Ils explorent les catacombes, découvrent des villes bâtiments abandonnés, éprouvent l'envers mystérieux des villes. Qui sont les "urbexeurs"?
Les Parisiens le savent : sous leurs pieds, dans d’interminables galeries souterraines, crapahutent les adeptes des catacombes. Ils fouillent, explorent avec minutie et passion les souterrains interdits au public, parfois pendant plusieurs jours. Officieusement, ils donnent un coup de main à la municipalité cartographiant de nouvelles galeries. C’est ainsi qu’il y a une dizaine d’années, des cataphiles ont découvert une salle de cinéma de 400 mètres carrés sous le Trocadéro.
Mais depuis les années 1980, il semblerait que cette exploration urbaine ait trouvé de nouveaux terrains de jeux : si certains grimpent sur les toits, d’autres ont décidé d’explorer les lieux abandonnés les plus insolites. Parc d’attractions, hôpital psychiatrique, couvent, ville fantôme, bâtiments industriels… les urbexeurs (de la contraction d’urbain et d’exploration) ne se donnent aucune limite. Clandestins, le plus souvent dans l’illégalité, ils se retrouvent par petits groupes pour se rendre dans ces lieux laissés en friche, toujours plus inaccessibles. Chaque exploration est préparée méticuleusement et respecte des règles essentielles : respecter le lieu, ne rien voler, ne rien vandaliser, simplement explorer ; ne jamais divulguer leur emplacement ; et se conformer à certaines règles de sécurité – informer un proche de son projet, apporter un portable chargé, et explorer a minima en binôme.
Une fois toutes ces règles respectées, les passionnés peuvent se laisser aller à découvrir des lieux surprenants, mystérieux, parfois inquiétants, toujours chargés d’histoire. « Mon plus beau souvenir : un hôpital. Non pas pour la beauté du lieu, mais pour le sentiment qu’il m’a inspiré. Plus jeune j’y avais séjourné pour un problème de santé. Quand j’y suis retourné, j’ai redécouvert le lieu, abandonné, visité la morgue envahie par un capharnaüm d’archives dispersées… Un sentiment étrange, mais boosté par l’adrénaline », raconte un urbexeur. L’occasion de capturer ces atmosphères étranges, de ressentir les espaces ravagés, et de les partager par la photographie avec des personnes curieuses mais moins audacieuses et téméraires.
Dans les années 2000, l’exploration urbaine était encore méconnue, et la discipline était réservée aux initiés : des explorateurs trentenaires et des cataphiles aguerris. Aujourd’hui, l’activité passionne les plus jeunes, moins scrupuleux de l’esprit initial. Depuis ces trois dernières années, la donne a changé, et la médiatisation du phénomène n’y est sans doute pas étrangère. Les lieux sont plus souvent divulgués, l’information circule très vite, on assiste à des pillages, à des dégradations… Une tendance qui pourrait sonner le glas de cette pratique.
L’urbex est très courante dans les pays anglo-saxons, et ses adeptes n’hésitent plus à dépasser les frontières. Tchernobyl est souvent cité comme un haut lieu d'exploration, une sorte d’équivalent du mont Blanc pour les alpinistes…
Photographe-auteure, exploratrice urbaine, elle s'interroge sur la valse du bâti depuis 8 ans. A découvrir absolument.
Quelques sites d'urbex à consulter:
Cet article est paru dans le numéro 9 de la revue de L’ADN : Les nouveaux explorateurs. Votre exemplaire à commander ici.
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