
Offrir un supplément d’âme au Big Data : tel est le projet de l’agence Bright qui propose de métamorphoser les datas des marques en œuvres numériques fascinantes.
Mutant par nature et avide de technologies, l’art numérique ne pouvait pas ne rien faire du flux de nos datas. Le data art s’immerge dans les données pour générer sur nos écrans des œuvres hypnotiques et mouvantes dans leurs formes, leurs couleurs, leurs rythmes.
L’agence Bright, créée il y a un an par Abdel Bounane et Martin-Zack Mekkaoui, veut rendre visibles ces œuvres en les faisant entrer là où l’on ne les attend pas.
L’art doit sortir des musées et des galeries, et se montrer dans les espaces publics et privés : les gares, les aéroports, les hôtels, sur les façades, dans les centres commerciaux […] partout on peut toucher le plus grand nombre…
Abdel Bounane
Les datas, ce n’est évidemment pas ça qui manque, et les entreprises sont les premières à en produire. Mais les sublimer, les mettre en scène, leur donner un supplément d’âme… ça, ce n’est pas leur job, et les confier à des artistes prend alors tout son sens. « Le data art peut être un outil de communication puissant, qui permet de sublimer l’aura d’une marque, sur une matière première qui lui est totalement propre, qui révèle le lien qu’elle a avec ses publics… Les arts numériques sont nativement liquides et les œuvres peuvent se décliner aussi bien dans un lieu que sur tous les outils du digital : le site web, les appli, ou les réseaux sociaux… » Et les œuvres produites sont le plus souvent fascinantes.
Quelques marques commencent à tester. En 2015, dans certains showroom, Nike présentait les datas produites via son bracelet connecté NikeFuel. Les performances des coureurs se déployaient sur écrans, comme de longs serpents colorés, et ils pouvaient partager les images vidéo sur les réseaux sociaux. D’autres entreprises travaillent à représenter le « pulse » de leurs espaces. Dans le hall de leurs futures résidences étudiantes, le groupe Océanis proposera aux habitants de visualiser les flux d’énergie – consommation d’eau et d’électricité – générés par l’immeuble, en quasi-temps réel. L’objectif n’est pas seulement esthétique, il s’agit aussi de sensibiliser le campus à une consommation plus écodurable.
De son côté, Twitter a imaginé comment représenter la présence physique de personnes sur un événement. Chaque visiteur figurait à l’écran sous les traits d’un poisson qui se sculptait en temps réel. Plus vous aviez écrit de tweets, plus votre poisson était gros ; si vous aviez beaucoup de followers, beaucoup de poissons vous suivaient ; beaucoup de favoris, votre poisson avait de gros yeux… Le tout formait un grand aquarium où nageaient ces étranges créatures. Et pour boucler la boucle, chacun pouvait imprimer son avatar en 3 D.
Évidemment, les arts numériques en général et le data art en particulier n’en sont qu’à leurs prémices. Tout reste à imaginer. On pourra faire demain ce qui reste difficile ou impossible à envisager aujourd’hui. Les œuvres interactives qui répondent aux mouvements du corps et du visage restent, par exemple, encore au stade expérimental. « Elles exigent un calcul en temps réel déjà utilisé par les jeux vidéo, mais pour l’art numérique elles sont encore un défi », reconnaît Abdel Bounane. Combien de générations peuvent se réjouir d’avoir assisté à la naissance d’une technologie et de son art ? Reconnaissons que c’est excitant, forcément excitant !
Ce texte est paru dans le numéro 7 de la revue de L'ADN : Soyons Pop ! - à commander ici.
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