des vidéos de 15 à 60 secondes qui soient faciles à reproduire et à diffuser (de préférence avec de la musique). C’est le format fétiche de la plateforme, celui sur lequel tout le monde s’accorde. Mais avant de se lancer, « il faut comprendre comment fonctionne votre flux principal », nous explique un porte-parole de TikTok France. Le flux principal, c'est celui qui se déclenche instantanément lorsque vous ouvrez l’appli et que l’on appelle le « pour toi » ou « for you page » en anglais. « Il correspond à vos centres d’intérêt et va chercher uniquement les contenus qui vous intéressent. Le flux s’améliore à mesure que vous en regardez. En revanche, ce qui est mis en avant n’est pas influencé par ce que les autres aiment, vous n’aurez jamais la même chose que votre voisin. »
Forte de la diversité de ses contenus, la plateforme jouit d’une ambiance particulièrement bon-enfant. On s’y connecte pour passer le temps, se divertir et se détendre, soit en swipant de vidéo en vidéo, soit en s’essayant au dernier challenge du moment. Et bien que l’on aborde parfois des sujets sérieux comme la santé mentale, les menaces de guerre ou le handicap, c’est toujours sous le prisme de l’humour, du jeu et de la dérision. C’est peut-être ce qui explique l’engagement extraordinaire de la plateforme et le fort sentiment d’appartenance que développent ses utilisateurs. « Les jeunes et moins jeunes générations se retrouvent entre elles, commentent Marine Montironi et Fanny Bonodot, responsables du pôle influence chez We Are Social. Ce qui les lie et fait le succès de TikTok, ce sont ces caractéristiques communes. »
De quoi contrer l’idée selon laquelle il n’y a que des millennials sur TikTok. « Là-dessus, il faut évangéliser les marques. Le cœur de cible de TikTok est certes très jeune (13 ou 14 ans, ndlr), mais la plateforme s’est depuis ouverte aux jeunes adultes et aux personnes d’un âge plus avancé. »
2) Être créatif (mais rester dans la norme)
Une consigne qui peut paraître paradoxale, mais qui a rapidement du sens. Car derrière son apparente spontanéité, TikTok est en réalité une plateforme extrêmement normée. Il faut effectivement faire preuve d’inventivité, mais ce sont les formats et les tendances mis en avant par la plateforme qui permettront l'accès à la popularité. Le nerf de la guerre donc ? La créativité, certes, mais surtout le mimétisme et la répétition.
Exemple récent avec le #DollyPartonChallenge, un défi devenu viral en janvier. Popularisé par des stars, il consiste à se présenter en 4 clichés ou vidéos selon la plateforme dont ils sont issus (Linkedin, Facebook, Instagram ou Tinder). Le challenge a eu tellement de succès qu’il a même été repris par des institutions telles que le Château de Versailles, le Grand Palais et le Musée d’Orsay.
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Mais si les contenus foisonnent et se répondent autant, c’est aussi grâce au fonctionnement « clé-en-main » de la plateforme. Filtres, effets visuels, bruitages et bandes sonores… un outil de montage intégré confère en effet beaucoup de possibilités en matière de formats. Et bien que les contenus en « lip sync » prédominent (le fait de synchroniser le mouvement des lèvres avec un morceau de musique ou de dialogues de films, ndlr), plus d’une dizaine de genres sont aujourd’hui fréquemment exploités parmi lesquels #aesthetic (des effets de style romantiques aux plus beaux couchers de soleil), #magic (des tours de magie plus ou moins spectaculaires), #diy (Do it Yourself) ou encore #satisfaying (des vidéos hypnotisantes qui font du bien). « Tout est propice à création, expliquent Marine Montironi et Fanny Bonodot. Les possibilités sont infinies et permettent de concrétiser chaque idée. Et lorsque tu penses avoir fait le tour d’une tendance, elle finit par être détournée d’une autre manière. Ça ne s’arrête jamais. »
@zachking How many times do you usually snooze your alarm in the #morning ? #lifehack
Pour le moment, 5 formats publicitaires calqués sur les usages de la plateforme sont à la disposition des marques : le hashtag challenge (les utilisateurs relèvent le défi lancé par une marque en vidéo), le brand takeover (une vidéo proposée à l’ouverture de l’application), le In feed (une vidéo glissée entre deux contenus), le Top View (une vidéo longue proposée à l’ouverture de l’application qui accompagne l’utilisateur jusque son flux personnel) et les effets sponsorisés qui permettent la création de filtres et d’effets spéciaux.
« Si les utilisateurs s’identifient à votre contenu, ils seront enclins à le regarder, voire à reproduire ce que vous proposez pour le partager avec leur communauté, poursuit le porte-parole TikTok. Mais pour qu’une campagne fonctionne, les marques doivent être prêtes à sortir de leur zone de confort et à lâcher prise ». En France, certaines marques se sont notamment essayées au jeu du challenge. C’est le cas de Clarins et de son défi #MyFreshMorning (plus de 17 millions de vues) qui incitait les « tiktokers » à se filmer dès leur réveil en compagnie de sa nouvelle gamme de soins. « Il faut trouver un challenge qui corresponde aux pratiques de la plateforme, mais les possibilités sont infinies, complète Fanny Bonodot. Un challenge peut être populaire un jour ou deux semaines, tout peut aller très vite. »
@myclarinsofficial Sometimes, you just need a little detail to give you a good energy!? #MyFreshRoutine #LoveYourselfEffect #MyClarins #MorningRoutine #BeautyTips
3) Ne pas négliger le pouvoir de prescription de la plateforme
Contrairement à d’autres plateformes sociales, TikTok bénéficie d’équipes dédiées aux animations de la plateforme. « Ce sont eux qui créent certains challenges et en tiennent les rênes, poursuit la spécialiste. Une chose intéressante à savoir pour les marques et les agences qui souhaiteraient collaborer avec la plateforme et se positionner en amont. »
Les utilisateurs, les marques et les community managers sont donc tous en mesure de lancer un défi. « Nous proposons un guide qui aide les marques à savoir ce qui fonctionne, ajoute le porte-parole. Mais certains challenges peuvent effectivement être lancés par nos équipes, ce qui nous permet de proposer d’autres leviers créatifs à la communauté. » Cela peut être un challenge créé en faveur d’une cause sociale ou environnementale (#SaveOurOceans avec l’ONG Conservation International par exemple) ou un défi lancé dans le cadre d’un partenariat avec un artiste.
4) S’inspirer de « tiktokers » confirmés
Pour l’agence We Are Social, ce sont encore les influenceurs de la plateforme qui parlent le mieux de stratégie. « Ce sont eux qui l'ont préemptée, ils la connaissent bien mieux que nous. Pour une marque, il est parfois plus intéressant de se présenter avec eux, plutôt que seule », expliquent les deux spécialistes en influence.
Il faut dire que certains artistes, souvent jeunes c’est vrai, réussissent à mettre le feu à la plateforme. C’est le cas de Lil Nas X, auteur du tube Old Town Road, qui a décollé en partageant son titre sur TikTok. En l’espace de quelques semaines, les utilisateurs se l’approprient partout dans le monde et reproduisent ses pas de country via le Yee Yee Juice Challenge. Résultat, Lil Nas X reste 19 semaines consécutives en tête des ventes de disques aux États-Unis.
« Je devrais peut-être payer TikTok, a déclaré le chanteur lors d’un entretien au Time. Ils ont vraiment boosté le morceau. »
Idem pour le titre The Box du rappeur Roddy Ricch qui a réuni des millions de tiktokers autour d’une intro ponctuée… de bruits d’essuie-glaces.
@jaywill4real This how Roddy Ricch made The Box ? ? #music #foryou #foryoupage #featureme
S’il y a une leçon à retenir, c’est peut-être celle-ci : sur TikTok, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme (en mèmes).
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