
De nouvelles formes de vie collectives émergent, tandis que la vague du biohacking atteint l’immobilier de luxe aux États-Unis. Et la rénovation énergétique attire les entrepreneurs désireux de prendre part au chantier du siècle…
Maisonnées modernes
Faire famille autrement, c’est également repenser l’organisation de l’habitat. Le phénomène des « mommunes » est éloquent : ces communautés modernes de mères célibataires, qui concernent plus de 300 000 femmes aux États-Unis, essaiment dans le monde. Lancé il y a plus de vingt ans outre-Atlantique par l'association CoAbode, ce mode de vie permettrait d’économiser 40 % du fait de la mutualisation des charges, mais aussi de bénéficier du soutien émotionnel du groupe. Une formule qui gagne en popularité grâce aux réseaux sociaux, où les hashtags #singlemomlife ou #divorcetok témoignent de la réalité de celles qui constituent 80 % des familles monoparentales dans ce pays, dont 23 % vivent sous le seuil de pauvreté.
Du côté des « Living Together Apart », on cherche à l’inverse à maintenir son indépendance. Une expression née en pleine crise des subprimes, pour désigner des couples séparés mais contraints de cohabiter pour raisons financières. Aujourd’hui, les LTA sont ceux qui ont les moyens de payer deux loyers plutôt que d'immoler leur couple sur l’autel du quotidien.
Le New York Times observe une autre tendance émergente : le rachat des maisons d’enfance pour créer des espaces multigénérationnels, répondant aux besoins d'aide aux parents tout en jouant sur la nostalgie. En France, les colocations pour seniors se développent aussi, au moment où la population vieillissante refuse la perspective peu réjouissante de l’EHPAD. Elles offrent une alternative aux maisons de retraite, comme le raconte Francis, 76 ans, au Figaro, sur sa nouvelle vie en communauté après la perte de sa femme. Enfin, The Guardian met en lumière Kate Jackson, une femme de 61 ans qui, après un divorce houleux, a retrouvé la paix dans une campagne anglaise. Avec sa chaîne YouTube, The Last Homely House, et une boutique d’artisanat en ligne, elle a atteint l’indépendance financière et sert de role model pour les femmes en quête d’authenticité. Plus largement, la question de l’habitat à partir de la deuxième moitié de la vie devient prégnante : en France, la famille Trigano (déjà à l’origine de Club Med, par le père Gilbert, ou de Mama Shelter, par le fils Serge) compte bien dépoussiérer la résidence senior avec le concept Casa Barbara – quelque part entre maison de retraite et hôtel pour seniors.
Du Botox à domicile, la dernière tendance immo de luxe aux États-Unis
Aux États-Unis, l’immobilier haut de gamme se caractérise souvent par le portefeuille de services exclusifs (amenities, ou commodités en français) rattachés aux biens. Conciergerie, sécurité 24h/24, 7j/7, salles de sport dernier cri… Rien n’est trop beau pour vous donner goût à la copropriété. Mais dans cette course effrénée aux équipements de luxe, une nouvelle étape a été franchie – rapportée par le bien-nommé magazine Fortune : l'intégration de services médicaux et esthétiques directement à domicile. Fini le temps où une piscine en rooftop suffisait à séduire ces locataires fortunés ; aujourd'hui, certains complexes résidentiels de luxe proposent des services dignes des spas médicaux les plus exclusifs, tels que l'hydratation par perfusion intraveineuse et les injections de Botox.
À l’ère de l’optimisation de soi, cette tendance semble promise à un franc succès : à Santa Monica, en Californie, The Park offre des IV drips à ses résidents, avec des traitements allant jusqu'à 399 dollars par séance. À Manhattan, le 53 West 53 s'est associé à Aida Bicaj, une facialiste chouchoute des stars, pour proposer des soins du visage dans l'intimité des appartements. Pour les gestionnaires immobiliers, ces partenariats représentent un moyen d'attirer et de fidéliser une clientèle huppée sans investir dans de coûteuses rénovations de penthouses et condominiums. Pour l’expert immobilier John Walkup, « le luxe implique l'exclusivité, et les promoteurs cherchent à se surpasser en offrant les équipements les plus récents et les plus uniques ».
Certains professionnels de santé s'inquiètent cependant de l'absence de supervision médicale adéquate pour ces traitements à domicile. Le Dr Heather Hinshelwood met ainsi en garde contre le risque que les entreprises immobilières privilégient le coût plutôt que la sécurité des patients…
Rénovation et climat : le chantier du siècle
Ce n’est plus un signal faible, mais une tendance lourde : le marché de la rénovation énergétique se structure désormais, pour capitaliser sur ce qui constitue aujourd’hui une opportunité de marché, passant en Europe de 58 milliards d’euros en 2022 à 137 milliards d’euros à l’horizon 2027, selon le fonds de capital-risque XAnge, cité par Les Echos. Et il y a de quoi faire : l’impact CO2 des bâtiments (hors construction) pèse 17 % du total des émissions GES, tandis que la précarité énergétique touche plus de 12 millions de ménages.
Du diagnostic à la réalisation des travaux, les entrepreneurs se positionnent sur toute la chaîne de valeur, avec des solutions souvent fondées sur les technologies. Kelvin, par exemple, utilise l'IA pour générer des plans de travaux de rénovation énergétique. La startup a levé 5 millions d’euros pour son logiciel. Le financement de ces travaux, qui grèvent les budgets et empêchent d’avancer dans ce qui peut s’apparenter au chantier du siècle, est aussi un segment à suivre. Voyez la proptech Vasco et son modèle économique pour le moins original : elle se propose de financer les travaux de rénovation énergétique jusqu’à 100 000 euros, en échange d’une prise de participation de la maison… Les propriétaires gardent l’usufruit de la maison et ne remboursent l’entreprise qu’à la vente du bien. Vasco, qui a levé 2 millions d’euros en mai 2024, se rémunère sur les frais de gestion, tandis que les parts de propriété, détenues dans une foncière dédiée, se valorisent avec les gains d’efficacité énergétique et constituent des placements financiers pour les investisseurs institutionnels.
Mais en parallèle de ces initiatives privées, les dispositifs publics comme MaPrimeRénov’ peinent à jouer leur rôle de levier : retards de traitement, manque d'accompagnement, complexité administrative, contrôles resserrés (un dossier sur dix était frauduleux en 2024 … Les critiques s'accumulent, freinant l'élan pourtant crucial de la rénovation massive des logements.
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